Année 70, vie sur une autre planète et boucle temporelle. Quoi d’autre ?
Critique
Letters – a written adventure
Développeur
5 Am Games GmBH
Éditeur
Plug In Digital
Date de Sortie
9 février 2022
Prix de lancement
14.99 €
Testé sur
nintendo Switch
Studio exclusivement féminin, 5 AM Games nous propose un premier jeu avec le soutien de Plug In Digital, mais aussi d’une campagne de financement participatif. Avec un gameplay très malin, les 3 Suisses (rien à voir avec le catalogue de correspondance) nous plongent dans l’enfance et surtout l’adolescence d’une jeune fille avec toutes ses galères, ses interrogations et surtout, ses lettres avec sa correspondante Russe.
A letter to you
Sarah, 10 ans, écrit sa première lettre à sa nouvelle correspondante Katya. Elle y parle de ce qu’elle aime (les comics), ses envies de vacances (en Islande) et sa famille, avec son père qui travaille trop, sa mère un peu insouciante et sa grande sœur énervante qui veut toujours décider de tout. Avec cette petite introduction, Letters – a written story, pose rapidement le contexte de vie de Sarah et les mécaniques de jeu, qui consistent à utiliser les mots présents dans la lettre, pour pouvoir progresser dans la lecture de celle-ci. Au fil des échanges, on va suivre le quotidien de Sarah. Si au démarrage tout se passe bien, arrive le tournant de la vie de Sarah : le divorce de ses parents, mis en scène de manière assez forte via une lettre qui devra se conclure par un choix cornélien : vivre avec son père ou sa mère. Évidemment, imposer ce genre de choix à une enfant de 10 ans ne peut pas être sain pour celle-ci.
Une fois ce choix réalisé, un petit saut temporel de 6 ans afin d’entrer dans la période la plus complexe, l’adolescence. Car oui, on n’est pas ici pour suivre les aventures rigolotes de Sarah. Pas d’inquiétude, le jeu n’a pas pour vocation ne nous mettre dans un inconfort extrême. On y suivra la gestion de la première relation amoureuse que peut avoir Sarah (dont on peut décider de tomber amoureuse ou non de ce chanteur·se de groupe emo-goth), de la marginalisation subie du fait d’avoir des centres d’intérêt différents, mais aussi des effets que la dépression des adultes peut avoir sur les enfants. Dans le scénario choisi pour ce test (rester avec le père), les 2 sœurs (dont la grande est aux Pays-Bas pour cause d’études) doivent devenir adultes avant l’heure pour prendre soin de leur père afin de l’aider à sortir d’une grosse dépression, provoquée notamment par une surcharge de travail qui dure depuis des années (et ayant entre autre provoqué le divorce).
Et pourtant, dans tout cet amas de situations délicates reste toujours de l’espoir, cette petite lumière qui fait que les choses finiront par s’arranger, et ce grâce au pouvoir des mots et du dialogue, porté entre autre par les discussions avec Katya (par lettres et messagerie instantanée). Cette facilité d’approche d’externaliser tout ce que Sarah n’arrive pas à gérer dans sa vie est possible du fait d’avoir une personne ne faisant pas partie de son entourage direct étant donné que les 2 jeunes adolescente sont séparées de plusieurs milliers de kilomètres. Si la discussion via messagerie est plus directe, celle via les cartes est beaucoup plus précise et profonde, du fait que l’information mettra bien plus de temps à arriver au destinataire, et que la réflexion avant d’écrire sera donc bien plus importante.
Shot the words
Niveau gameplay, le but sera d’arriver en bas à droite de la dizaine de lettres / écrans d’ordinateur afin de compléter la jeunesse et l’adolescence de Sarah pour obtenir le récit de son évolution dans la vie. Évidemment, nous n’avons pas l’ensemble du texte sous les yeux, et il faudra y contrôler l’avatar de notre petite dessinatrice en devenir pour arriver en bas de page, sauf que plusieurs obstacles viendront freiner la progression entre les lignes. Il sera possible de réaliser deux types d’actions. Le premier est de prendre les mots surlignés pour les lancer sur les dessins, les fenêtres de conversation ou les photos pour les modifier. Certains n’auront qu’un effet esthétique, pour ajouter un peu de douceur au titre, d’autres permettront de réellement changer les dessins pour dégager le passage. La seconde action possible sera de venir modifier un mot, que le·a joueur·se devra identifier, pour en découvrir un nouveau que l’on pourra balancer dans le décor. Complètement intégré dans l’air du temps auquel se passe le jeu, c’est-à-dire d’abord au milieu des années 90, puis surtout au début des années 2000 avec l’arrivée des messageries instantanées, le jeu va venir jouer avec tout un tas de codes des débuts de l’aire internet pour servir la simple mécanique de gameplay qu’il offre. Évidemment, gros bémol, le jeu n’est disponible qu’en anglais, et on voit mal comment venir le traduire étant donné qu’il faut casser des mots en deux pour en créer de nouveaux pour répondre aux puzzles.
Letters – a written adventure est un jeu extrêmement frais qui nous fait jouer avec les mots pour y découvrir la jeunesse et l’adolescence d’une jeune fille à qui on demande d’être bien plus responsable qu’elle ne devrait l’être. Lettre d’amour nostalgique au début de l’aire internet, le jeu arrive à renouveler ses situations alors que sa boucle de gameplay est d’une simplicité déconcertante, mais à l’efficacité redoutable. Si l’anglais n’est pas un frein, alors vous pourrez pleinement profiter d’un titre enchanteur.
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