« Origins est un nouveau départ pour la série des Assassin’s Creed et cette première étape est d’une force assez tranquille…. Mais agréable ». Voila quelle fut ma conclusion de critique lors de la sortie du premier « renouveau » Assassin’s Creed. Dans le même moule, conçu très rapidement, cette Odyssey est le second épisode d’un titre qui avait déjà ses limites malgré sa qualité globale. Du coup, ils s’en sortent comment en Grèce ?
Périclès en main !
On vous avait balancé l’idée que Bayek, le Medjaÿ de Siwa, proposerait un tout premier jeu dans l’univers de la franchise avec des origines (d’où le nom) et un point d’ancrage particulier pour un renouveau : balayez-moi rapidement vos espoirs en termes de compréhension rapide de scénario, puisque Origins racontait bel et bien la création de l’Ordre des Assassins… Mais il reste beaucoup d’origines en suspens et c’est Odyssey qui va venir nous les narrer.
On suit toujours Layla Hassan, ancienne employée d’Abstergo, qui de son loft londonien va se plonger dans l’Animus pour tenter de percer les mystères des artefacts de légende. Pour se faire, elle va suivre l’épopée du ou de la descendant.e de Léonidas. Vous choisirez Alexios (l’homme) ou Kassandra (la femme) ? Dans les deux cas, vous allez avoir le droit à une belle preuve de caractérisation simple mais réussie. J’ai joué Kassandra et j’ai adoré découvrir cette femme forte, que nos réponses aux choix multiples des différentes quêtes (oui, c’est nouveau) permettaient de mettre en avant certains sentiments, coups de colère et émotions en fonction de la situation. C’est très artificiel, mais cela fonctionne surtout lorsque l’on discute de son personnage avec un autre joueur. J’ai demandé à Vasquaal (qui jouait Alexios) s’il n’était pas déçu de voir Kassandra aussi cool et… surprise, les deux personnages sont tellement bien écrits (et sur une même ligne principale bien scriptée) qu’aucun ne tire la couverture vers lui. Que vous jouiez un homme ou une femme, vous aurez le droit au même niveau d’écriture et d’interactions. Ceci précisé, choisissez et partons pour la Grèce antique !
Même si on s’habitue à un tel niveau de talent, il est important de le rappeler : les équipes d’Ubisoft sont les meilleures pour recréer des mondes libres visuellement incroyables et passionnants, historiquement riches en informations et en voyage vidéoludique. Assassin’s Creed Odyssey a le droit au même traitement que les autres et propose une Grèce antique à couper le souffle en termes de paysages. Si les premières heures n’éblouissent pas forcément, la faute à des temples trop nombreux et répétitifs dans leur construction, à des villes qui se ressemblent toutes et des forêts luxurieuses mais répétitives, c’est dans l’exploration passée la dizaine d’heures que l’on retrouve les plus beaux lieux et paysages : une mine de sel, un lac de sang, une forêt en déclin… Cela change du copié/collé fatiguant qui crève les yeux sur ce nouvel opus.
Copié/Collé de temples et de villes, on l’a déjà dit, mais aussi et surtout des différents et ultra nombreux endroits ou se battre partout sur la carte : des grottes avec un animal alpha à affronter, des camps d’ennemis, de pirates, de bandits, d’amazones, des forts à dévaster, des fournitures à bruler pour faire baisser la jauge de pouvoir d’un dirigeant de ville, ces mêmes dirigeants à tuer pour les voir être remplacés par le camp adverse et enfin des batailles à débloquer, qui vous demandent d’affronter tout un tas d’ennemis sur un champ de bataille pour obtenir du loot de qualité.
Socrates le coche ?
Du loot partout, du loot tout le temps. Assassin’s Loot Odyssey c’est 60 heures de jeu, dont une trentaine dans l’inventaire à casser les objets inutiles pour obtenir des ressources et à attendre que la carte daigne se charger correctement sur PS4 Pro. Techniquement, on notera aussi des temps de chargements horribles entre deux discussions et de gros ralentissements (à faire planter la console) lors de certains périples, principalement dans des camps. Des bugs déjà un peu corrigés en patchs, mais pas assez pour rendre l’aventure complètement fluide. Pas grave, il faut avouer que l’univers (et le scénario, dont je ne dis volontairement rien) vont réussir à vous happer facilement tant ils sont bien travaillés. Même les phases dans le présent, avec Abstergo, les Assassins et les Templiers, sont sympathiques et si le coté Série B est plus assumé que jamais, il n’empêche qu’on a le droit à de bons moments d’explosion du cervelet droit devant des révélations étonnantes et amusantes. L’univers Assassin’s Creed continue à s’étendre, se compliquer et passionner ceux qui tombent dans le panneau. Tel votre serviteur.
Dommage par contre, qu’Assassin’s Creed Odyssey ait la notion d’Assassin dans son nom, alors qu’on passe les dix premiers niveaux d’expérience à frapper/fuir/frapper pour retrouver sa vie et espérer passer des zones trop fortes pour le joueur, suivi d’une quarantaine de niveaux ou les ennemis seront toujours mis au même niveau ! Si vous êtes niveau 40, les ennemis seront au minimum niveau 36 et ainsi de suite. Résultat, vous avez le droit à des assassinats planifiés qui ne tuent pas les ennemis les plus forts (et donnent donc l’alerte) et autres idées de gameplay complètement cassées.
En parallèle, les points d’aptitudes vous permettront d’obtenir des compétences complètement pétées. Une flèche qui traverse les murs par exemple, qui se révèle complètement mal équilibrée et devient l’arme de base de tout joueur passé la moitié du jeu. On a vu meilleur assassin dans la saga Assassin’s Creed qu’un.e grèc.que qui se cache derrière un mur pour tuer tout le monde à la flèche magique invisible. Et cela marche même et surtout avec les ennemis importants du jeu !
Bref, ce principe de niveau évolutif en fonction du joueur est tout à fait désagréable. Il permet effectivement une grosse durée de vie et une certaine logique en combat, mais ne permet jamais au joueur de se sentir plus puissant (bien qu’à la fin du jeu, les aptitudes vous rendent pratiquement invincible). Surtout, il gâche toute notion de filature et d’assassinat, pourtant au cœur de la série. Origins avait déjà ce défaut, Odyssey termine d’assommer les amateurs du genre pour leur proposer quelque chose de plus bourrin, avec des combats toujours axés sur des attaques légères et lourdes à correctement enchaîner, entre deux esquives qui ralentissent le temps et autres pouvoirs à valider au bon moment. Les combats sont agréables, mine de rien. Ça n’a pas toujours été le cas dans Assassin’s Creed et les deux derniers opus y trouvent ici l’un de leurs plus gros points forts.
Le pélopo-quoi ?
Finalement au-delà de ses soucis techniques, des bugs « fidèles à la série », de son aspect trop vite conçu, de sa mise à niveau permanente des ennemis et du trop voyant copié/collé général, AC Odyssey c’est tout de même une sacrée aventure visuelle et très forte en Histoire. On y (ré)apprend plein de choses, on y découvre une civilisation incroyable et surtout pavée de messages forts sur la démocratie, l’entente entre les peuples et le reste. Des notions de compréhension et des sujets de discussion qui résonnent toujours aujourd’hui et ce, chez tout le monde.
Néanmoins, s’il était obligatoire de ne citer qu’un seul gros défaut parmi tous dans cet Assassin’s Creed Odyssey, ce serait sa Guerre du Péloponnèse qui n’est absolument jamais expliqué. Vous avez les rouges, Spartes, d’où vous venez en début de récit, puis les bleus, Athènes, qui vous semblent être des ennemis. Et puis rapidement, tout est flou, volontairement sans doute pour nous mettre à la place des grecs de l’époque. Mais ce parti pris de ne rien expliquer de ce long conflit (27 ans de guerre tout de même) amène autant de mise en abyme que de frustration pour qui voudrait vraiment en comprendre les tenants et aboutissants. Dommage de devoir faire un tour du coté de Wikipedia pour mieux entrer dans le jeu. Maintenant, on attend de pied ferme l’extension « éducative » de ce monde grec incroyable à visiter, mais pas toujours amusant à jouer.
On reprend la recette d’Origins, on la transpose dans un nouveau lieu et on y ajoute quelques nouveautés. Cela fonctionne parfaitement, mais commence déjà à sentir le réchauffé. Alors quand vous y placez une très fausse bonne idée (les niveaux des ennemis qui s’adaptent à celui du joueur), cela fait des étincelles. Surprise cependant : l’aventure est vraiment intéressante, le scénario est assez travaillé avec ses différentes fins et même les séquences dans le présent ne sont pas à jeter ! Reste cette impression depuis quelques temps que la notion d’Assassin du nom disparait au profit d’un monde libre fourre-tout et plus bourrin qu’il n’y parait.