Crossing Souls

Crossing Souls semble n’être en apparence qu’un jeu divertissant sur une bande de potes coincés dans une étrange aventure flirtant avec l’au-delà. Fantômes et autres spectres du genre font partie d’une histoire épique mélangeant des éléments de gameplay à la Zelda avec le caractère entraînant du film Les Goonies. Avec peut-être une pincée de Earthbound par-dessus pour le côté surnaturel s’infiltrant dans une bourgade semblant plus que normale.



NOSTALGIA TRIP

Soyons honnête quelques instants. Crossing Souls joue très clairement sur la nostalgie, un secteur très en vogue ces derniers temps. Il pioche considérablement dans la culture pop des années 80 sans pour autant nous étouffer sous un excès de références écrasantes. Leur intégration est en générale faite avec suffisamment de subtilité sans être invasive si ce n’est à quelques occasions difficiles à cacher, comme ce vieil antiquaire asiatique parlant dans un mauvais français caricatural. Bien évidemment, il est évident qu’il s’agit d’un clin d’œil direct au au vieux sage asiatique du film Gremlins, mais le manque de satire ou de profondeur alloué à ce personnage l’empêche de s’élever au-delà de simple cliché.

Les clichés font pourtant partie intégrante du jeu. Ils lui permettent de taper directement dans nos souvenirs d’enfance en jouant avec notre mémoire cognitive. Ce que je veux dire c’est qu’il ne s’agit pas d’un accident quand on essaye de nous remémorer Retour vers le Futur – d’une manière assez peu subtile par ailleurs – ou encore Les Goonies ou Explorers – pour le côté bande d’amis en route pour l’aventure. Tout semble avoir été fait dans le but de nous rappeler le « bon vieux temps » et par la même occasion, vivre une histoire qui elle a su être malgré cela, originale. De plusieurs manières, Crossing Souls réussit ce qu’il entreprend. Son scénario est par moment suffisamment captivant pour nous donner l’envie d’aller toujours plus loin. A d’autres, il ne sonne pas entièrement juste comme s’il manquait d’épaisseur. Crossing Souls est comme cela aussi, imparfait. Bien qu’il ait été fait avec beaucoup de cœur, cela ne veut pas pour autant dire qu’il n’a pas de défaut.

Au contraire, par moment, l’intrigue peut se voir entravée par des dialogues peu inspirés. La majeure partie a beau être correcte, on est loin du merveilleux. Ils peuvent paraître par moment puerile dans leur écriture, et je ne parle de nos héros encore gamins se parlant entre eux, mais plutôt des grands méchants de pacotille de cette histoire dont les échanges verbaux sont trop caricaturaux et sonnent faux. La narration de Crossing Souls est riche en émotions, et la plupart sonnent justes et sont à tour réconfortantes ou mélancoliques. C’est tout simplement que c’est pas toujours aussi profond qu’on aurait pu l’espérer. Et la narration occupe une bonne partie de notre temps de jeu. C’est comme ça. Il y a donc peut-être un peu trop de parlotte au détriment de l’action, ou un juste équilibre qui n’a pas toujours été trouvé. Ce n’est pas que l’ensemble soit mauvais, c’est qu’il n’est tout simplement pas grandiose et je voulais plus qu’il le soit.

Parce-que d’un autre côté, tout ce qu’il touche du doigt semble vouloir se confiner au magnifique. Sa bande-son alterne entre des morceaux signés Chris Köbke jouant directement dans la cour de thèmes musicaux hollywoodiens du genre à nous donner l’envie de partir en aventure, tandis que Timecop1983 accompagne de ses mélodies les scènes d’action intense ou émotionnelles à coup de synthwave entêtante. Vous ne pouvez pas faire plus années 80 que cette bande originale. Ce n’est que du pur plaisir pour vos oreilles. Son pixel art sent le 16 bits sans problème et s’avère définitivement coloré à souhait même si son histoire peut s’avérer par moment morne avec de nombreux moments à vous arracher une larme. Pour couronner le tout, un effet d’aberration chromatique a été ajouté par dessus bien que cela a pour résultat négatif de gêner la visibilité de l’image en la rendant plus floue que nécessaire.



Misfits and co

En elle-même, tout l’action passe par la gestion de cinq enfants, héros de cette histoire. Avant de pouvoir faire la connaissance de tous, nous démarrons là où souvent les plus grandes aventures ont commencé – à l’orée d’une nouvelle journée. Là, dans son lit, se trouve allongé dans son lit endormi comme beaucoup d’autre héros avant lui (cf. Earthbound, Chrono Trigger), une jeune garçon du nom de Chris. Il est alors soudainement réveillé par son insolent de jeune frère Kévin qui dit avoir fait une découverte spectaculaire. La manette en main, c’est à travers les rues d’une petit ville dynamique semblant plus que normale que je me balade à la recherche de mes futurs nouveaux amis numériques. C’est encore une fois plein de clichés que je vais faire la rencontre de Matt, l’intello du groupe avec ses chaussures jetpack et son pistolet laser, le costaud Big Joe capable de mettre autant de patates percutantes que d’être le seul capable de bouger les objets trop lourds et pour finir Charlie, une jeune fille un peu garçon manqué venant d’un quartier pauvre de la ville, pouvant fouetter ses ennemis avec sa corde à sauter comme d’esquiver toute attaque d’un glissement de côté. Ils ont beau avoir l’air d’une bande de stéréotypes ambulants, quelque part, ils arrivent quand même à être attachant en faisant preuve d’une certaine candeur.

Dans les grandes lignes, le gameplay sait être amusant. Les boss peuvent s’avérer difficiles, il y a des puzzles à résoudre mais pas trop non plus, tout en restant intéressants à leur manière. Dans sa globalité, il s’agit d’un jeu linéaire qui laisse peu de place à l’exploration libre, et en général il n’y a qu’un chemin à suivre. Nous ne somme vraiment pas face à un ersatz de Zelda, mais plutôt à un jeu à la narration importante entrecoupée d’éléments piochant directement dans le genre action-aventure. Et cela fonctionne plutôt bien à l’exception de certains passages. Ainsi, à certains moments bien précis, histoire sans doute d’ajouter un peu de variété dans un jeu en ligne droite, on a droit à des niveaux se jouant différemment, n’étant pas sans nous rappeler le fonctionnement de stages bonus ou intermédiaires comme nous pouvions en voir à l’époque des 8 ou 16 bits. Dans l’un d’entre eux par exemple, on dirait assister à une course poursuite entre nos héros à vélo et la police en voiture comme si elle sortait tout juste du film E.T. De l’autre côté, il y a ce niveau alternatif qui nous met dans une situation similaire à celle d’un shoot them up. Si ce n’est que la jouabilité se trouve alors être particulièrement délicate avec des contrôles rigides et loin de la précision des meilleurs shmup. Un raté comme un autre sur un jeu qui ne réussit pas forcément quand il tente de trop s’éloigner de sa recette de base.

Crossing Souls est dans sa majorité plutôt bon et fun. Il a beaucoup de petits ratés ça et là, manquant la finition de ses meilleurs parties. Et ces manquements tendent à transparaître encore plus dans un jeu de type linéaire. Il semble juste que par moment, Crossing Souls est réellement un plaisir manette en main pour ensuite passer, pour un court instant, vraiment, par un passage plus frustrant qu’amusant. Il en ressort une certaine inconsistance comme certains passages de plateformes crispant par le choix d’une vue du dessus pas toujours adapté, à d’autres nettement plus jouissifs. Ce n’est pas forcément un jeu très difficile tout en restant suffisamment stimulant. Il est juste que certains choix en terme de jouabilité et d’ergonomie vont se payer cher. Un manque de raffinement qui font que tout ne sera pas forcément, comme cette incorrigible niveau, où poursuivi, nos héros doivent être alterné pour user de leurs compétences pour passer d’une plateforme à l’autre. Si ce n’est que quelqu’un à penser que c’était une bonne idée de mettre au premier plan des bouts de décors plus gênants que pertinents.


Il y a beaucoup de bonnes choses dans Crossing Souls. Son histoire n’est pas toujours très équilibrée mais reste capable de susciter de véritables émotions. Il n’est pas qu’un simple projet opportuniste cherchant à capitaliser sur la nostalgie. Il est plus que cela. Il est le résultat d’un travail passionné et sincère. Il lui manque seulement une finition plus aboutie sur certains points pour le rendre incontournable. Il lui aurait été plus profitable de faire moins d’hommages et de s’appesantir un peu plus sur le développement d’une personnalité propre plus aboutie. Une chose reste sûre cependant, et c’est que un peu partout là-dedans, il y a du talent qui ne demande qu’à être exploité, et Fourattic est un studio à suivre de près.

Laisser un commentaire