Silence – The Whispered World II

Difficile de détourner le regard devant le sublime des graphismes de Silence, suite directe de The Whispered World. Tout autant point and click que son aîné, il nous fera y replonger pour une nouvelle aventure paraphrasant les chroniques de Sadwick du premier épisode. Pour ceux n’ayant jamais goûté à ses péripéties seront sans doute heureux d’apprendre qu’ils sont les bienvenus, cet épisode se voulant ouvert à un public plus large et sans connaissances de ses antécédents.


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Le silence est d’or

Il n’y a de toute façon pas de quoi s’alarmer si on n’y connaît rien. De façon habile, Silence nous conte les exploits de Sadwick au travers d’un moment récréatif entre nos deux nouveaux héros, Noah et sa petite sœur Renie, peinée par leur situation précaire. Car aussi festif qu’il puisse tenter d’être, Noah ne peut empêcher la réalité d’exister, surtout quand celle-ci se confond dans le vrombissement des moteurs de bombardiers, annonciateurs de la guerre, annonciateurs de mort.

Derrière le mélodrame va démarrer une nouvelle histoire. Celle d’un grand frère parti à la recherche de sa petite sœur disparue dans les méandres de Silence, un monde onirique en proie au conflit entre une fausse Reine et une rébellion. Pour cela, il sera aidé de Spot, une chenille capable de changer de forme, déjà présente aux côtés de Sadwick dans The Whispered World. Si l’on a connu ce dernier, c’est en terrain connu que l’on marchera. En partie. Si d’anciennes connaissances y feront acte de présence, d’autres têtes se joindront à nos jeunes aventuriers de l’inconnu.

Il est difficile de ne pas être émerveillé dès les premiers instants par la technique quasi irréprochable qu’il affiche. Il faudrait être aveugle pour qu’il en soit autrement. Le point vendeur de Silence est sans conteste sa 3D sur laquelle est projetée une texture aux allures de peinture de très grande classe. Cela donne des décors finement détaillés qui justifieraient presque à eux seuls de se jeter sur lui. Les personnages ne sont pas en reste en affichant des couleurs et une expressivité bienvenue.

Même si l’on regrettera quand même un peu l’abandon de la deuxième dimension aux allures d’un film d’animation qu’aurait pu signer Don Bluth, la 3D permet dans ce cas d’exploiter des mouvements de caméra autrement impossible avec l’ancienne méthode si ce n’est au coût d’un lourd travail d’animation traditionnelle. Un choix réaliste face aux besoins de l’époque qui ne s’est cependant pas fait, comme nous avons pu le voir, au détriment d’une véritable réussite esthétique. Si ce n’est au détriment de temps de chargement longuets, même en passant simplement d’un tableau à l’autre.

Ce bonheur des yeux se limite malheureusement à cet aspect, le doublage anglais – également disponible en allemand, polonais et chinois – n’étant ni mauvais, ni mémorable. Il souffre d’inconstance dans le jeu de ses acteurs, avec un côté trop récité pour sonner sincère et investi dans leur rôle. Seule Renie est à part, étant visiblement interprétée par une jeune fille comme son personnage, souffrant parfois d’un manque de maîtrise. La candeur toute naturelle qui en découle, et son jeune âge, nous feront lui pardonner ses quelques erreurs de jeu.



La parole est d’argent

Silence s’éloigne de la recette du point and click classique en apportant plus d’accessibilité. De là à dire qu’il est simplifié pour les joueurs plus casuels, est un pas que j’oserai prendre. Il suit cette tendance moderne de rendre le jeu d’aventure plus narratif et moins porté sur la résolution de puzzles étonnamment complexes. Il maintient ainsi en équilibre dialogues et séquences cinématiques avec des énigmes à la difficulté particulièrement basse.

Leur réussite apporte en vérité assez peu de satisfaction sachant qu’il s’agit bien souvent d’épuiser toutes les solutions évidentes possibles pour parvenir à nos fins, en mettant de côté celle dont l’absurdité nous fera faire très légèrement du surplace. La volonté était sans doute d’éviter toute stagnation de façon à ce que l’histoire progresse de façon fluide. Pari réussi même si les joueurs confirmés resteront sur leur faim.

Il ne reste alors que l’histoire, dont l’emphase a été mise sur l’exploration des thèmes de la souffrance, la vie et la mort. Notamment dans la relation fusionnelle qu’entretiennent Noah et Renie. L’amour fraternel qui les unit est objectivement le principal intérêt de l’intrigue. En effet, malgré la présence de plusieurs personnages secondaires, nos deux comparses sont le noyau dur de Silence. Leur récit est très personnel, sachant aménager quelques jolis moments de poésie, sans pour autant tomber un peu trop dans la facilité et la naïveté.

Malheureusement, il s’agit de sa seule rédemption. Si le ton reste juste dans sa globalité, en évitant de tomber dans un pathos exagéré, de subtils non-dits viendront à la fois titiller notre curiosité tout en nous révélant au terme du jeu les faiblesses d’un scénario qui n’a pas eu le respect de développer suffisamment les dits personnages secondaires, en ne faisant qu’effleurer leurs intentions sans jamais vraiment explorer en profondeur leurs motivations réelles.

Ils apparaissent en définitive comme les pions d’un échiquier qui ne les prend pas vraiment en compte autre que comme un sacrifice utile à la progression de Renie et Noah dans leur propre histoire. Il en résulte des passages assez creux qui font plus du remplissage qu’à justifier leur présence. Silence n’est ni mauvais, ni excellent. Il est correct. Sa petite entreprise a des bons côtés. D’autres qui laissent un peu à désirer.


Silence – The Whispered World II est un jeu d’aventure vraiment magnifique malgré son doublage très quelconque. Sa touche sensible doit énormément à son héroïne Renie, pour laquelle on ressent beaucoup de compassion. Cela ne suffit pourtant pas à écarter le fait que son scénario souffre de personnages secondaires trop peu développés et d’une intrigue comme un reflet dans le miroir avec le premier volet, donc potentiellement prévisible pour les connaisseurs. Ses énigmes sont trop faciles et ne conviendront qu’aux débutants. C’est un jeu à l’esthétique assurément pleine de majesté, et avec ce qu’il compte de moments emplis d’émotions, mais certainement pas un incontournable en raison de ses carences.

3 réflexions au sujet de “Silence – The Whispered World II”

  1. Le travail technique justifie à lui seul le prix je pense. Daedalic a vraiment fourni un gros boulot là dessus. Seul le doublage pêche un peu. Et puis surtout, le scenario qui n’est pas des plus intéressants par moment. Pourtant je l’ai terminé en 6 heures environ. J’ai trouvé, malgré ses imperfections, le dernier Deponia bien plus pertinent et réussi par exemple.

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