La frontière entre le jeu vidéo et le cinéma est de plus en plus mince, de plus en plus complexe à définir. Alors que Telltale propose un gameplay à base de QTE, que Life is Strange place tout dans la mise en scène et ses personnages, après qu’Heavy Rain ait ouvert la voie, voilà que Quantum Break se propose de revenir à certaines idées des années 90 et des vidéos en FMV : le mélange de jeu et de prises de vue réelles. Mais c’est encore plus malin que ça…
Et c’est le temps qui court !
Jack Joyce (Shawn Ashmore) est le petit frère de William Joyce (Dominic Monaghan), un brillant physicien. Il est aussi et surtout l’ami de Paul Serene (Aidan Gillen), un autre génie qui l’invite à l’université de Riverport pour découvrir sa nouvelle invention. C’est ainsi que commence ce jeu à base de sauts dans le temps et de contrôle temporel. Car évidemment, tout va mal tourner et notre héros va se retrouver affublé de pouvoirs vertigineux lui permettant de stopper et manipuler le temps. Rapidement, il est alors poursuivi par les soldats de l’entreprise Monarch… fondée par Paul Serene ?
Quantum Break est un mélange de recettes particulièrement étonnant à découvrir. Chacun des cinq actes et divisé en plusieurs parties très distinctes mais la plupart du temps, vous serez à la troisième personne comme dans tous les jeux de Remedy (Max Payne, Alan Wake). Vous aurez le droit de parcourir des environnements et de contrôler le temps pour déverrouiller des passages, découvrir des moments du passé (comme des discussions), collectionner tout un tas d’archives utiles à une compréhension plus large du scénario… mais il y a aussi ces éclats du passé que vous devrez collecter, pour améliorer vos pouvoirs.
Ces pouvoirs sont particulièrement intéressants. Ils vous permettent d’esquiver en vous téléportant à une petite distance tout en fonçant sur les ennemis si vous visez correctement. Il y a aussi cette déflagration explosant tout sur son passage dans une boule temporelle qui ne fait pas de cadeau. Puis un bouclier, véritable champ de force régénérant votre santé et empêchant les balles ennemies de vous atteindre. Vous pourrez aussi stopper le temps dans une bulle, puis cartonner un ennemi de balles pour les voir toutes atteindre leur but d’un seul coup une fois la bulle disparue. Ces pouvoirs sont au cœur d’un jeu de tir dynamique ou, pour malheureusement contrebalancer, il n’est pas possible de frapper ses ennemis au corps à corps et où les couvertures sont automatiques.
Précédemment, dans Quantum Break…
Ce qui étonne dès le lancement du jeu, c’est son esthétique. En plus de proposer une ambiance magnifique faite d’arrêts temporels, d’éclats, de déformation constante de l’environnement, le jeu met en avant des personnages extrêmement réalistes. Les visages sont expressifs comme jamais, même si l’Uncanny Valley est proche et que parfois, on a cette sensation de malaise face à quelques effets réalistes surprenants. Visuellement, le jeu est une réussite technique évidente mais il manque peut-être un peu d’âme par certains moments très froids et via les quelques répétitions d’environnements que propose le scénario.
Son gameplay enchaîne les gunfights en arènes et rapidement, ces moments se suivent et se ressemblent. On passera son temps à se planquer, à régénérer nos pouvoirs, pour lancer une déflagration, contourner un ennemi possédant un bouclier pour lui exploser son réacteur dorsal, etc. On fait absolument toujours les mêmes gestes, on utilise les mêmes stratégies d’un gunfight à l’autre et on ne retrouve absolument pas les sensations inoubliables que procuraient un Max Payne. La baston n’est là que pour plaire aux plus bourrins, ce que veut mettre en avant Remedy c’est un scénario.
Une fois les passages en troisième personne terminés, ce qui représente environ 80% de chaque Acte, vous aurez le droit de conclure votre « épisode » avec deux autres types d’expériences. La première vous demande de jouer le grand méchant du jeu et de faire un choix qui changera quelques bribes de scénario (et ce n’est pas mensonger, même si la fin reste la même), façon « Life is Strange ». Ensuite, le jeu vous propose de conclure l’acte avec un épisode de série, d’environ 22 minutes, avec les vrais acteurs et une réalisation à la « 24 ».
Cette série possède d’excellents acteurs et se concentre sur les « méchants » plutôt que sur le héros. Les liens avec le jeu sont très intéressants, le scénario y est parfaitement approfondi et on prend réellement plaisir à regarder ces épisodes. Malgré cela, on retiendra quand même une réalisation réellement décevante avec des moments un peu « cheap », beaucoup d’ascenseurs inutiles, des bastons pas toujours bien filmées et un manque évident de conclusion. La série sert le jeu, mais aurait pu être bien meilleure avec quelqu’un sachant manier la caméra autrement qu’en la posant sur place en attendant de voir ce qui se passe.
Ce mélange des trois idées scénaristiques (Les phases en TPS, le moment de choix du méchant puis l’épisode de série en prise de vues réelles) est vraiment novateur, fonctionne très bien, mais oblige à une structure de jeu extrêmement répétitive. Chaque acte est construit de la même façon et tout cela casse beaucoup d’effets de surprise, sans parler du rythme qui devient très redondant.
Le futur c’est maintenant ?
Pas très long (comptez une dizaine d’heures grand maximum), Quantum Break souffre surtout d’un manque violent de difficulté. Dès le début du jeu, on vous conseille d’augmenter le niveau afin de vous voir proposer des affrontements plus intéressants. Même l’exploration souffre d’un manque violent de difficulté puisque à l’aide de cette désormais incontournable vue grisâtre qui colore tout ce qui est ennemi, objet à collecter et objectifs, vous ne vous perdrez jamais. J’ai moi-même collecté 80% des objets du jeu (et ils sont nombreux) en une seule partie, tant cette vue facilite largement la tâche. Cette vue « magique », c’est le cancer du jeu moderne où tout est prêt à être cueilli par le joueur sans aucun effort de sa part. Dommage.
Comme toujours avec Remedy et ce malgré un gameplay perfectible et un rythme extrêmement répétitif, le scénario et ses personnages crèvent l’écran et nous donnent envie d’en savoir toujours plus. Quantum Break propose un scénario tout de même bien plus commun que ce que mettait en avant Max Payne et surtout Alan Wake, mais il ne manque pas de moments passionnants. La fusion entre jeu et cinéma est assez réussie et l’expérience se parcoure très agréablement. Dommage que les environnements se répètent énormément et surtout, que pas mal de bugs de déplacements et collisions viennent gâcher certains moments épiques.
Quantum Break peine à proposer des affrontements originaux et se concentre exclusivement sur son scénario. Les amateurs de science-fiction réaliste seront aux anges, surtout que la mise en scène du jeu et le réalisme des personnages rendent le tout réellement passionnant. Dommage toutefois que chaque acte du jeu soit construit de la même façon rendant le tout un peu trop évident. Aussi, si les épisodes en prises de vue réelles sont une très bonne idée, il aurait tout de même fallut engager quelqu’un sachant se servir d’une caméra. Le jeu de Remedy est, comme tous les jeux du développeur, une expérience scénaristique réellement intéressante. Néanmoins, niveau gameplay, il reste bien moins maitrisé qu’Alan Wake, qui l’était lui-même déjà moins que Max Payne 2.
En lisant l’article je me demande si finalement Singularity ne serait pas ce qui se fait de mieux en terme de manipulation du temps et de l’espace. Dans Quantum Break ça a l’air visuellement impressionnant, mais en terme de manipulation, j’ai l’impression d’avoir déjà tout vu dans Singularity, qui en plus jouissait d’une histoire assez géniale. Avec de mémoire 3 fins totalement différentes.
La conclusion par rapport au manque de maîtrise du gameplay me semble plus qu’évidente, au vu de ce qui est expliqué dans l’article. Si les 80% du temps sont consacrés à des gunfights au cours desquelles les pouvoirs « temporels » ne servent finalement qu’à effectuer des actions ultra-classiques, c’est même plus que du manque de maîtrise…
Je ne suis pas non plus super convaincu par l’épisode de 20 minutes à la fin de chaque acte. Comme tu le dis, ça me semble être une grosse restriction en termes de rythme de jeu. Être coupé en pleine partie par une « cinématique » aussi longue, déjà, ça sent le mauvais plan. Ensuite, se « contenter » de montrer des séquences où visiblement il y a de l’action qui se passe, et des choses qui se déroulent me parait même complètement crétin dans un jeu vidéo… D’autant plus lorsque ces séquences permettent de côtoyer les « méchants », et auraient donc permis de varier les expériences de jeu et les points de vue.
Après tant de délai supplémentaire, je dois bien dire que c’est un peu la déception de voir qu’on semble se taper au final un gameplay déjà-vu et revu et une mini-série cheap.
Ce qui est étonnant aussi, c’est la Hype. Ayant trop attendu Alan Wake, j’ai volontairement esquivé toutes les infos concernant ce jeu au point de ne pas savoir qu’il sortait ce mois-ci il y a encore deux mois 🙂 Du coup bah… j’ai quand même apprécié. Mais c’est tellement pas le jeu de l’année.
Il semblerait que sous couvert de « première » pour un tel tout-en-un, on se retrouve face à un jeu moyen accolé à une série juste correcte. Bref un jeu qui semble réaliser l’exploit de plus s’adresser à un public habitué à être spectateur que joueur, même s’il faudra un minimum aimer le mélange des genre. Bancale.
Une première tentative de la part de Remedy de toucher un public « large » qui ne m’éffleure absolument pas en tout cas.
Je pense aussi que Remedy se tue à essayer de plaire au grand public alors qu’ils n’ont jamais eu autant de génie que lorsqu’ils étaient libres.