Suite d’un premier épisode déjà bien aimé de la communauté des fans de point & click, Edna & Harvey reviennent dans un second titre qui peut tout aussi bien être apprécié avec ou sans avoir pris connaissance de son ainé. Une chance, vu que je ne l’ai pas fait…
Le monde étrange de la timide Lili
C’est dans un monastère que se déroule notre histoire. Lili est une petite fille blonde très timide et dont les paroles se résument à des onomatopées. Elle est sous le joug de Mère Supérieure, une religieuse impitoyable et violente. Heureusement pour Lili, elle a une meilleure amie : Edna. Celle-ci est sa porte de sortie lorsqu’elle ne supporte plus son quotidien. Avec elle, elle y trouve de l’amusement, un vrai réconfort… Sauf quand elle découvre qu’Edna a des problèmes et qu’il va falloir l’aider. Lili se lance alors dans une grande aventure pleine de péripéties, de personnages très particuliers, dans un monde toujours jovial ou de petites patates viennent peindre les lieux les plus violents et cacher le gore, le sang de toutes les actions entreprises par notre héroïne. Et si le monde de Lili était en réalité beaucoup moins coloré que cela ?
Harvey’s New Eyes tient son nom de toutes les complications proposées par un scénario mêlant une jeune fille innocente à un monde de Bisounours, mis en avant par une voix off magnifiquement drôle et des situations très sombres, mais toujours rendues joviales par la mise en scène et la censure volontaire. Incompréhensible me dites-vous ? C’est parce que vous n’avez pas terminé le jeu ! Toute l’aventure est liée, possède ses explications réalistes et nous en raconte davantage sur ces personnages principaux tous plus frappés les uns que les autres. Dans un style visuel en 2D très simple et pourtant plein de charme, Daedalic Entertainment parvient à proposer une aventure complètement originale et aux doubles sens très réussis.
Jouer avec les interdictions…
Harvey’s New Eyes se joue exactement comme tout point & click habituel, à la différence près qu’il propose quelques originalités scénaristiques au bout de quelques petites heures de jeu. Ainsi, Lili va se faire hypnotiser par un étrange docteur et n’aura plus le droit d’aller à l’encontre de certaines règles pourtant utiles pour utiliser tous les objets du décor : ne pas jouer avec le feu, ne pas mentir aux adultes, ne pas jouer avec des objets coupants, etc. Il sera alors nécessaire de défier des « lapins » dans la psyché de Lili pour détruire ces barrières mentales. Ensuite, il sera possible d’en désactiver une à la fois, en fonction de l’objet à accomplir. On notera quand même que les niveaux « mentaux » ne sont pas tous très intéressants et certains manquent clairement de défi et d’utilité.
Quelques minijeux sont aussi de la partie : du combat au tour/tour sur un échiquier, de la réflexion avec un labyrinthe de portes, de la logique avec quelques combinaisons de symboles à effectuer… On est dans le classique, mais dans l’efficace. Les minijeux ne sont pas du tout obligatoires et peuvent être sautés directement, histoire de plaire à ceux qui aiment la recherche et la combinaison d’objets avant tout. Pour cela, il en auront pour leur argent : le jeu peut se terminer en cinq heures avec la bonne solution, mais nécessitera tout de même cinq heures de plus pour les débutants.
Une réalisation « Daedalicienne » ?
On commence à en avoir l’habitude avec Deponia, Chains of Satinav ou même le premier Edna & Harvey, mais les développeurs de Daedalic ont du talent et tiennent à nous le rappeler. Ainsi, ce Harvey’s New Eyes est doublé à la perfection dans un anglais adorable. Allemand d’origine, le jeu a donc eu le droit à une traduction de qualité pour l’instant seulement en Anglais. C’est peut-être le seul vrai défaut de ce titre : il n’a pas de traduction française et cela empêchera beaucoup de fans de jeux d’aventure anglophobes d’en profiter. Après, à eux aussi de faire un petit effort de ce côté-là…
Difficile de dire à quel point ce jeu d’aventure est de qualité, tant finalement on en revient à des banalités du genre « le scénario est parfait et très intelligent », « les dialogues sont à mourir de rire », « les situations sont percutantes, pleines de sous-entendus et la censure des patates cachant tout ce qui est gore dans le jeu rend l’atmosphère beaucoup moins joviale qu’elle n’y parait ». Du coup, on se contentera surtout de dire que le jeu ne vaut que 20 € et propose une aventure excellente. Que ce soit du début, avec sa petite chanson de jazz à l’introduction, jusqu’à la conclusion avec ses trois possibilités de fin toutes très amusantes et touchantes. En clair : jouez-y !