Marche doucement, car tu marches sur mon BloodBowl !
Qu’on soit clair avant que vous ne commenciez à lire cette fin de test : Si vous n’avez jamais joué à BloodBowl et que vous cherchez un bon jeu, arrêtez vos yeux ici et lancez-vous à corps perdu dans l’aventure. Vous ne regretterez pas votre achat c’est garanti !
D’ailleurs la plupart des tests que vous trouverez sur le net iront dans la même direction que ce que vous avez pu lire ici. Résumé en une phrase : le jeu est efficace, drôle, immersif, et doté d’une durée de vie illimitée grâce à l’online. Que demander de plus ?
Cette fin de test s’adresse uniquement aux joueurs de BloodBowl confirmés : les vrais, les vieux, les dinosaures comme moi qui ont peint leurs figurines dans les années 90, en rageant sur le prix de chaque pot de peinture. Ceux qui ont joué pendant des années sur javaBBowl et ont béni SkyWilly euh… Skijunkie pour son délicieux logiciel tout en priant de voir un jour la licence portée par un vrai studio. Ceux qui connaissent FBB, FUMBBL, ENEFEL, The NAF. Bref, ceux qui avaient déjà un paquet d’heures de BB dans les dés avant que Cyanide n’obtienne les droits.
Si vous êtes de ceux-là, alors j’ai pour vous une très mauvaise nouvelle : BloodBowl est mort, vive BloodBowl !
Ce n’est bien sûr que mon avis, mais force est de constater que ça y est, BloodBowl est également atteint par la gangrène actuelle qui ronge le monde du jeu vidéo : vouloir mettre de la facilité partout. Cela reste ici une semi-vérité, car on reste chez Cyanide, messieurs-dames, et ce studio n’a pas la réputation de conditionner ses jeux pour qu’ils rentrent dans la case « tout public ».
Vraiment, mon cœur saigne de devoir faire une analyse aussi négative d’un jeu venant de ce studio magique. Et peut-être que je me trompe, mais mon ressenti en découvrant le jeu, c’est l’impression d’avoir vu des esprits créatifs restreints par un cahier des charges stupide.
Il ne s’agit que d’un test de jeu vidéo, aussi GameWorkshop me pardonnera mon affront (encore que, faudrait qu’ils lisent ce test pour ça et ça se saurait s’ils avaient un minimum d’intérêt pour leurs clients).
BloodBowl a un tort : c’est un jeu de Stratégie. Au tour par tour en plus. Autant dire qu’il s’agit d’une espèce menacée dans le monde du jeu vidéo.
Alors oui, c’est un jeu de plateau à l’origine, oui c’est normal de jouer « chacun son tour » autour d’un plateau et de RÉFLÉCHIR à ses actions. C’est, me direz-vous, l’essence même de ce genre de jeu. Qu’il s’agisse de football fantastique ultra-violent ou d’une partie d’échecs, la mécanique est la même : sélectionner la meilleure action possible, anticiper la réaction de l’adversaire et recommencer jusqu’aux limites de notre esprit ou jusqu’à ce que la partie soit finie.
J’ai longtemps cherché la définition parfaite pour expliquer ici ce que je pensais de BB et je l’ai trouvé tout bêtement sur le wikipédia du jeu (comme quoi) :
« Blood Bowl est un jeu à information complète et imparfaite. Au moment où le coach doit effectuer une action, il dispose en effet de tous les éléments de décision de chaque joueur : toutes les informations lui sont accessibles. Cela donne un caractère complet au jeu. . Au cours de son tour de jeu, le coach ne peut pas préjuger du résultat de toutes ses actions dans la mesure où un certain facteur aléatoire existe. En effet, tous les blocages, passes, et déplacements périlleux, sont sujets à des jets de dés. »
Impossible de le dire mieux : ce qui fait pour moi le charme et la durabilité de BB est dans cette définition. Connaître tous les éléments avant d’agir, puis agir avec une part d’aléa qui va se répercuter sur votre stratégie. On touche au cœur de BB.
Fumble critique !
Alors que penser d’un jeu où il est juste impossible de cumuler visuellement l’ensemble du terrain et un distinguo clair des joueurs ? C’est comme demander à un entraineur d’une grosse équipe de foot de manager son équipe avec comme seul support visuel les caméras de télé, sans pouvoir réellement regarder le terrain.
Et sans connaître la feuille de match adverse avant d’être sur le terrain. Car oui, dans BloodBowl 2, il n’y a aucun moyen de visualiser la feuille d’équipe adverse avant d’être sur le terrain. Et encore, une fois sur le terrain, vous devrez visionner chaque carte joueur une par une, connaître les icônes puis placer votre team en fonction, le tout en moins de 2 minutes.
Impossible, également, d’anticiper le stade si vous jouez à l’extérieur. Car BB2 gère le développement des stades avec l’achat d’infrastructure qui annulent certains jets du tableau d’engagement pour les deux équipes. Utile, pourtant, de savoir que vous ne risquez aucun rocher ou invasion de terrain quand vous devez décider si oui ou non vous devez acheter un apothicaire ou plutôt un pot-de-vin.
Ajoutez à cela le fait que le jeu donne aux ligues la possibilité de changer le sacro-saint tour de 4min en disons…2min comme c’est actuellement le cas sur la seule ligue online avec assez de monde pour un vrai turn over au niveau des adversaires et on en vient vite à s’arracher les cheveux.
Dans BB2, on n’a JAMAIS accès à l’ensemble des informations avant d’établir sa stratégie, et on manque de temps pour les rechercher manuellement.
I’m an onlinesome player, with a long long way to fun !
J’ai joué plus de 60 matchs pour réaliser ce test. Peut-être que je n’ai pas eu de chance, mais j’ai croisé toutes les races qui cognent (surtout des orcs et des chaos, soyons clairs) et aucune équipe de passe. Pas d’elfes dans BB2, car c’est vraiment pénible de juger d’un placement d’équipe sans s’énerver devant son écran. Les skavens sont la seule exception, surement dû au fait qu’ils COURENT, et qu’ils ont accès aux mutations.
Quant aux ligues, elles sont là, mais elles sont les seules. Plus de chat, plus de liste de coach connectés, juste la ligue et sa recherche d’adversaire aléatoire. Et purement aléatoire. Ainsi vous pourrez voir votre jeune équipe d’elfe TR 1000 tomber pour son premier match contre une team de Chaos TR 1600. Et vous aurez beau avoir 600 000 Po à dépenser, on sait tous que ça ne compensera jamais un guerrier du chaos avec 5 en force, un homme bête avec deux têtes ou un minotaure griffu.
Bref, en jouant à ce jeu, je me heurte aux limites du gameplay avant de me heurter aux limites de mon esprit et de ma stratégie. On me FORCE à intégrer une part de hasard dans mon jeu, et je ne parle pas des dés. J’ai l’impression d’avoir passé des années à peaufiner mon niveau de BB pour qu’on me prive ensuite de tous les outils matériels pour l’exploiter. La licence BloodBowl a tué javaBBowl, et BB2 va tuer BloodBowl.
Du moins celui du jeu de plateau restera un excellent jeu de football fantastique ultra-violent, acide, drôle, immersif et bien conçu. BloodBowl est mort, vive BloodBowl !
La pomme est trop grosse pour l’elfe !
Jamais je n’ai vu un second opus de licence s’auto-écarteler autant : d’un côté, on améliore le jeu au niveau de l’ambiance, du style, du look, de l’humour et du fun, et pour moi, je vois dans ces améliorations l’esprit Cyanide commun à tous leurs jeux. De l’autre côté, on retire tout un tas de fonctionnalités qui existaient pour ramener le joueur vers une dynamique pro-mercantile.
Argumenter sur l’idée que les joueurs ne jouent pas toutes les races et donc que les proposer à l’achat unitaire est une façon de faire des économies, c’est tellement estampillé GameWorkshop que ça me fait mourir de rire.
Et si je devais parier sérieusement, je pense que le prix de chaque DLC de race sera au alentour de 8-9€ (pour les vrais gamblers, disons 8.99€) par race au lancement, pour descendre par la suite autour des 5€ (4.99€) avec l’apparition de « packages ». Si j’ai raison, un joueur voulant jouer l’ensemble des races de BB sortira un peu moins de 200€ de son porte-monnaie pour tout obtenir sans viser les promotions. J’espère me tromper, mais je crains que non, quand on voit que le prix de BB2 est de 44.90€ à la sortie pour un jeu qui au final, perd autant qu’il a gagné par rapport à BB1.
Je finirai ce test en faisant un dernier pari : celui que mon analyse du cahier des charges et des contraintes imposées au studio soit juste. Si ce n’est pas le cas, je crains de devoir revoir mon opinion sur Cyanide et cela m’attristerait beaucoup. Mais si j’ai raison, je voudrais leur adresser toute ma sympathie.
L’impression que m’a fait ce jeu, c’est d’arriver APRÈS que le jugement de Salomon soit rendu, et de voir Mère Workshop sourire en tenant son demi-bébé et mère Cyanide pleurer en faisant de même.
Désolé, me concernant, ce jeu ira rejoindre le cimetière steam. J’entame dès cet instant mon deuil de BloodBowl et des 20 années de bons et loyaux services que le jeu m’a rendu.
Ok, là je dis respect pour le double test!
Merci beaucoup ^^
Hahaha, tant de larmes de tristesse dans le Dark Side de ce test 😀