Il est sans doute absurde de vouloir présenter Myst, un jeu culte parmi les cultes, que tout le monde connaît, ou se doit de connaître par curiosité naturelle. Pour fêter ses vingt années d’existence comme il se doit, Cyan Worlds a décidé de le ré-éditer dans une version qui se veut supérieure sur plusieurs points. C’est donc ce que nous allons essayer de voir mes chers amis.
Qu’est-ce que Myst ?
Myst, c’est tout de même plus de six millions de copies qui ont trouvé preneur, plusieurs adaptations pour différents supports allant de la Playstation à la 3DS en passant par iOS, quatre suites dont Riven ou Exile, et deux remastérisations, Myst L’Apogée et realMyst. Son succès fut si incroyable que son nom fut utilisé pour désigner un sous-genre du point and click : le myst-like. On se rappellera des doom-like à ce propos. Il cartonna si bien qu’on l’a même dit responsable de l’augmentation des ventes de lecteur de CD-rom, outil alors nécessaire pour y jouer.
Mais dans le fond, c’est quoi Myst pour les trois gars qui ne le connaîtraient pas ? Il s’agit en vérité d’un livre qui est une passerelle vers un autre monde, c’est une île de taille modeste sur laquelle se trouve différents bâtiments aux architectures antiques, un zeppelin, ou encore un voilier pour le moment échoué, tout cela servant de décors à une multitude de mécanismes complexes qui à première vue ne veulent encore rien dire. Au cœur de cette île se trouve une bibliothèque, et l’on peut dire que c’est vraiment à partir de là que les choses sérieuses peuvent commencer.
Le contenu de la bibliothèque est en piteux état. La majeure partie des livres ont été visiblement brûlés. Quelques uns ont gardé un état respectable et leurs écritures relatent les voyages d’un homme prénommé Atrus dans des mondes qu’il appelle »Âges ». Si ses récits sont passionnants, deux autres livres, mis à l’écart, attirent tout de même notre œil avec insistance. Un livre rouge et un livre bleu qui sont en réalité des prisons de papier pour deux frères qui se disent les fils d’Atrus. Ils se prénomment Sirus et Achenar. Ils ont tous les deux besoin que vous retrouviez les pages manquantes de leurs livres respectifs afin de pouvoir les en libérer.
Myst ne vous prendra jamais par la main. Il requiert pas mal d’exploration, de curiosité et de réflexion. Il vous faudra apprendre comment fonctionnent les machines au centre des énigmes en testant la façon dont elles réagissent à vos actions, ou en trouvant des indices ça et là, notamment dans les livres de la bibliothèque. Myst n’est pas linéaire et laisse une liberté modérée au joueur. Le but recherché semble en effet d’avoir voulu nous donner l’impression d’être perdu. Il nous appartient donc de retrouver la sortie.
Qu’est-ce que realMyst Masterpiece Edition ?
Avant de parler de ce cette édition dite de chef d’œuvre, il me semble nécessaire de rappeler ce que realMyst est pour Myst. L’original reposait en effet sur un système de déplacements à base de clic, comme dans la plupart des jeux d’aventure, avec un point de vue à la première personne fonctionnant sur une succession d’images pour simuler une progression, alors que realMyst introduisit la série à la troisième dimension en temps réel.
La Masterpiece Edition est donc la remise à niveau technique de ce qui était déjà un remake avec des textures de meilleure qualité, du bloom, du blur et autres fantaisies, des effets météo et de lumières qui ajoutent un réel plus à l’ambiance, une eau plus convaincante ainsi qu’un peu de verdure. Certaines textures combinés à ces nouveaux effets leur donnent parfois un rendu un peu plastique, et certains modèles 3D sont clairement sommaires, mais dans son ensemble, le coup de peinture est salutaire. On regrettera plutôt que le framerate ne soit pas toujours optimal, même sur une très bonne machine, le jeu se permettant de ramer par moment.
Et bien que les ajouts de cette version soient principalement esthétiques, on appréciera tout de même l’âge supplémentaire, Rime, accessible après avoir obtenu la »bonne » fin du jeu, car oui il y en a plusieurs, ou encore le mode free roaming qui en gros vous permet tout simplement de vous déplacer librement, à votre guise, et d’aller un peu n’importe où. Mais si vous êtes un puriste, le mode de déplacement classique de Myst reste disponible dans le menu option.
En plus de tout cela, il y a quelques options supplémentaires, comme la possibilité d’afficher d’une pression d’un bouton une image du Myst original, l’utilisation d’une lampe torche, un cycle jour-nuit ayant fait son apparition, ainsi qu’un guide directement intégré dans le jeu pour vous aider au cas où vous seriez bloqué. Néanmoins, on retiendra principalement de ce RealMyst Masterpiece Edition, qu’il s’agit avant tout d’une mise à jour graphique afin de faire rentrer ce jeu mythique dans la modernité tout en aidant à renforcer un peu plus l’immersion dans ce monde à part.
Toute histoire a une fin
Myst a déjà connu de nombreux ravalements de façade. Cette nouvelle version n’en est qu’une de plus parmi tant d’autres, et pourtant en terme d’immersion, entre le bruit de la pluie, le vent qui berce l’herbe, les rayons du soleil qui traversent le feuillage des arbres, la nuit qui succède au jour, on y gagne beaucoup. Si vous avez déjà joué à Myst et que vous l’avez aimé, et à moins que vous ne soyez un puriste intégriste, cette édition devrait vous satisfaire sans pour autant vous faire saigner des yeux, car oui, l’original a tout de même vieillit. En plus, vous avez le choix de jouer à l’ancienne pour ainsi retrouver les mêmes sensations qu’à l’époque. Sinon, c’est le même jeu à peu de choses près, si ce n’est qu’il tourne sur nos machines actuelles.
Si au contraire vous n’y avez jamais joué de votre vie, voilà donc la meilleure des occasions pour réparer cette erreur. Certes, il n’est pas parfait graphiquement parlant, mais reste tout de même joli et immersif. Et c’est bien là-dessus qu’il fonctionne le mieux. Myst est une invitation au voyage où il faudra s’abandonner à l’exploration avec en fond l’histoire parfois tragique de la famille du mystérieux Atrus.
Aiguisez votre sens de l’observation et de la déduction, car vous en aurez grandement besoin pour venir à bout de ce qui se présentera devant vous. Ce jeu repose énormément sur ses énigmes, et n’étant pas le moins du monde dirigiste, ou presque, il vous faudra vous débrouiller pour comprendre quoi faire et quand. Il est étonnant d’ailleurs que cet aspect demeure encore aujourd’hui toujours aussi rafraîchissant, ce qui quelque part démontre bien dans quel état est la production actuelle, toujours plus linéaire. Il reste définitivement un jeu à part, et ils sont rares de nos jours les jeux encore capables de vous faire réfléchir ne serait-ce qu’un minimum. Mais il a aussi pris un coup dans l’aile. Si on appréciera une ergonomie améliorée, plus intuitive et surtout plus compréhensible par le biais d’aides visuelles, certaines tâches restent incommensurablement redondantes avec d’incessants aller-retours pas toujours très intéressants.
Le plaisir est intact, Myst est toujours Myst, cet étrange mélange de surréalisme et d’énigmes de haut niveau dans une ambiance qui lui est propre dans ce qui est la plus belle de ses versions. Si vous aimez explorer l’inconnu, vous serez sans aucun doute séduit, même si son prix d’une quinzaine d’euros pourra paraître élevé aux vieux de la veille qui l’ont déjà terminé.
Cette réédition est d’autant plus salutaire que le premier Myst n’est pas forcément des plus faciles à faire tourner sur une machine récente. Pour un classique du jeu vidéo, on peut presque parler de sauvegarde du patrimoine.