Project Temporality se base sur un concept plutôt simple, et pour le moins attrayant : et si vous pouviez résoudre des puzzles en effectuant plusieurs actions à la fois, comme si vous jouiez en coopération, mais en étant tout seul ? Comme l’indique son nom, ce puzzle-game à la troisième personne vous permet en effet de contrôler le temps, ce qui se traduit par la possibilité de le remonter et de créer des clones qui effectueront les actions que vous venez d’effacer en remontant dans le temps. Si l’idée de manipulation du temps est plutôt commune dans les différents univers de science-fiction, c’est un concept beaucoup plus original dans le monde du jeu vidéo qui offre un tas de possibilités et de mécaniques intéressantes.
Back to the past… and the future…. and the past again
Vous jouez le Sujet 87 et, équipé de la fameuse combinaison vous permettant de remonter le temps, vous devez résoudre divers parcours sous la tutelle d’un Amiral et de son équipages de scientifiques dans une base stationnée autour d’une étoile qui fut autrefois Jupiter. L’univers dans lequel se déroule le jeu est assez peu développé alors que beaucoup de pistes assez intéressantes sont évoquées (on parle par exemple du voyage dans le temps qui aurait eu un impact désastreux sur l’humanité ou encore le fait que les humains soient capables de transformer des planètes en étoiles) tandis que l’histoire se déroulant à l’intérieur de la base est contée à travers des journaux ou e-mails traînant un peu partout dans les niveaux, ainsi que des quelques directives et commentaires (écrits) venant de l’amiral. Ces divers témoignages donnent un semblant d’histoire mais ne sont en aucun cas nécessaires, la reléguant au second plan tant elle est peu importante. De plus, le fait que la narration soit entièrement écrite casse un peu l’immersion lorsque les divers messages s’affichent à l’écran, arrêtant toute autre action. C’est plutôt dommage car cet univers a beaucoup de potentiel et aurait permis de donner une identité propre au jeu avec des doublages et éventuellement des cinématiques entre les niveaux.
Visuellement, c’est plutôt très joli et techniquement au top (les divers effets liés au voyage dans le temps sont assez réussis). Les objets importants sont bien mis en valeur, de même que vos clones qui sont repérés par des couleurs qui leur sont propres se retrouvant aussi sur la carte, ce qui facilite leur utilisation là où une interface brouillon aurait pu gâcher toutes les possibilités de ce concept. Malheureusement, les environnements manquent un peu de variété, se ressemblant tous, et on a une impression de vide en se promenant dans les diverses salles. Néanmoins, cette impression de vide contribue à l’ambiance oppressante liée à l’isolation de la base et le manque d’éthique ainsi que de sécurité dans la base (les 86 précédents sujets n’ayant bien évidemment pas bien terminés, comme en témoignent les flaques de sang un peu partout dans les niveaux). De même, le peu de bruitages sonores et la musique contribuent à cette même ambiance. Si la bande-son n’est pas inoubliable, elle fait cependant très bien son travail dans le contexte du jeu et est assez agréable.
Des clones qui vous en font voir de toutes les couleurs
Venons-en au plus important pour un jeu du genre : les puzzles et les mécaniques permettant de les résoudre. Celles-ci sont introduites durant les premières salles et doivent être mises en pratique immédiatement, permettant de bien les assimiler pour les salles suivantes qui vont se montrer plus difficiles à résoudre. Des mécaniques continuent néanmoins d’être introduites durant tout le jeu, l’empêchant de se répéter et créant une variété dans les puzzles à résoudre. Ceux-ci sont plutôt intelligents et exploitent parfaitement le concept de maîtrise du temps et de clones. En effet, il vous sera impossible de résoudre les puzzles par la “force brute” comme il est possible dans certains jeux du genre, toute action devra être réfléchie, ce qui demandera souvent de tester les différentes possibilités de chaque salle puis de remonter le temps pour disposer vos clones avec un timing parfait (souvent à la seconde près). Les principaux objets avec lesquels il est possible d’interagir seront bien évidemment des boutons ou des clés permettant d’ouvrir les portes, avec des variations sur le type. Il y a ainsi des boutons où il suffit de passer une fois, d’autre où il faut rester appuyé (un clone sera souvent la meilleure solution, à l’image d’un cube à poser), d’autres en plusieurs boutons ou encore des portes munies de “champs temporels”qui ne sont pas sensibles aux modifications du temps que vous permet votre combinaison. Des jeux de lasers, miroirs, plate-formes mouvantes ou détecteurs seront aussi de la partie, permettant de varier les possibilités de puzzles.
La résolution de ceux-ci nécessite de pleinement se mettre dans l’esprit du jeu et d’assimiler son concept, aucun indice n’étant fourni sur comment résoudre les énigmes. Même après avoir passé la porte vous menant à la salle suivante, vous n’êtes jamais certain d’avoir réussi. En effet, le nombre de clones par niveau est limité, ce qui signifie que si vous usez de trop de clones pour passer une porte, vous pouvez ne pas en avoir assez pour la suivante, ce qui vous obligera donc à remonter le temps pour tout recommencer en économisant un clone. Si cela peut se révéler extrêmement frustrant (croyez-moi, j’ai recommencé trois ou quatre fois un des niveaux finaux, dont une fois après que le jeu ait planté à l’ouverture d’une porte sur laquelle j’avais passé une quinzaine de minutes), la seule résolution d’un puzzle se révèle extrêmement satisfaisante. C’est d’ailleurs la principale satisfaction que vous pouvez tirer du jeu, celui-ci enchaînant les puzzles de plus en plus difficiles avec pour seule récompense des étoiles à la fin de chaque niveau, distribuées selon le nombre de clones utilisées et la durée que vous avez remonté avant de les créer, ne débloquant pas grand chose et ne servant qu’à contenter ceux qui aiment tout compléter. De même, si les chronomètres à la fin de chaque niveau affichent souvent entre deux et quatre minutes, c’est souvent des dizaines ou vingtaines de minutes qui sont nécessaires pour prévoir et réaliser les différents parcours en réalité assez courts. Au niveau de la durée de vie, le jeu se termine en une demi-douzaine d’heures avec une assez faible replay value si ce n’est essayer d’optimiser vos solutions pour obtenir toutes les étoiles.
Tuons le caméraman !
Si les mécaniques sont très bien ficelées, en pratique c’est un peu moins efficace. Votre personnage est en effet assez lent et lourd, surtout dans les sauts qui sont assez peu précis, rendant certains passages de plate-formes assez laborieux (particulièrement quand un saut raté vous demande de tout recommencer parce que les plate-formes ne sont pas sensibles au rembobinage du temps). De plus, les collisions sont assez mal gérées et il n’est pas rare de se retrouver coincé dans une porte ou un mur, ce qui évidemment vous retardera et vous demandera de recommencer encore une fois. La caméra est sans aucun doute l’élément le plus agaçant du jeu tant elle est mal fichue, empêchant parfois de regarder à des endroits cruciaux pour la résolution du puzzle ou encore de correctement juger les distances. Elle est à elle seule le meilleur argument pour convaincre qu’une vue à la première personne aurait peut-être été préférable pour ce jeu.
Project Temporality est le plus efficace dans ce qui importe le plus : les puzzles et les mécaniques autour de ceux-ci, le rendant sans aucun doute indispensable aux plus grands fans du genre. Le fait que le jeu mette l’accent sur la réflexion et la précision plutôt que sur l’action et les réflexes comme d’autres jeux du genre est très appréciable. Cependant, ces nombreux défauts vont à l’encontre de l’efficacité des puzzles et rendent le jeu moins accessible aux joueurs pas spécialement adeptes du genre.