A une heure avancée de la nuit, il arrive qu’une soirée arrive à un point mort. En général il faut l’aide d’un convive fort ivre pour débloquer la situation, ou bien la solution radicale : sortir un jeu. Ce jeu peut être de société, ou vidéo, ça dépend de la situation. Le truc, c’est que le jeu vidéo tout le monde n’aime pas et parfois un Street Fighter ne suffit pas à ravir la populace. Puis si la solution du jeu vidéo est gagnante, on connait tous ce mec “qui fait genre qu’il y capte que dalle” alors qu’en fait c’est un dieu du stick qui dégoûte tout le monde. Du coup on retombe sur les classiques jeux de cartes, une solution éprouvée mais efficace. Cela dit depuis quelques temps on assiste à une recrudescence des “party game” (au sens large du terme). J’en veux pour exemple des jeux tels que Samurai Gunn, TowerFall Ascension ou plus récemment, Lethal League. Des jeux taillés pour le multijoueur en local, impliquant des règles basiques, compréhensibles de tous et qui prennent même pas 2 minutes à être expliquées. Crawl joue dans cette catégorie là, mais est-il est mesure de combler une ambiance de soirée qui s’essouffle ?
Le jeu du sirop
Crawl c’est tout simple sur le papier. Jouable jusqu’à quatre, 3 joueurs vont incarner des fantômes tandis que le dernier va se retrouver dans la peau du “héros” évoluant dans un donjon en vue de dessus. Le but pour les fantômes : dégommer le héros adverse afin de prendre sa place. Pour ce faire, ils n’auront d’autre choix que de déclencher les pièges mortels du donjon ou d’invoquer des créatures maléfiques afin d’occire ledit héros. Simple n’est-ce pas ? Sauf que les quelques fois où j’ai sortit le jeu en soirée, j’avais l’impression d’être Perceval expliquant un de ses jeux absurde dans la taverne de Kaamelot. Crawl n’explique rien et est très vite assez confus. Les repères visuels pour les fantômes sont faciles à louper et les différents tableaux du donjon sont de taille très réduite ce qui n’aide pas à avoir une vision globale de l’action en cours. Pour le héros ce n’est guère mieux. Il est certes aisé de comprendre comment taper et dégommer du monstre. C’est une autre paire de manche lorsque l’on se retrouve chez le marchand à devoir choisir une arme sans trop savoir ce qu’elle fait, quelles sont ses stats tout ça et quels avantages le nouvel équipement va nous apporter.
Mais revenons au tout début du jeu, et à ce qui ne va pas en fait. Lorsque la partie commence, il faut choisir un type de fantôme. Ce dernier déterminera quelles créatures il sera possible d’invoquer pour se débarrasser du héros. Alors oui au bout de quelques parties on commence à comprendre qui fait quoi… Mais lors des premières c’est un foutoir sans nom où les joueurs les moins aguerris seront complètement paumés car aucune indication ne viendra guider un choix plutôt qu’un autre. Autant dire que pour un jeu du genre c’est dommage (TowerFall est par exemple très simple à saisir, et ce dès les premières secondes). Ensuite la partie commence vraiment, avec les problèmes que j’ai précédemment évoqués : le manque de lisibilité de l’action, peu d’explications, et au final une trop grande place au chaos le plus total qui déterminera la suite des événements. Il est bien entendu possible de fomenter quelques stratégies avec ses collègues fantômes pour essayer de tuer le héros le plus vite possible (avant qu’il accumule trop d’or, ou qu’il avance dans le donjon) mais cela reste pour le moment bien trop limité. Enfin, dernière phase de jeu, celle qui se déclenche lorsque le joueur en chair et en os est parvenu à avancer d’un étage. Le round se termine et là il faut dépenser des points.
Ces points on les accumule un peu au pif en effectuant des actions dans le donjon (en tant que héros : tuer des monstres, en tant que fantôme : toucher le héros…). Les utiliser servira à améliorer ses monstres à invoquer sous forme fantomatique. Là aussi il y a un gros soucis. Lors de ma première partie j’ai voulu faire évoluer un de mes monstre, à savoir mon squelette de base. J’avais le choix entre un squelette vert, et une autre créature. Sauf qu’aucun choix stratégique n’est possible car dans l’absolu on fait évoluer complètement au hasard… sans savoir l’impact réel sur les statistiques du monstre ou ses compétences. On ne se dit pas “Ah mais oui ! Je vois complètement ce à quoi cette capacité pourrait me servir”.
Pixels morts
Il faut être clair. Des fois le pixel art permet de faire des choses absolument sublimes, des décors travaillés à fond, ou du minimaliste classieux. Crawl ne fait ni l’un ni l’autre. Au contraire, son style graphique pixel-art le desservi un peu. En aucun cas il n’est justifié. Les sprites sont énormes, simplistes et le tout est affreusement zoomé (d’où les tableaux de taille réduite). Ici nous ne sommes pas face à un jeu qui parvient à justifier son parti pris graphique. Peut-être qu’un zoom moins important aurait rendu justice au travail des graphistes je ne sais pas… Mais en l’état je n’ai pas du tout adhéré à l’ensemble. A côté de ça, les musiques sont plutôt sympathiques sans être non plus inoubliables.
Crawl est pour l’instant un peu décevant. Toutefois il faut savoir garder espoir. Le jeu est encore en early access et il a le temps d’évoluer dans le bon sens. Il faut que les développeurs améliorent à tout prix l’explication des mécanismes de leur soft pour qui ne toucherait pas souvent un pad. Ce genre de titre bien particulier est taillé pour des petites sessions et si l’on passe plus de temps à se demander ce qu’il est en train de se passer à l’écran plutôt qu’à s’amuser, c’est qu’il y a un soucis quelque part. Pourtant le potentiel est là. Le principe de base est plutôt drôle et les plans machiavéliques à monter en tant que fantôme méritent d’être plus grandement exploités. La partie héros quant à elle est classique mais a su faire ses preuves, rien à redire de particulier. Mis à part l’obscurantisme entourant ses règles, et sa partie graphique un peu dans les choux, Crawl a tout pour être un jeu à sortir pour animer une soirée un peu arrosée.