La genèse de Homefront : The Revolution fut parsemée d’obstacles qui entravèrent le développement d’un jeu pour lequel il y avait peu d’attente, si ce n’est de la curiosité. Néanmoins, avec le CryEngine et un studio ayant œuvré il y a longtemps sur les désormais cultes Timesplitters, nous pouvions garder le mince espoir d’être agréablement surpris. Le destin étant souvent sournois, il n’en sera malheureusement pas le cas.
Un hoquet persistant
Mes premiers pas dans cette guérilla urbaine ne m’auront pourtant pas fait perdre totalement l’espoir de m’y amuser. A défaut de révolutionner son monde, ce nouvel Homefront aurait pu à minima se révéler suffisamment divertissant pour justifier sa raison d’être.
Sauf que nous ne vivons pas dans un monde idyllique et que très vite, cette expérience tournera au cauchemar. Il est vrai que techniquement et artistiquement parlant, j’en attendais plus du CryEngine. Un moteur aussi capable aurait du nous offrir bien plus à tous les niveaux que ce qui s’affiche à l’écran, surtout venant d’un projet conçu sous l’égide d’un studio anciennement connu comme étant Crytek UK.
Il y a pourtant de-ci de-là quelques morceaux qui témoignent d’un jeu qui aurait pu s’avérer vraiment magnifique par moment. Mais devant le manque d’âme que dégagent ses décors, le vide de certains endroits ainsi que sa finition moyenne générale témoignent d’un jeu rafistolé qui du coup manque de cohérence esthétique sans qu’arrive à transparaître une quelconque identité visuelle suffisamment forte pour nous marquer.
Les environnements que nous traversons restent tristement fades et ternes ne participant que très peu à la création d’une atmosphère propice à l’immersion du joueur. Mais son plus gros problème restera son effroyable optimisation. Même en baissant les options graphiques, le framerate toussote régulièrement nous faisant souffrir d’un stutter indigent et de freezes intempestifs. Cette accumulation de désidératas techniques ne joue très certainement pas en sa faveur, en nous laissant dans la bouche un goût amer. Sur consoles, le problème semble le même d’après les premiers retours.
Une révolution enrhumée
Il ne reste donc plus à Homefront : The Revolution qu’à nous convaincre sur le cœur de son gameplay qui consiste à tirer sur tout ce qui bouge. Las, malgré la possibilité supposée de pouvoir se la donner en mode furtivité, l’intelligence artificielle très aléatoire associée à l’absence d’outils réellement orientés dans cette direction nous empêchent d’être discret. Surtout quand on se rend compte assez vite que la seule arme disposant d’un silencieux reste le flingue de base en mode Uzi du pauvre.
Il ne lui reste alors résolument plus qu’à essayer de nous convaincre de son intérêt sur les échanges de plomb par armes à feu interposées. Mais là encore, il devient difficile d’y trouver son compte. Bien que nous soyons limités au port de trois armes uniquement, obligeant à faire des choix, la possibilité de pouvoir les convertir dans un mode de fonctionnement différent étend notre armement de façon exponentielle.
Ainsi, un fusil d’assaut peut très bien devenir un fusil de précision comme un lance-grenade. Si l’idée est en soit intéressante, dans la pratique, la conversion d’une arme, bien que ne prenant que quelques secondes, reste beaucoup trop lente quand on se retrouve en plein milieu de l’action. C’est alors que bien souvent on se limite à n’utiliser que les modes qui nous satisfassent le plus, plutôt que de s’essayer à de nouveaux horizons meurtriers.
Le combat armé finit dès lors par devenir fastidieux à la longue plutôt que satisfaisant ou jouissif. La mise à rude épreuve de nos sens et nos réflexes ne sera donc pas véritablement faite, surtout que l’on pestera régulièrement sur une intelligence de l’ennemi au ras des pâquerettes à un moment, ou complètement omnisciente à un autre en nous voyant à travers les murs. Derrière cette absurdité se trouve un jeu qui aurait pu se suffire à un certain classicisme de son action si, et seulement si, il avait daigné être mieux fini.
La moralité pour les nuls
Quoiqu’il en soit, le scénario ne rattrapera malheureusement pas grand chose. Symptomatique d’un titre ayant eu une gestation longue et douloureuse, il sent également le rafistolage malgré quelques tentatives malheureuses de lui insuffler un semblant de moralité en y confrontant plusieurs voix différentes sur le conflit, entre d’un côté les partisans de retrouver la liberté par le sang, tandis que d’autres s’élèveront pour promouvoir le dialogue. En fait pour ce dernier, seul le doc de la résistance aura ce discours de paix.
Il aurait pu être intéressant de poser des interrogations justes sur les actions de la résistance comme sur celle de son ennemi. Il aurait aussi été intéressant que le scénario s’interroge un peu plus sur le sort des nord-coréens qui sont aussi majoritairement victimes de leur gouvernement despotique. Seulement voilà, ce ne sera jamais vraiment le cas. Ou alors seulement en surface.
Il faut dire que l’on y dirige un gars lambda qui tel un Gordon Freeman, jamais mot ne dira. L’implication du joueur se limite au massacre en masse de l’adversaire coréen et le remplissage d’objectifs sans conséquence réelle pour lui. Malgré un monde semi-ouvert, le jeu est extrêmement linéaire dans son fonctionnement et jamais ne propose d’alternative à certaines situations. Si son récit pouvait s’y prêter, aucun choix moraux, voire choix tout court, ne sera fait de notre part. Nous n’y sommes que le spectateur impassible d’un triste show qui ne sait jamais vraiment où il veut aller.
Homefront : The Revolution aurait peu se contenter de n’être qu’un FarCry bis – dont il reprend beaucoup – sans rien bouleverser et en se contentant d’être amusant. Il est malheureusement entaché par une optimisation exécrable qui le rend très désagréable à jouer, sans pour autant être un étalon de l’esthétique. Il a très clairement souffert d’un développement chaotique qui ne lui aura pas permis de devenir quelque chose de plus abouti. Quand bien même ses aléas techniques seraient corrigés par des mises à jour, il resterait un fps générique et répétitif comme beaucoup d’autres en laissant la triste impression qu’il aurait pu être tellement plus.