Critique Vidéo

Call of the Sea

Développeur : Realmforge Studios – Éditeur : Raw Fury – Date de Sortie : 08 décembre 2020

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1934, Pacifique Sud. Norah découvre l’île sur laquelle son mari serait porté disparu. Une île sur laquelle ce dernier entamait des recherches pour sauver sa bien-aimée d’une maladie étrange qui la tiraille et la condamne à une mort certaine. Vous jouez Norah dans un jeu d’aventure à la première personne qui s’inspire tout autant d’un Firewatch que d’un Myst dans sa construction. Mais surtout, c’est à un vrai dépaysement auquel vous aurez le droit dans ce « Call of the Sea » très coloré.

Paradis perdu

Tout au long des six environnements à parcourir sur près de 5 heures de jeu (pour les plus habiles en énigmes), Call of the Sea va vous narrer son aventure à coup d’introspection à haute voix de l’héroïne et de messages laissés par son mari, disséminés ça et là sur des camps de fortune à découvrir. Et de ce point de vue, cela fonctionne très bien : on va vite comprendre qu’on ne rencontrera jamais âme qui vive dans cette histoire et que le tout sera tranquille, posé, sans danger, ne faisant s’affronter que l’esprit de l’héroïne aux différents mystères à résoudre des nombreuses scènes du jeu.

Pas de moment effrayant, pas de séquences rapides, ni d’action, ni de Game Over possible : juste une aventure posée au rythme des joueurs et donc, accessible à toutes et tous. Tout cela raconté avec efficacité par des acteurs inspirés. Notons d’ailleurs que Norah est jouée par Cissy Jones, qui n’est autre que la doubleuse de Delilah dans Firewatch. La boucle est donc bouclée ! (Elle est aussi une doubleuse très connue dans le milieu du jeu vidéo et sa liste des personnages doublés est gigantesque).

Dans Call of the Sea, on passe son temps à fouiller les lieux, assez linéaires, pour en comprendre les tenants et aboutissants, puis on enchaîne les aller-retours pour activer des leviers, des boutons et autres curiosités afin d’ouvrir la porte qui mènera à la scène suivante. C’est assez bien pensé et créatif pour en cacher la répétitivité du schéma, mais c’est quand même bien visible.

Dessinatrice de talent, Norah prendra des notes de son aventure dans son journal personnel. Celui-ci regorgera de dessins retraçant son parcours, mais aussi de petits indices griffonnés qui vous éviteront de prendre des notes vous-mêmes dans votre coin : c’est malin, mais moins magique. Puisque du moment que Norah l’inscrit ou non dans son journal, on sait si le potentiel indice qui est devant nous en est réellement un, ou non.

Des énigmes en deça

Call of the Sea pêche de toute façon par un manque flagrant d’intérêt de ses énigmes. Très simples pour quiconque ayant déjà joué à un jeu du genre, pas bien compliquées même pour des novices, elles manquent surtout de profondeur et d’une difficulté progressive qui soit réellement intéressante. En mi-parcours, le jeu cessera quelque peu d’être intelligent et proposera surtout au joueur de comprendre un schéma et de faire quelques aller-retours à pas lents (même en courant) pour activer des objets dans l’ordre. Cela fonctionne une fois, deux fois tout au plus. Mais la troisième fois, on sent l’ennui nous monter à la tête. Ajoutez à cela les quelques fois ou l’on peut déceler la solution à une énigme sans même en compléter le cheminement de pensée, juste en trifouillant les interrupteurs avec un peu de logique, et vous comprendrez que ce ne sera pas un jeu qui demandera beaucoup de réflexion. Tout juste de la patience. C’est clairement ce genre de moment qui nous font souffler de déception devant l’aventure.

Mais l’histoire proposée sauve un peu le tout : déjà parce que le jeu est court et que par conséquent, on ne se sent jamais en train de forcer pour en voir la fin. On a toujours envie d’en savoir plus sur cette expédition et sur notre héroïne. Call of the Sea a ce pouvoir de rendre ses énigmes intéressantes non pas parce qu’elles proposent des mécaniques originales et stimulantes, mais parce que les joueurs et joueuses savent qu’une fois terminée, chaque énigme permettra de progresser dans le récit. Et ça, c’est plutôt chouette pour un jeu d’aventure.

L’esprit Lovecraftien n’y est pas pour rien. Pour ceux qui ne connaitraient pas de quoi il est question, Lovecraft est un auteur du 20eme siècle très influent, qui proposa un univers fantastique et horrifique mettant en scène la petitesse de l’humain face à d’éventuelles forme de vie qui le surpasse. Le mythe de Cthulhu, du nom de l’entité cosmique monstrueuse inventée par l’écrivain, est ici bien présent dans ce Call of the Sea qui très vite saura vous convaincre que vous n’êtes pas devant un jeu à l’univers que l’on pourrait définir de « normal ». Mais ne comptez pas sur moi pour vous en dire davantage. Le jeu a ses mystères narratifs qui surplombent de loin ses moments de réflexion.

Développé par Out of the Blue Games, un studio Espagnol dont c’est le premier jeu, Call of the Sea est une belle note d’intention aux ambiances visuelles ravissantes. Il a beaucoup de choses pour lui : son style de film d’aventure à l’ancienne, une héroïne travaillée et intéressante à suivre, une histoire d’amour absolument charmante, du paranormal bien dilué dans un jeu qui, vraiment, ne pêche finalement que par ses énigmes beaucoup trop simplistes et mal cadencées.

Image de SkyWilly

SkyWilly

Rédacteur en chef collectionneur de Skylanders et qui passe beaucoup trop de temps sur ces briques Lego. Heureusement qu'il y a des petits jeux pour s'évader ! Auteur de Le jeu vidéo indépendant en 2015 : Portraits de créateurs

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