Troisième saison, cinquième jeu The Walking Dead chez Telltale, A New Frontier nous propose de tout nouveaux protagonistes pour une survie en milieu zombie toujours aussi humaine et poignante. Enfin ça, c’est l’idée qui nous est proposée par les développeurs avides de prouver que non, promis, ils ne tournent pas en rond. Après des épisodes « Michonne » très inégaux, une série Batman qui ne fait pas l’unanimité, voilà donc que cette Saison 3 passe à la case de la Critique.
- Ce test sera mis à jour à chaque sortie d’un nouvel épisode.
Episode 1 : Les liens qui nous unissent (1ère partie)
Javier est en retard : son père est mort et il n’a pas été à son chevet pour son dernier souffle. C’est en pleine tension familiale dramatique que s’ouvre ce premier épisode qui, pour nous présenter le nouveau protagoniste principal de cette saison, commence par nous en afficher ses faiblesses humaines. L’introduction en fait des tonnes : réalisation en fondus, triste musique, jusqu’à nous proposer un bond vers le futur. Javier parcourt la route à bord de son Van, avec ce qu’il reste de sa famille : son prochain objectif de survie, c’est de trouver de l’essence.
Vous pensiez quitter Clementine ? Que nenni, les scénaristes de chez Telltale adorent ce personnage au moins autant que les joueurs. Seulement voilà : la qualité de la saison 2 de The Walking Dead ne fait pas oublier les critiques. Beaucoup ont reproché à la seconde saison de proposer une Clementine certes plus grande, mais dont la trame était assez cousue de fil blanc. Références trop poussées au premier épisode, volonté évidente d’en faire une guerrière, des personnages secondaires à l’écriture simpliste… Ce premier épisode de la Saison 3 efface rapidement tout cela, avec une Clementine plus grande encore, mais une Clementine qui a souffert et tirée des leçons de ses expériences passées.
Les références sont plus intelligemment placées et en fonction de la fin décidée par le joueur lors de la dernière saison, le passé de Clementine sera raconté (en rêves/souvenirs) différemment. Un bon point, qui aide surtout à faire d’une pierre deux zombies en donnant un peu de background au personnage pour tous ceux pour qui cette saison 3 sera la première.
Le récit défile, assez simple, bien construit, une introduction comme beaucoup d’autres avant elle. On est content de revoir Clementine, on appréciera (ou non) certains nouveaux personnages et là, sans crier « gâre !», c’est l’effet Telltale : rien ne va se passer comme prévu. Bouche grande ouverte, choqué par le retournement de situation habituel de fin d’épisode, on lance le second épisode (déjà disponible à la sortie) sans attendre.
Malgré des filtres visuels « bande dessinée » qui paraissent quelquefois très ridicules (les contours du nez, des joues, font du grand n’importe quoi), on entre facilement dans l’histoire. Mais rien ne viens révolutionner la formule, loin de là.
Episode 2 : Les liens qui nous unissent (2eme partie)
Revirement de situation. Alors que le premier épisode semblait écrit bien différemment des autres saisons, voici que ce second revient au pire de ce que fait Telltale en cas d’absence totale d’imagination. Situations hasardeuses, script omniscient, réactions de personnages totalement illogiques et révélations bien trop forcées mettent en avant des scènes ou nos choix ont encore moins de répercussion qu’on ne l’imagine. Des personnages apparaissent comme par enchantement pendant que les scénaristes prennent un malin plaisir à en supprimer d’autres. L’histoire doit avancer et pour cela, tant pis s’il faut faire des raccourcis.
C’est aussi l’épisode ou l’on se rend compte de plusieurs choses : tout d’abord, les animations sont vraiment datées et peinent à être appréciables. Surtout, les zombies et leur flou faisant croire à une masse de monde donne juste envie d’aller dans les réglages du jeu (sans succès) pour être sur d’avoir mis la qualité du jeu à son maximum. Mais surtout, ce sont les très rares phases de gameplay qui consternent : ce second épisode enchaîne les actions sans réel défi, se contente du minimum syndical et à vrai dire, les développeurs semblent presque gênés de devoir demander au spectateur de déplacer le personnage, de résoudre une petite phase de point & click absolument simpliste et de tirer sur des zombies avec des headshots automatiques à la clé. C’est fort dommage, mais ce n’est pas encore le pire : sans le protagoniste principal, aucun drame ne surviendrait dans ce second épisode. Et pourtant, tout se passe bien pour lui, jusqu’à ce qu’un chef de camp vienne lui dire « c’est toi le chef ». Sans même blaguer. Cet épisode est, on l’espère, loin d’être représentatif de la suite.
Le scénario continue sa progression. Davantage d’effets choquants, beaucoup moins de profondeur. Cette saison 3 est d’ores et déjà définitivement pas comme les autres. Reste encore à savoir si c’est une bonne ou une mauvaise chose…
Episode 3 : Au dessus des lois
Véritable premier épisode « nouveau » tant les deux premiers sont intimement liés, ce troisième acte est bien plus ample et prometteur que l’introduction. Faisant se croiser plusieurs personnages au même endroit (la fameuse « New Frontier »), le script de cette Saison 3 commence enfin à se dessiner et à apporter des choix amusants, de véritables raisons de s’impliquer dans certains conflits. Javier, le personnage principal, prend toujours plus d’ampleur et ce, malgré la présence de coéquipiers charismatiques que le scénario empêche toujours de prendre le dessus. C’est obligatoire, mais cela se voit beaucoup trop.
L’amour, la haine, les relations entre les personnages sont puissantes ici, mais ne virent jamais au marshmallow. Loin de là ! On a le droit à des scènes poignantes de simples discussions, avec des non-dits fabuleusement dramatiques et des choix finaux vraiment bouleversants même si évidemment artificiels (le scénario se chargera rapidement de les rendre caduques, tout au plus seront-ils l’occasion de proposer une ligne de dialogue supplémentaire à un argumentaire).
Reste ce scénario, tout de même très banal au demeurant et avançant sans vraiment tenir compte du joueur et de sa volonté de prendre son temps. De toutes les séries Telltale, il est évident que par la découverte de cette « New Frontier » cette Saison 3 est celle qui gagnerait davantage à être exploré, façon point & click à l’ancienne, plutôt qu’être survolée comme ici avec quelques dialogues et QTE. Le modèle perd de sa superbe devant de telles intentions de scénaristes gâchées par une volonté d’accessibilité à tous. Reste encore une fois le personnage de Javier, qui gagne beaucoup en sympathie. On s’y attache de plus en plus.
Cet épisode 3 est assez réussi. Proposant de réels échanges intéressants entres humains, il met très bien de côté les zombies tout en laissant ce danger planer à chaque instant. La recette fonctionne encore et Telltale le comprend toujours bien. On espère juste maintenant que le scénario qui nous est proposé ira dans la bonne direction : celle de la surprise, de l’humain, des choix intéressants et des retournements de situation plus intelligents que juste surprenants.
Episode 4 : Thicker Than Water
Nous assistons donc à l’épisode qui décide de si oui ou non, cette saison est réussie. Et malheureusement, c’est un naufrage. Un épisode lent, ou il ne se passe rien : voilà ce que propose ce quatrième volet qui n’a d’intérêt que pour sa fin évidente, attendue depuis longtemps. Les relations devinées se confirment, des morts secondaires rendent la cause plus forte encore (pour ceux n’ayant jamais joué à un jeu Telltale de leur vie) et toute sympathie à l’égard de certains personnages s’envole après quelques moments de scénario bien mal alambiqués.
En plus de proposer un personnage adolescent des plus énervant et cliché, les scénaristes de cette troisième saison oublient surtout de donner de l’ampleur à cette New Frontier qui est au final un camp de réfugié de plus. On en mesure jamais la grandeur, l’Havre de paix qu’il pourrait être au point de se moquer complètement de la destinée de ces habitants. Tant mieux : les scénaristes aussi. . Les personnages ont aucune logique dans leurs actions, on nous refait le coup du garage dans le noir avec des zombies planqués à la moindre action contextuelle, les puzzles sont inexistants mais tout de même bien interactifs pour nous laisser croire de leur importance et tout cela pour cacher une narration ratée de bout en bout. Quel désastre.
C’est ici l’épisode le plus raté depuis le début, sans aucun trait de génie ni même une scène importante à vous mettre sous la dent. Seule la fin marque le coup, promettant un épisode final intéressant. Mais pas sur que ce dernier vienne sauver cette saison, tant on est déçu devant ce scénario pauvre et convenu.
Episode 5 : No Time Left
Voilà, c’est terminé. Après cinq épisodes laborieux, la troisième saison de The Walking Dead signée Telltale Games est clôturée. Une saison complètement à la ramasse à bien des aspects, que ce cinquième volet tente de raccommoder. En vrai, c’est encore plus vicieux puisqu’il se veut bien plus réussi sur tous les points : sentimentaux tout d’abord, car il parvient à nous décrocher quelques émotions, mais aussi dans sa conception, dans son scénario, dans ses choix (qui prouvent ici qu’ils ont de réelles conséquences sur le final de la saison, par ailleurs). Malgré cela, rien ne vient oublier tout ce qu’il a fallu subir avant d’en arriver là.
Une technique ratée de bout en bout : ça y’est, Telltale Games n’en peut plus. On se retrouve avec des zombies flous absolument immondes, des faux raccords, des bugs, de la réutilisation d’assets à toutes les sauces et surtout, des chargements beaucoup trop fréquents. Point de vue scénario, on passe par toutes les grosses ficelles et les « comme par hasard » fleurissent comme les champignons sur la tête de ses immondes zombies. Les relations amoureuses sont prévisibles, les morts le sont encore plus à chaque scène un peu dangereuse ou beaucoup trop calme : un gros plan sur un personnage ou un petit rictus de côté vient prévenir le joueur qu’il va se passer quelque chose de grave. Et ça ne rate jamais.
Reste une fin ouverte intéressante, de nouveaux personnages originaux que l’on a adoré suivre malgré tout et l’apparition d’un personnage du comics pour jouer les raccords de fortune. Est-ce assez ? Clairement non.
Telltale Games vient finalement de livrer son jeu de trop, celui qui nous fait penser que Batman n’était pas un raté, que Borderlands fut un pur coup de chance, que Minecraft les as débordés. The Walking Dead : Saison 3 est le jeu qui marque le coup de vieux, celui d’un développeur qui ne s’est toujours pas renouvelé depuis 2012 et que la technique à la ramasse et la mise en scène prévisible ramènent à la réalité. Le studio Telltale a révolutionné le genre et le voilà obligé de se réinventer pour continuer à exister face à tous ceux qui se sont inspirés de son travail pour nous en proposer de bien meilleures expériences. C’est triste… Mais c’est la vie.