La plupart la connaissent sous le nom de Katsudon sur la chaîne Nolife. Elle y officie en tant que réalisatrice et monteuse, mais aussi animatrice dès que possible. Anne Ferrero de son vrai nom est un talent de derrière la caméra avant tout et tente de mettre tout ce qu’elle sait au service d’un documentaire qui lui tient à cœur : Branching Paths nous raconte le jeu indépendant au Japon…
Il était une fois au Japon
Tout commence en 2013 quand le Tokyo Game Show, la grand-messe japonaise du jeu vidéo, accueille les jeux indépendants et crée tout un hall dédié. C’est la première fois dans l’histoire de l’événement et ce ne sera pas la dernière. Mais alors, il n’y avait pas de jeux indépendants japonais avant 2013 ? C’est ce que tente de nous expliquer le début de ce documentaire passionnant qui ne lésine pas en guest-stars, créateurs, japonais ou non d’ailleurs, installés dans ce pays si étonnant pour nous européens.
Le premier acteur de ce documentaire, c’est le Japon. Tokyo, Kyoto, les petites ruelles typiques, les gratte-ciels à perte de vue, la foule, les gens, le métro. Tout est porté par les musiques bien choisies de Low High Who, qui ne manquent pas de donner du charme à ces cartes postales qui donnent l’envie folle de partir à l’aventure. C’est dans ces moments de transition, mettant en avant ce qu’est le Japon dans sa forme la plus visuelle, que la bande-son est à sa plus belle place.
C’est l’occasion alors de découvrir la différence (ou non) entre le jeu indépendant et le dōjin. Derrière ce nom barbare, comme dirait un journaliste de France 2, se cache une pratique finalement pas si éloignée de ce qui se fait dans le monde indé. C’est amateur, c’est passionné et le but est surtout de mettre en avant son talent, de bosser seul ou en équipe… Alors que le jeu indépendant n’est pas si populaire, le dōjin l’est complètement. Et si tout était lié ? Ce documentaire demande à ses acteurs de choix, développeurs, producteurs, organisateurs, de répondre à cette question et bien d’autres encore.
Indépendants sans frontières
Rapidement, on suit les petits évènements « découvertes » de projets indépendants dans des bars au petit public et à la présentation Powerpoint/vidéo-projecteur très basique. C’est là que tout commence, pour un jeune talent comme Ojiro Fumoto qui en est au balbutiement d’un petit jeu nommé… Downwell. Quiconque a vécu l’actualité du jeu indépendant de ces deux dernières années sait à quel point ce titre marquera les esprits à sa sortie.
Plusieurs autres talents sont de la partie allant des bons samaritains de Playism (distribuant des jeux indépendants Japonais dans le reste du monde) à Lucas Pope, le papa de Papers, Please qui vit actuellement au Japon. On découvre aussi les développeurs de chez 17-bit. Keiji Inafune aussi, dont le discours résonne encore davantage aujourd’hui alors que son jeu « indépendant » est sorti (Mighty No.9) avec toutes les critiques que l’on connait. Clairement, le « casting » est passionnant et ne demande même pas de s’y connaitre particulièrement : au contraire, ceux qui connaissent le milieu par cœur s’y retrouverons, pendant que les novices apprendront à découvrir ces créateurs tous très différents dans leurs façons d’être, de procéder, mais pas forcément dans leurs ambitions.
Bien sûr qu’il y a un milieu du jeu vidéo indépendant au Japon et bien sûr qu’il est fort, intéressant, passionnant à suivre et important à ne pas oublier. Mais il fallait au moins ce documentaire pour le mettre légitimement en avant et de la façon la plus humaine, la moins forcée possible. C’est la grande force de Branching Paths : il est d’une humanité telle qu’on en oublierait presque le sujet au final, ne se concentrant que sur ces indépendants trop peu mis en avant et qui méritent pourtant toute l’attention du monde. Le jeu vidéo au Japon n’est pas mort : il a juste changé, il se trouve autre part et le nombre de salons et rencontres annexes sont la preuve qu’il s’y passe quelque chose d’artistiquement puissant.
La musique pêche un peu dans son montage lors des discussions avec les développeurs. Le montage, toujours lui, se concentre furieusement sur certains salons pendant qu’il en survole d’autres, en fonction de ce qu’il faut raconter. Les dialogues sont parfois en anglais, en japonais, parfois en français, en québécois. Parfois sous-titrés, parfois non. C’est voyant, c’est gênant quand on fait le bilan. Mais voilà… on a vécu 1h30 au Japon avec de belles images, un propos intelligent, une découverte de créateurs uniques, une réalisatrice au point de vue passionnant et la confirmation que des liens très forts sont présents entre toutes les scènes indépendantes du monde. On en sort rassuré : le Japon est toujours un vivier incroyable de talents, il est peut-être seulement différemment construit et localisé. Il suffirait juste désormais que ceux qui parlent de jeu vidéo n’oublient pas de le mentionner. De s’y intéresser. Voir même, soyons fous… De le soutenir ?