L’Early Access est dans la globalité un principe de vente qui permet clairement de proposer des jeux qui ne seront jamais finis avant qu’on ne s’en lasse même en version Alpha ou Bêta. Nombre de jeux ne seront jamais finalisés et resteront pour toujours des previews, aussi amusantes ou originales soient-elles. Pourtant, quelquefois, un Early Access se bat seul contre tous pour sortir en une version finale qui mérite cette appellation.
N’oubliez pas de mouiller l’éponge !
Prison Architect est un jeu de… Construction de prison. Incroyable, quelle compréhension de l’anglais ! C’est surtout le nouveau jeu d’introversion Software, l’un des premiers studios indépendants et populaires de la fin des années 2000. Ce sont les développeurs de jeux aussi originaux que Darwinia, Defcon ou encore Multiwinia. Pour leur tout premier projet en Early Access, les petits gars d’Introversion Software n’ont rien changé à leurs habitudes et ont pris le pari risqué de proposer un jeu aux visuels simples mais à l’interface claire et complète pour mettre en avant une certaine liberté pour le joueur. Ici, il s’agira donc de gérer votre prison de A à Z, sans limites ou presque.
On se rappelle très bien des premières versions de Prison Architect : beaucoup de bugs, des ambitions pas encore ajoutées au jeu, des personnages qui ne bougent pas de leur zone, des actions qui ne se font pas et une tonne de bugs divers et variés, gravissimes ou non. Voilà un jeu qui sera resté trois ans en Early Access, mais pour la bonne cause ! Cet Accès Anticipé aura servi de gigantesque playtest pour mettre à jour, peaufiner, améliorer tous les petits détails de gameplay que propose Prison Architect. Résultat ? Voici un jeu assez exemplaire en terme de contenu, de durée de vie et de complexité pourtant facilement accessible à tous.
La base est toute simple : entièrement en 2D, dessiné pratiquement à la main avec des petits bonshommes aux formes simples (deux formes géométriques collées l’une avec l’autre suffisent à distinguer un personnage d’un autre), Prison Architect vous propose de construire votre prison en tentant d’être le plus réaliste possible. On doit construire son générateur d’électricité ainsi que sa pompe à eau, puis revenir à la surface pour commencer à réaliser quelques bâtiments importants : les cellules avec leurs lits et leurs toilettes obligatoires, mais aussi une cour pour voir se défouler vos détenus, une salle de repos pour vos agents, le bureau du directeur, l’infirmerie… De nombreuses salles sont au rendez-vous, les développeurs ont réellement pensé à tout !
Jusqu’où s’arrêtera la gestion ?
Prison Architect n’est pas avare en gestion, c’est rien de le dire. Vous contrôlerez la vie de vos détenus jusqu’aux programmes de réinsertion, que vous devrez placer dans des créneaux libres dans « l’emploi du temps » de ceux-ci. Tout est absolument pensé comme la gestion financière du bâtiment et de vos employés, les risques d’émeutes, la venue des pompiers ou de la garde nationale en cas de danger imminent, le contrôle des caméras de sécurité… Vous devrez donner un travail à vos détenus, effectuer des fouilles dans leurs cellules à la recherche de drogues et d’armes de fortune, bref… Prison Architect est on ne peut plus complet, à tel point que s’en est vite effrayant !
Les développeurs s’en sont donnés à cœur joie et on sent qu’ils n’ont jamais réussi à s’arrêter lorsqu’ils ont eu une nouvelle bonne idée. Pas la peine d’attendre, c’est à cela que sert l’Early Access ! À tester des choses ! Résultat, tout ce qui a fonctionné avec les « bêta-testeurs » ayant acheté le jeu avant la sortie finale est resté, puis s’est largement peaufiné. D’où le contenu colossal et le nombre de possibilités de jeu importantes.
On remarque encore quelques bugs : un mur qui ne se construit pas bien à cause d’un pathfinding qui ne comprend plus rien, des personnages trop nombreux derrière une porte et qui en bloquent du coup l’accès… Tout ceci est encore présent, vite réglable et surtout, cela n’est en rien comparable au marasme de bugs présents tout au long de la phase d’Accès Anticipé. Sur ce point, c’est le jour et la nuit même si des patchs continueront à corriger les derniers problèmes récalcitrants.
De contenu à perpétuité !
Avant de vous lancer en mode Libre, comme ce qui vous est décrit dans les paragraphes précédents, vous feriez mieux de vous intéresser à la Campagne de 5 niveaux qui est proposée au lancement du jeu. Scénarisée, cette campagne raconte la vie de délinquants ayant trouvé le chemin vers votre prison et y semant le trouble par la même occasion. Ce sera une belle excuse pour les développeurs, puisque cette campagne, mine de rien bien conçue et intéressante même scénaristiquement, vient surtout servir de gigantesque tutoriel absolument pas contraignant. Les cinq niveaux proposés sont basés chacun sur un point important de la gestion du jeu et quiconque finira l’histoire aura vu au moins 80% de ce que propose Prison Architect en terme d’idées de gameplay et de possibilités.
À côté de cela, on a surtout le soutien de Steam Workshop pour permettre de partager ses propres créations de prison. Les amateurs de La Grande Évasion, de OZ et même de Prison Break y trouveront des défis retors basés sur de célèbres lieux d’incarcération réels ou de fiction. C’est aussi dans ce Steam Workshop que les joueurs subliment les idées du jeu de base avec des défis auxquels même les développeurs n’auraient pas pensé. Comme d’habitude, donnez les outils à votre communauté et ils vous proposeront des choses tout simplement hallucinantes d’imagination.
Enfin il est à noter la présence d’un mode qui change du tout au tout, qui tranche avec le gameplay de base : l’Évasion. Vous pouvez jouer un personnage en particulier, fraîchement incarcéré. Après une courte scène d’introduction concernant votre arrivée au centre pénitentiaire, vous devrez l’étudier et bien vous comporter pour y trouver les failles et tenter une évasion. Passionnant, ce mode manque encore un peu de souplesse mais fait plaisir à voir ! Une belle idée, un peu folle mais qui fonctionne.
Complexe à dominer mais simple à prendre en main…
Clairement la grande qualité de Prison Architect c’est son interface très claire qui contribue à ce qu’on ne se sente jamais perdu. Il y a beaucoup d’écrans différents mais le tout est bien regroupé afin de rendre la gestion de nos prisons simple d’accès, à défaut d’être simple tout court. Prison Architect est un jeu pour tous les niveaux de difficulté : il suffit juste de savoir être patient, de bien traverser la campagne d’un bout à l’autre (ce qui ne demande qu’une petite demi-dizaine d’heures, même pas) et de faire confiance aux développeurs. Si vous voulez effectuer une action, ils y ont sûrement déjà pensé et un menu sera bientôt à l’écran pour vous expliquer comment faire cela. C’est assez admirable.
Vous l’aurez compris, malgré une esthétique un peu repoussante aux premiers abords et quelques bugs qui traînent encore dans un code complexe et riche en bonnes idées, Prison Architect est surement le « Tycoon », le jeu de gestion le plus malin et généreux de ces dix dernières années. Un titre qui a tout compris au principe de l’Early Access et qui s’en est servi pour se peaufiner au point de frôler la perfection. Bravo Introversion !