Voici l’exemple parfait de la raison d’être de Game Side Story d’un point de vue des gros jeux. Pourquoi mettre en Une ce jeu estampillé Spider-Man ? Tout simplement parce qu’à force de critiquer les adaptations, on en vient à oublier que certaines peuvent être réussies. On va alors essayer de rappeler aux joueurs qu’un jeu est un jeu et que par conséquent, ils sont tous différents et ne doivent pas être jugés sur leur sujet ou sur leur appartenance à un quelconque esprit marketing. Dis-t-on d’une musique qu’elle est mauvaise lorsqu’elle est surmédiatisée ? Les esprits chagrins oui, mais pas ceux qui aiment un tant soit peu l’objectivité.
La peur du gâchis habituel…
Après avoir adoré Spider-Man 2 et Ultimate Spider-Man puis pesté devant un Spider-Man 3 franchement raté sur consoles de nouvelle génération, je n’attendais plus rien de la franchise mettant en scène le tisseur de chez Marvel qui était alors sous le giron du développeur Treyarch (désormais plus habitué aux Call of Duty chez le même éditeur). Il s’en est suivi Spider-Man : Friend of Foe avec son look enfantin et un gameplay sympathique en coopération, mais vraiment pas incroyable. Enfin, Spider-Man : Web of Shadows était moche mais pavé de bonnes idées, d’un gameplay dynamique et de guest-stars intéressantes venues ponctuer un scénario loin d’être bête. Dommage pour l’équipe de développement qui a vu son jeu se vendre de façon très sporadique… Il n’en a pas fallu davantage pour qu’Activision licencie tout ce beau monde et laisse mourir l’innovation dans l’oeuf.
Shattered Dimensions était donc attendu avec de gros yeux, l’esprit chagrin et la certitude que ce concept de plusieurs héros dimensionnels allait se casser la figure. Pire encore, Shattered Dimensions est signé Beenox : le studio canadien chargé des conversions PC assez infâmes des quelques jeux Activision. On se souvient par exemple du tristement célèbre jeu officiel du tout aussi mauvais film des Quatres Fantastiques. Sauf que chez Beenox, depuis, ils ont repris du poil de la bête…
Déja créateurs des adaptations des films Bee Movie et Monsters vs. Aliens en jeu vidéo, Beenox s’est surtout montré très ambitieux avec un Guitar Hero : Smash Hits aux partitions très bien pensées qui relançaient l’intérêt de certaines parties de guitare à plusieurs. En changeant de développeur, la franchise avait quelque peu évolué et on y retrouvait même une nouvelle mise en scène désormais reprise dans les nouveaux Guitar Hero sortis depuis. Au-delà de ce fait d’armes somme toute peu marquant, Beenox n’évoquait aux joueurs guère plus qu’une certaine fierté du Canada et de sa démarche financière exemplaire envers les studios de développement de jeux vidéo. Avec Shattered Dimensions, Beenox gagne sa carte de membre du club des développeurs à surveiller de très près dans les prochaines années.
Un héros, quatre versions.
Amazing Spider-Man, Spider-Man Noir, Spider-Man 2099 et Ultimate Spider-Man dans son costume noir. Ces quatre héros, de quatre univers de comics différents, se retrouvent téléportés dans un scénario très classique. Mysterio, roi des effets spéciaux et criminel de longue date, met la main sur la Tablette de l’Ordre et du Chaos aux pouvoirs interdimensionnels qui lui permettrait de contrôler le monde. Spider-Man, dans sa version Amazing, tente alors de l’arrêter, mais il ne fait que provoquer davantage de dégâts. La tablette se brise en plusieurs fragments dispersés à travers les univers parallèles. Madame Web, qui contrôle la toile du temps et des dimensions, intervient alors pour guider notre héros et ses trois alter ego dimensionnels dans une aventure ultraréférencée qui si elle est évidemment accessible à tous, ne trouve son sens qu’après des fans qui découvriront une adaptation de quatre mondes fidèle et joliment réalisée.
Le jeu propose donc une vingtaine de niveaux divisés en un entrainement, trois actes et un affrontement final. Chaque niveau possède son « Villain » ayant mis la main volontairement ou non sur un des morceaux du fragment. Généralement, l’histoire de chaque niveau reprend le même fil rouge. Spider-Man découvre quel est l’ennemi, doit affronter ses sbires, l’affronter une première fois, recourir à une ou deux phases d’exploration plus ou moins originale et passer à l’affrontement final où l’adversaire utilisera les pouvoirs du fragment. Le scénario de Shattered Dimensions n’est pas conséquent et volontairement sans profondeur. Il ne fait que narrer une aventure très simple à travers quatre mondes plus complexes à définir. C’est en cela que le travail de Beenox est exemplaire, car chaque acte est constitué de quatre niveaux et chaque niveau se déroule dans une dimension différente. Amazing, Noir, 2099 puis Ultimate.
Les différents tisseurs partagent un même système de combos, mais possèdent un style de combat totalement différent. Amazing est grandiloquent, Noir est furtif avec des relents évidents de Batman : Arkham Asylum dans son gameplay d’infiltration, 2099 est surtout porté sur le style alors qu’Ultimate et son costume de symbiote est bien plus violent dans ses affrontements. Le système de jeu est alors redondant, mais efficace. Shattered Dimensions est un jeu qu’on ne se lance que le temps d’un niveau, pour affronter son « ennemi du jour » et prendre un pied fou à parcourir de véritables pages de comics magnifiquement mises en valeur. Chaque monde est réellement différent et les joueurs ne seront sans aucun doute pas tous du même avis quant au classement de leur niveau favori, tant cela dépend de ce qui est recherché dans le feu de l’action. Les niveaux Ultimate son par exemple très expéditif et peu intelligent, en plus de manquer de charisme dans les nombreux dialogues davantage « rentre dedans ». J’ai donc naturellement moins apprécié cet univers qu’un autre, mais ceci est tout à fait subjectif. Reste que d’un point de vue gameplay, on en a vraiment pour son argent. En plus de profiter de nombreux QTE très impressionnants et de scènes de baston à la première personne, où l’on s’amuse à défigurer Kraven, Juggernaut ou l’Homme Sable à grands coups de sticks analogiques comme on le ferait dans un jeu de boxe, Shattered Dimensions propose aussi un sympathique système d’évolution du personnage.
Originalités de gameplay.
À la manière des Achievements et des Trophées des consoles de salon actuelles, le jeu comporte une quinzaine de défis à effectuer dans chaque niveau. Ceux-ci peuvent concerner un type d’ennemi à abattre d’une certaine façon, un boss à affronter ou tout autre objectif précis et offrent un certain cumul de points aux joueurs une fois débloqués. Ces points servent à acheter des améliorations de personnages telles qu’une barre de santé plus grande, un pouvoir moins long à recharger ou même des costumes secrets particulièrement irrésistibles qui sauront toucher la corde sensible du fan. Il est aussi possible possible de dépenser ces mêmes points dans l’amélioration des combos et l’achat de nouvelles prises, permettant ainsi de ne pas devoir matraquer les boutons X et Y en vain en oubliant que des combos très efficaces et visuellement intéressants sont aussi de la partie. Les prises aériennes et les jets de toiles sont des techniques aussi classes que dévastatrices et dans les niveaux les plus élevés, en mode de difficulté Normal ou Difficile, il s’agira de les posséder pour ne pas recommencer une centaine de fois la même section de jeu. Attention donc à ne pas tout dépenser en costumes pour se retrouver au final complètement démuni (mais stylé) devant un ennemi trop complexe à vaincre.
Affirmer que ce Shattered Dimensions est une réussite totale serait faire preuve d’un peu trop de fanboyisme. Néanmoins, il est un jeu de bonne qualité, une très bonne adaptation et une dose de fun incroyable pour quiconque mettra la main dessus. Loin des sempiternelles adaptations trop rapides et mal jaugées, Spider-Man : Shattered Dimensions est d’une humilité à faire pâlir pas mal de gros jeux du même genre. Il n’a pas la prétention de proposer un scénario exubérant, un gameplay incroyablement révolutionnaire ni même une profondeur de jeu exemplaire. Il fait juste ce qu’on a toujours demandé à une adaptation vidéoludique : il adapte un univers de façon à la rendre jouissif à jouer, à parcourir, voir même à partager avec ses amis en se passant la manette de temps à autre et en profitant des très jolies cinématiques. Les blagues du tisseur sont irrésistibles, le doublage original est une merveille (la version Française l’est moins mais reste très correcte), le level design est inspiré et il n’y a jamais eu meilleur jeu Spider-Man, tous supports confondus. Reste que son volontaire manque de profondeur le destine avant tout aux fans et à ceux qui veulent mettre la main sur un jeu fun d’une douzaine d’heures de jeu bien remplies. Les puristes mettront sans doute le double pour tout débloquer.
Argh, tu à envie de me faire baver encore plus ?
Très bon test comme d’ab 😉