The blue side of the Moon
Critique
Tous à l'Ouest
Développeur
WolfEye Studios
Éditeur
Devolver Digital
Date de Sortie
31 mars 2022
Prix de lancement
39,99€
Testé sur
PC
Premier jeu de WolfEye Studios, composé d’anciens de chez Arkane (Dishonored, Prey…), Weird West est bien évidemment une Immersive Sim qui, comme son nom l’indique, prend place au Far West, mais un Far West dans lequel se côtoient magie et créatures surnaturelles. Avec son univers intriguant, et le bagage de ses créateurs, Weird West suscite forcément la curiosité et l’attente des amateurs du genre. La question est donc de savoir s’il parvient à répondre aux attentes suscitées et, par la même occasion, à rejoindre le panthéon des Immersive Sim…
Tout commence par une personne encapuchonnée, assise sur une chaise au milieu d’une pièce. Devant, sur le sol, un étrange symbole. Accrochés sur des piliers, 5 portraits de personnages dont l’on ne distingue que la silhouette. Une scène que l’on reverra plusieurs fois au cours de notre partie. Car si l’on commence avec la tragique histoire d’une ancienne chasseuse de primes à la retraite, dont le fils est assassiné sous ses yeux et le mari enlevé, on s’apercevra bien vite que l’on contrôlera au final 5 personnages différents, à travers lesquels on découvrira l’univers sombre et fantastique de Weird West. On y trouvera un monde difficile où le danger peut venir non seulement des bandes de hors la loi peuplant l’Ouest, des politiciens véreux, mais également des créatures surnaturelles. Citons notamment les Pourceaux, sortes d’homme-porcs extrêmement agressifs, ou encore les Sirènes, créatures cauchemardesques friandes de chaire humaine. Et c’est d’ailleurs bien là le gros point fort du titre, son univers et son ambiance.
pour une poignée de dollars... en moins
À la différence des anciens projets des fondateurs de WolfEye Studios, tels Dishonored ou Prey, au budget bien plus élevé, le choix a ici été fait d’une 3D isométrique stylisée, avec un gameplay d’action plus proche du twin stick shooter. Au niveau de l’action d’ailleurs, les combats ont pas mal de pêche et on prend vite plaisir à faire parler son revolver, même si on a vite fait de s’emmêler les pinceaux dans le cœur de l’action au vu du nombre d’ennemis parfois important et des possibilités d’actions. C’est d’autant plus vrai si le combat n’était pas prévu, comme lorsqu’on est repéré en pleine infiltration par exemple… Heureusement le changement d’arme, plus exactement l’ouverture de la roue de sélection d’arme, ralentie le temps, suffisamment pour offrir un léger répit dans une action qui peut donc s’avérer fort confuse. Autre atout dans notre manche pour se sortir des pire situations, on peut également effectuer des plongeons de côté ou vers l’arrière, tel Max Payne, ou utiliser une tripotée de capacités spéciales, plus exactement jusqu’à 4 spécifiques par personnage, et 4 compétences spécifiques par arme (par exemple effectuer un tir silencieux à la carabine, ou encore utiliser des dégâts électriques avec le revolver). Attention cependant, chaque action spéciale viendra piocher dans votre jauge d’action, et il faudra ensuite attendre qu’elle se remplisse ou utiliser des potions à cet effet. Il est donc assez plaisant de faire parler la poudre, surtout si on est bien préparé au combat. À noter aussi que l’on peut faire usage de l’environnement en prenant avantage de barils explosifs, de pétrole inflammable, voire même de conteneurs chimiques.
Fallout au Far West
Dans son emballage, le jeu ressemble beaucoup à un cRPG à l’ancienne. Pas de « vrai » monde ouvert ici, mais plutôt des zones plus ou moins grandes, dispersées sur la carte du monde, pardon de l’Ouest, sur laquelle on se déplace d’un point à un autre avec des chances de rencontres aléatoires, tel un Fallout avant lui. On regrettera d’ailleurs que les déplacements soient un peu lents, et on a un peu l’impression de perdre du temps en regardant son pion se déplacer doucement vers une destination. On retrouvera donc des points d’intérêt, et des marqueurs indiquant où se trouve le prochain objectif de la quête principale ou des quêtes secondaires et activités annexes (comme, Far West oblige, remplir une activité de chasseur de primes après avoir récupéré les fameux posters « Mort ou vif » placardés sur le tableau de bord du shérif local). On note également la présence d’un système de réputation, qui augmentera avec la résolution de quêtes et de bonnes actions, et à l’inverse, diminuera si on vous voit commettre un crime. La réputation est d’ailleurs gérée globalement, non pas par ville, mais dans tout l’Ouest. Le système reste cependant parfois un peu opaque, et il est par moment un peu compliqué de comprendre pourquoi on perd des points. Il m’est également arrivé d’avoir une double pénalité de points pour la même action (mais il s’agit plus probablement d’un bug ?).
Au cours de votre aventure, vous aurez l’occasion de voyager avec un maximum de 2 compagnons, qui viendront vous porter main forte lors des combats, et vous serviront également de « mule » pour porter tout ce loot que vous trouverez et voudrez conserver. Vous aurez également la possibilité d’acheter un cheval pour accélérer les déplacements et avoir des places d’inventaire supplémentaires. Quelques améliorations auraient d’ailleurs put être apportées au niveau de l’interface. Si elle est dans l’ensemble très agréable à l’oeil et que l’on peut accéder aux inventaires des compagnons et de sa monture sur l’écran d’achat et vente des marchands, on aurait aussi aimé pouvoir y avoir accès directement depuis le menu du jeu afin de pouvoir gérer plus rapidement les inventaires, ou équiper ses compagnons, plutôt que de devoir passer par le menu de conversation.
En plus des compagnons, il existe également un système d’aide par des PNJ croisés auparavant. En cas de coup dur lors d’un affrontement, un personnage que vous avez au préalablement sauvé pourra venir vous prêter main forte et vous sortir d’une situation compliquée pour éponger sa dette envers vous. Une bonne idée qui vient supplémenter le système de réputation de façon plutôt originale.
Finalement, un système de craft assez léger est également présent, et il est possible d’améliorer ses armes en utilisant des minerais, ou encore de fabriquer des protections à l’aide de peaux d’animaux. On aurait cependant apprécié avoir une liste des crafts possibles pour les protections directement dans le menu, les possibilités de crafting restant assez floues tout au long du jeu.
Plus Immersive que sim
Immersive Sim oblige, on trouve en général plusieurs solutions pour un problème. Pour récupérer une info, il est par exemple possible d’accepter une quête qui fera office de faveur contre l’information, de cambrioler la demeure de la personne possédant l’info en s’infiltrant sans être vu, ou encore en tirant l’information par la force en dézinguant tout le monde. Le tout aidé par des capacités spéciales, partagées entre personnages une fois débloquées. Fait intéressant, les compétences ne sont pas débloquées avec de l’expérience, mais plutôt avec des artefacts, qui sont disséminés un peu partout dans le jeu et récompensant l’exploration. Il y a 2 principaux arbres de talents. Plus exactement les reliques de Nimh qui correspondent aux compétences de combat (qui elles ne sont débloquées que pour le personnage joué, et les « talents » à proprement parlé, débloqués moyennant des cartes en or. Ces derniers s’apparentent plus à des « traits » comme dans un Fallout par exemple, et vous donnent des avantages selon vos styles de jeu, comme le fait de pouvoir sauter plus haut et atteindre des endroits normalement inaccessibles, de crocheter des serrures plus efficacement, de se déplacer plus vite en étant accroupi, ou encore d’avoir des compagnons plus puissants…
Au niveau du level design, certains passages sont vraiment réussis, et un bon timing et utilisation de l’environnement peut parfois donner des résolutions inattendues. Comme par exemple se demander comment atteindre un balcon sans se faire remarquer quand une mini tornade apparait. On peut alors s’en servir pour se faire propulser dans les airs et atteindre une hauteur jusque là inaccessible. Cependant, comme ça peut arriver dans ce genre de jeu, c’est souvent une fois avoir bien raté sa tentative d’infiltration, ou emprunté un chemin classique, qu’on remarque la présence de passages alternatifs. Évidemment rien n’empêche de recharger une sauvegarde et de tester les alternatives.
Bang Bang You're Dead
Le principal problème vient surtout du fait que la liberté dans les possibilités d’approches est surtout vraie pour le début du jeu. On a l’impression que l’effort réalisé là-dessus s’étiole au fur et à mesure de la progression. C’est d’autant plus paradoxal qu’on finit au cours de l’aventure par débloquer bien les ¾ des arbres de talents disponibles et avoir donc un panel de possibilités élargi. Mais le soucis vient principalement du level design moins inspiré, et de phases d’infiltration pour le peu compliquées, la faute à un game design d’infiltration un peu bancal, pas aidé par la baisse de qualité du level design au cours du jeu. Les gardes ont en effet des rondes assez aléatoires et, couplé avec leur nombre parfois important, il est difficile, et surtout laborieux, d’avancer sans se faire repérer. D’autant qu’il arrive que certains ennemis résistent aux tentatives de les assommer discrètement, ou de les éliminer silencieusement à distance (avec l’aide de l’arc par exemple) sans vraiment savoir pourquoi. Dans ces conditions, on finit souvent par se faire repérer et finalement devoir finir tout le boulot de façon un peu plus brutale.
Si ça peut parfois vite tourner au vinaigre lorsqu’on se fait repérer au milieu de nombreux ennemis, les combats du jeu restent dans l’ensemble assez faciles pour peu que l’on soit habitué au genre et que l’on déclenche le combat dans de bonnes conditions (après avoir éliminé quelques ennemis, ou attendu un rassemblement autour d’un baril explosif…). Au final on se retrouve dans une situation où il est beaucoup, beaucoup, plus rapide d’avancer revolver à la main en tirant sur tout ce qui bouge.
Si on se prête énormément au jeu au départ, en faisant un maximum d’activités, on se rend compte que la structure du jeu est un peu linéaire, et au final les chasses ou les quêtes secondaires sont très répétitives (on a souvent à faire à des quêtes du style « amène ceci à cet endroit », « retrouve cet objet »…) et n’apportent au final pas grand-chose, si ce n’est un peu d’argent à dépenser. De plus, l’augmentation du nombre de gardes et la difficulté de l’infiltration couplée avec un manque de chemins alternatifs passé la première moitié du jeu, on a l’impression que le jeu se rapproche au fur et à mesure plus à un pur twin-stick shooter basé sur l’action qu’a une Immersive Sim à proprement parler. Et à moins de vouloir absolument faire un run « pacifiste », on progresse bien plus vite en se servant de ses armes et pouvoirs pour éliminer tous les ennemis, qu’à vouloir s’infiltrer discrètement. On ressent également le manque d’idée (ou de budget ?) dans le dernier personnage jouable, dont la quête est assez courte.
Malgré ses défaut et ses manques, comme une trop grande linéarité, Weird West reste un très bon coup d’essai pour un nouveau studio. Le jeu présente une histoire intéressante, le tout dans un univers sombre et assez unique (le Far West certes, mais avec sont lot de surnaturel). Malheureusement on lui reprochera ses errements de gameplay, son côté trop léger, que ce soit au niveau des mécaniques d’Immersive Sim ou de RPG, qui l’empêche d’atteindre le statut de très bon jeu et l’on reste un peu frustré au vu de nos attentes peut être trop élevées. Cependant, Weird West n’en est pas moins agréable à jouer et arrive à vous garder devant l’écran tout au long de son aventure, car, ce qu’il réussit, il le réussi très bien.