The Inpatient est la nouvelle production de Supermassive Games, le studio anglais déjà à l’origine de l’excellent Until Dawn et son shooter dérivé en réalité virtuelle, Rush of Blood. Il y a encore une fois un lien avec l’univers d’Until Dawn, puisqu’il s’agit ici de raconter les origines de l’épidémie wendigo. Une approche narrative, de la VR pour plus d’immersion, et bien évidemment une ambiance horrifique : bienvenue un monde étrange et inquiétant.
Technique convaincante et immersion
The Inpatient débute par un poncif vidéoludique : le joueur incarne un personnage amnésique. Dans une sorte d’institut psychiatrique aux pratiques non conventionnelles, il subit l’interrogatoire d’un professeur louche, qui cherche à lui rendre sa mémoire (peut-être). On est alors frappé par la qualité technique du jeu : les personnages sont bien modélisés, s’approchent du joueur, arborent différentes expressions, se montrent impressionnants par l’intensité de leur présence. Les jeux VR proposant une telle réussite technique ne sont pas légion. C’est évidemment un point très positif pour l’immersion, qui constitue sans nul doute l’objectif principal de Supermassive Games. Elle est d’ailleurs encore décuplée par l’ajout d’une mécanique de reconnaissance vocale très performante : le jeu est en effet émaillé de dialogues proposant deux choix au joueur ; s’il peut se contenter de sélectionner l’un ou l’autre à la manette, il peut surtout lire son choix à voix haute, le système détectant alors la réponse donnée par le biais du micro intégré au casque PSVR. L’effet est remarquable, et couplé à la réalité virtuelle il participe à une immersion saisissante. On déplorera tout de même des temps de chargement fréquents, bien qu’ils soient généralement habilement camouflés (le patient est alors victime d’une sorte de perte de conscience temporaire, ou de vertige, laissant quelques secondes mises à profit pour charger la suite de la séquence).
Ecriture à revoir
Malheureusement, l’écriture du jeu ne se montre pas à la hauteur du travail technique réalisé. Si tous les outils sont en place pour permettre au joueur de s’incarner véritablement dans The Inpatient, la volonté de maintenir un flou scénaristique sur ce qui se déroule réellement ainsi que la qualité parfois hasardeuse des dialogues empêchent de rentrer dans le jeu complètement. Les révélations n’en sont pas vraiment, et au fur et à mesure que l’on avance l’ensemble prend un air artificiel, construit pour intriguer le joueur sans se donner la peine de voir plus loin. Dommage.
On peut également se montrer déçu par les embranchements scénaristiques : The Inpatient reprend le principe du « battement d’aile du papillon », déjà mis en place dans Until Dawn (il s’agit en fait d’embranchements scénaristiques déclenchés par des choix de jeu, ici lors de dialogues). Ainsi, plusieurs fins sont disponibles, mais les choix sont globalement peu nombreux et peu impactant : l’expérience de jeu ne sera pas fondamentalement modifiée selon l’option choisie. Il faut dire qu’avec une durée de vie de seulement 2 heures (encore un défaut, surtout pour 39.99€), il n’est pas facile de proposer des personnages profonds ou des pistes scénaristiques réellement différentes, qui permettraient d’explorer des voies variées. On se contentera de modifications à la marge.
Ambiance horrifique
L’atmosphère de The Inpatient se construit en grande partie autour du mystère qui entoure la présence du joueur dans cet asile-prison. De nombreuses scènes se déroulent dans l’espace confiné de la chambre-cellule qu’il partage avec un autre patient (ou une autre patiente, selon le sexe défini en début de partie) : un lieu aux proportions restreintes, au sein duquel il ne peut pas arriver grand mal. Des bruits retentissent au dehors, hors de portée visuelle. Des événements graves semblent se produire non loin, sans que le joueur puisse en savoir plus. La chambre est une prison, mais aussi un sanctuaire. Cela contraste avec les séquences où l’on quitte justement cette chambre, que ce soit pour fuir enfin ou simplement à l’occasion d’un délire. Tout est conçu pour préparer le joueur, qui est naturellement sur ses gardes : les tons sombres, l’ambiance générale, la construction du sanctuaire que l’on quitte, le rythme global, plutôt lent (impossibilité de courir, par exemple). Le danger est nécessairement tapi dans l’ombre. Dans ces conditions, les jump scares servis par le jeu se montrent efficaces (on se retrouve régulièrement tremblant de peur après un sursaut que l’on sentait pourtant venir), même si le procédé est éculé. La VR demeure performante dans cet exercice, et suffit à pallier une écriture perfectible.
Il y a quelque chose d’étonnant avec The Inpatient. Le jeu de Supermassive Games comporte de nombreux défauts et manque globalement d’une véritable ambition créative ; pourtant, en dépit de cela, il se parcourt avec un certain plaisir. L’atmosphère et la technique sont suffisamment convaincantes pour produire une expérience de jeu valant le détour, malgré des mécaniques un peu faciles et une écriture décevante. Finalement, son plus gros défaut est d’être vendu trop cher (39.99€).