La talentueuse dessinatrice/Rédactrice Stéphanie s’est emparée de The last of Us et vous propose de découvrir ce jeu hors du commun avec un test lui aussi clairement différent de ce que vous avez l’habitude de lire/voir. Et je vous le promets : vous n’en ressortirez pas sans la furieuse envie d’aller vous procurer ce qui est sans doute le dernier bijou de la PlayStation 3.
Jour 28
Du quitter Boston. Le soleil nimbe l’horizon à perte de vue. La nature a repris ses droits et la végétation creuse son sillon de vie au travers du bitume. Rivières, forêts, ça change de la ville. Devons beaucoup escalader. Pas toujours simple de progresser dans les vestiges d’orgueil de l’homme civilisé. La gamine est chiante. Parle trop. Ai trouvé une vieille BD, ça a l’air de lui plaire. Au moins elle cause plus quand elle lit. L’été approche, les couchers de soleil flamboient sur la crête.
Peut-être l’issue du voyage là-bas ?
Jour 99
Avons du passer dans les égouts. Beaucoup de spores mais ça a été. Penser à dénicher des piles pour la lampe au plus vite. Claqueurs sont gérables finalement. Suffit de pas faire de bruit, ils ne repèrent même pas la lumière. Les infectés au premier stade ne sont pas gênants. Suffit de garroter vite. Les groupuscules de milice sont plus durs à affronter. Mieux vaut éviter le contact. Toujours ramper, plus sûr. Ramasser un maximum de munitions, on ne sait jamais. La gamine se débrouille bien. Se faufile facilement pour déverrouiller des portes. Finalement homme plus dangereux qu’infecté… Toujours.
Jour 198
Trouvé pas mal d’outils aujourd’hui. De quoi bricoler une arme de fortune. Beaucoup plus résistante, se brise moins vite sur les crânes de ces maudits infectés. Suis tombé sur une notice permettant de faire des bombes. Très sympa. Marche bien et objets très faciles à trouver. Plus difficile de faire des pansements. Manque d’alcool. Les gens ont bu ce qu’il restait ici, peux pas les blâmer… Nouvelle arme aussi. Dois trouver des munitions par contre, car le chargeur était vide. Plus hasardeux ça. Mieux vaut se concentrer sur les objets de défense simples à fabriquer. Penser fouiller les poubelles. Toujours. Gamine a enfin appris à siffler. Me tapait sur le système. Pas si chiante finalement.
Jour 245
Pas vu d’infectés depuis longtemps. Cœur se serre quand je surprends un animal sauvage s’ébaudir dans les hautes herbes. La nature continue sa route et semble voir un espoir que l’Homme ne perçoit pas. Ou alors, l’Homme ne fait pas partie de ses plans et elle ne s’est jamais aussi bien portée que sans lui. Croisé encore un groupe de pilleurs aujourd’hui. M’ont pas vu. Fait pas de mal de conserver quelques munitions. Nouvelle tête qui va nous accompagner quelques temps. La gamine l’aime bien. Me méfie. Le dernier nous a lâchés au premier infecté croisé. Dors d’un œil. Pistolet chargé.
Jour 324
Continuer. Toujours tout droit. Marre de marcher, mais nouveau moyen de transport trouvé. Les saisons changent. Marcher encore. Toujours plus loin. Vers les Lucioles. Les Lucioles… Existent-elles au moins ? L’humanité mérite-t-elle d’être sauvée ? J’en doute de plus en plus… Je m’en fous. Mais pour elle, je le ferai. Pour elle. Ellie…
Last of Us est plus qu’un jeu, c’est une expérience de vie qui vous marque la peau de ses morsures fiévreuses et térébrantes. Une vision de ce que réserve l’humanité lorsque les carcans de la société s’effondrent. Brutale, cruelle, amère. Assez proche du Walking Dead de Tell Tales pour son ambiance délétère et sa paranoïa étouffante. Moins viscéral, car les choix sont narrés et imposés, mais tout aussi intense par son réalisme et ses expressions faciales qui rendent les personnages plus vivants et crédibles que jamais. Vivants donc vulnérables et le danger se fait alors tangible, omniprésent. On se sent réellement impuissant, luttant à contre-courant dans un flot d’événements qui vous emporte vers un épilogue inéluctable, sanglant, d’une noirceur fuligineuse, sans espoir.
Bataillant chaque minute et mendiant chaque souffle de vie. Survivre instant après instant sur un canevas chaotique où un simple sourire n’est plus qu’un fantôme illusoire noyé dans des souvenirs qu’il est douloureux de se remémorer. Recouvrer sa foi pour quelques secondes au hasard de rencontres impromptues. Ou la perdre définitivement dans un ultime coup porté aux flancs. Naugthy Dog nous sert avec The Last of Us un road trip déchirant, enivrant de beauté, véritable maelstrom d’émotions contradictoires.
Qui n’a pas réprimé un sanglot à la fin du prologue n’y trouvera certainement là qu’un simple jeu d’infiltration/action. Les autres prendront gifles sur gifles, visuelles, émotionnelles… Un concentré de jouissance ludique charriant un torrent d’émotions incontrôlables. Le joueur s’en trouve malmené, luttant alors lui-même à contre-courant à l’instar des personnages qu’il apprend à aimer, à détester. La morsure des infectés restera alors à jamais gravée dans votre cœur de gamer. Brutale, cruelle, amère.