Depuis 1987, la série YS tente d’exister et le fait très bien face aux Final Fantasy et autres Dragon Quest. Le Japon est terre propice à ce genre de jeux de rôles différents et amenant à chaque épisode son lot de mécaniques originales et amusantes. Ys VIII ne faillit pas à cette règle et débarque en Europe avec la nette envie de triompher auprès de ceux n’aimant pas la grandiloquence du RPG japonais d’aujourd’hui.
Adol Crusoé
Tout commence sur un bateau, le Lombardia. Vous êtes Adol, jeune matelot accompagné de son meilleur ami Dogi qui fait d’ailleurs davantage dans la force brute. Ensemble vous naviguez gratuitement en échange de vos services, jusqu’à ce qu’une curieuse tempête ne vienne compliquer votre situation. Un affrontement contre une gigantesque pieuvre plus tard, le temps de découvrir un système de combat en temps réel plutôt dynamique, vous voilà échoué sur une plage. Vous êtes seuls et allez devoir retrouver tout l’équipage, celui que le jeu a passé une petite heure à vous laisser découvrir dans un tutoriel d’exploration particulièrement laborieux à bord du bateau. Malin !
Désormais explorateur perdu sur une île déserte, vous voilà parti à l’aventure. Tous les ennemis sont visibles à l’écran et peuvent être combattu comme dans n’importe quel jeu d’action : on avance, on frappe, on combote, on esquive, tout cela assez efficacement même si le système de jeu a ses lenteurs qui n’en font pas un roi du A-RPG. Pas grave, la formule fonctionne et rapidement les combats deviennent une seconde nature. Ceux-ci s’amélioreront et se diversifieront encore avec d’autres personnages jouables qui auront chacun leurs magies élémentaires et leurs types d’arme différent pour pouvoir percer des défenses et la jouer plus stratégique. Surtout, les nombreuses compétences à débloquer et placer en raccouris « R1 + ? » viennent dynamiser les affrontements.
Rapidement, vous retrouvez l’ami Dogi et surtout Laxia, noble de la famille Roswell de Garman. La rencontre est particulière : elle est sous une cascade d’eau en train de se laver après son naufrage quand vous vous retrouvez tête à… tête avec elle. L’humour japonais classique, qu’on aime ou qu’on n’aime pas mais qui fonctionne plutôt bien en V.O. Par contre, la version traduite en français vient rendre tout cela extrêmement gênant. Les textes sont souvent à côté de la plaque et écrits sous forme de « bonne blagues adaptées », faisant de ce genre de situation des moments de gène extrême. Déjà que de base, ce n’est pas le fou-rire… (A noter que le jeu bénéficiera bientôt et pour sa sortie PC d’une nouvelle traduction, car même la version anglaise était de très mauvaise qualité)
20 heures de naufrage
Difficile de jurer que vous n’êtes pas au bout de vos surprises avec YS VIII quand le début est si laborieux. Les premières heures, vous allez donc construire un camp de naufragés en essayant de retrouver tout l’équipage qui se retrouve disséminé sur la carte. Des personnages tous très clichés, mais qui ont leur rôle à jouer dans votre quête : un cuisinier, une couturière, etc. Tous vous seront d’une grande aide pour créer de l’équipement, de la nourriture, améliorer les conditions de vie, les statistiques de vos personnages, etc.
Le principal souci de l’évolution du scénario en début de jeu, c’est sa linéarité et ses scripts. Vous allez devoir vous rendre à des points spécifiques, qui vous demanderont souvent de revenir au camp ou vous y téléporteront directement via une cinématique. La gigantesque zone de l’île à découvrir en monde libre ne s’ouvre vraiment à vous que très tard, tant le jeu n’a de cesse que de vous rappeler à lui, de limiter votre progression sous prétexte d’histoire à raconter. L’exploration attendra une bonne dizaine d’heures avant d’être réellement à la disponibilité du joueur, même s’il aura le droit à quelques bribes de liberté d’ici là. Avec sa gestion économique basée principalement sur le troc des matières premières, YS VIII force pourtant le joueur à l’exploration : autant dire que la première dizaine d’heures risque vraiment d’être frustrante. Par exemple : certains débris gigantesques vous barreront la route et nécessiteront un nombre précis de naufragés pour vous aider. Si vous n’en avez pas trouvé encore autant sur l’île, alors le passage vous sera bloqué. C’est une des mécaniques de progression les plus intéressantes et les moins frustrante de cette exploration « limitée » en début de partie, tant la recherche d’équipage prend alors encore davantage son sens. L’envie d’ouvrir tous les chemins est bien présente et fonctionne auprès du joueur pourtant un peu déçu qu’on le tienne encore en laisse. C’est déjà moins satisfaisant quand votre progression est stoppée nette parce que vous n’avez pas le bon outil : là, on rage et on rentre au bercail pour reprendre la route du scénario histoire de débloquer ce qu’il faut pour continuer à jouer les aventuriers.
En parallèle à cette exploration et à la gestion du camp, vos naufragés vont vous proposer de participer à plusieurs quêtes. Soit de la recherche d’objets, soit d’ennemis, mais aussi de la défense de camp en cas d’attaque de monstres. On tombe alors dans une sorte de Tower Defense à hauteur d’homme où il est nécessaire d’éliminer des ennemis par vagues pour réussir. Ce n’est clairement pas la meilleure phase du jeu, mais on s’y amuse tout de même. Plus tard, ce sera le contraire : vous irez détruire des repaires de monstres et on se retrouve à cartonner masse d’ennemis en s’amusant. C’est déjà mieux !
20 heures de prophétie
Après un long moment d’exploration scriptée et d’équipage à reformer, le jeu devient bien plus sérieux et nous parle davantage de cette Dana contenue dans le titre. Ne comptez pas sur moi pour vous dire quoi que ce soit sur l’évolution du scénario à partir de ce moment, mais sachez que lorsque le jeu décolle c’est pour ne plus jamais retomber dans ses travers de début d’aventure. L’épopée est bien présente et fait plaisir à voir, surtout après ce long tutorial camouflé. Mais il fallait bien cela pour accueillir tous les joueurs, surtout les nouveaux venus.
Car tout est simple à la compréhension dans Ys VIII et c’est bienvenu. Les transformations de matières premières en objets utiles et équipement se fait en un bouton, les armes ne se comprennent qu’à travers les trois caractéristiques que sont la Santé, l’Attaque et la Défense et seuls les effets tels que le poison ou la paralysie viennent mettre du piment dans votre sélection d’inventaire. L’accessibilité de Ys VIII est très importante et on ne sera pas surpris de votre de très jeunes joueurs s’y intéresser de près tant il est coloré, facile à prendre en main et accueillant. Un bon point.
L’exploration s’ouvre réellement au joueur à ce stade et une quête secondaire qui prend à cœur vient se proposer à lui : la cartographie de l’île. Chaque secteur fouillé à 100% vous gratifiera d’une surprise auprès du capitaine du bateau désormais tas de planches, mais vous y trouverez surtout une grande satisfaction personnelle. Découvrir à 100% la carte de l’île c’est profiter du meilleur aspect du jeu : ses trésors, ses mystères, son environnement dépaysant et ses ennemis variés. Découpés en plusieurs segments (nous ne sommes pas devant un jeu pionnier du genre), le monde « libre » est donc l’un des points fort du titre comme j’aime à vous le rappeler depuis le début de ce texte.
Musiques sublimes et graphismes colorés rendent l’aventure encore plus intéressante encore pour ceux qui ne jurent que par l’artistique. Ys VIII est un « vieux jeu » dans sa conception, pensé pour tourner sur PSVita et quelquefois très ressemblant à ce qui se faisait sur PlayStation 3. Malgré tout, il a beaucoup de charme : les environnements sont magnifiques, l’aventure a ses grands moments visuels et musicaux et on ne peut pas lui reprocher ses mécaniques « à l’ancienne » tant elles fonctionnent pour la plupart assez bien. Et encore : je ne vous ai pas parlé de tout ce qui pouvait faire office de révélation sur le scénario. Vous n’êtes pas au bout de vos surprises.
Malgré vingt premières heures ou la sensation d’être tenu en laisse est extrêmement frustrante, Ys VIII propose une île passionnante à explorer, des combats dynamiques et rapides et une aventure au scénario plutôt passionnant bien que proposant des personnages à l’intérêt très inégal. Profitant de son « vieux » moteur, ce RPG sort sur PlayStation 4 avec des chargements très rapides, un lissage des textures agréable et toujours ces musiques de qualité qui nous transportent dans un univers coloré et plaisant. Loin des ambiances actuelles du RPG Japonais. Ys VIII propose quarante heures de scénario en ligne droite et rajoutez au minimum vingt heures supplémentaires pour l’exploration. Autant vous dire que si ce n’est pas le RPG de l’année, c’est un bon candidat pour vos nuits d’hiver.