Une suite réussie avec pas mal de nouveautés
Critique
Sonic Superstars
Développeur
Arzest / Sega
Éditeur
Sega
Date de Sortie
17 octobre 2023
Prix de lancement
60 €
Testé sur
Xbox Series X
La saga Sonic a toujours eu une vie compliquée. En effet, depuis la fin de l’ère 16 bits, il semble très difficile aux différents studios de reprendre ce qui fait l’âme d’un jeu Sonic. Pourtant on pourrait penser que le cahier des charges est connu sur le bout des doigts depuis le temps. Pour autant, à chaque itération, les studios ont eu envie d’innover, de rajouter un truc pour démarquer le jeu de sa saga, qui un monde en 3D, qui une épée magique, qui une transformation en loup garou, qui un héros à fabriquer soi-même. À chaque jeu son implémentation nouvelle et relativement foireuse d’une individualité, alors qu’en fait ce que réclament à cor et à cri les fans du hérisson bleu, c’est « juste » un Sonic, pas plus.
Le moule est pété, que voulez-vous.
On aurait pu croire que le succès de Sonic Mania, et la relative surprise que fut Sonic Frontier aurait permis d’avoir un semblant d’espoir pour l’avenir de la franchise. La compil Origins a cependant déjà un peu freiné les ardeurs, offrant un ensemble paresseux pour une saga qui méritait plus. En voyant la bande annonce de ce Sonic Superstars, on pourrait penser qu’ils ont compris ce qui fait un bon jeu Sonic, malheureusement, on a surtout vu que ce que Sega savait faire, c’était une bonne bande annonce. Rien à redire sur la présentation ceci-dit, le jeu est très coloré et bénéficie d’un design accrocheur. On a 12 mondes comportant 1 à 3 actes, dans des environnements variés et plutôt dynamiques où surnage l’impression que Sega a un peu regardé ce qui se faisait chez la concurrence avec la mascotte moustachue et a décidé d’en reprendre quelques aspects (dont le multijoueur simultané) ce qui, en soi, n’est pas une mauvaise idée. Malheureusement, manette en main c’est plus compliqué.
Un pas en avant, trois pas en arrière
Ce n’est pas tant que le jeu soit mauvais, c’est qu’il est extrêmement frustrant. On a une base solide de gameplay et éventuellement, par moment on sent qu’il y a quelque chose de bon caché là-dessous, d’où la frustration. Je m’explique. Sonic Superstars reprend l’idée d’un Sonic « classique » vu de côté en 2D avec des éléments qui permettent de passer au second plan par moment. Les niveaux sont plutôt étendus avec différents cheminements verticaux qui permettent d’arriver au bout du niveau, des téléviseurs cachés et moult passages secrets permettent de concocter la recette d’un jeu amusant et speed où la vitesse et l’exploration sont les maîtres mots, ce qui est le service minimum en ce qui concerne Sonic, tout de même. Et quand le jeu se contente de faire ça, il est bien ! Ce qui pose problème c’est le gras autour du squelette. Sonic Superstars aurait pu se contenter d’être un Sonic classique, mais il a fallu ajouter des trucs nuls pour le démarquer. Dans un premier temps, on a le mode multijoueur ad hoc, qui est une mauvaise idée dans un jeu aussi rapide que Sonic, l’action devient complètement illisible, la caméra ne sait pas quel personnage suivre. Dans les derniers Super Mario, l’action étant surtout horizontale, ce genre de situation ne pose quasiment jamais problème, mais dans un jeu comme Sonic où on peut aller dans 3 directions pour atteindre la fin du niveau et où, donc, la progression peut se faire dans n’importe laquelle de ces trois directions, le jeu ne sait pas où donner de la tête. En parlant de donner de la tête, la difficulté du jeu est relativement mal dosée. Chaque envolée un peu rapide de Sonic et ses potes est systématiquement punie par un ennemi impossible à voir hors champ, un piège placé de manière sadique, ou pire, un passage secret entraperçu trop tard, menant à une émeraude cachée ou un bonus sympa, obligeant à freiner des quatre fers et tenter de revenir en arrière (souvent sans succès, un ressort ou autre objet forçant le joueur à continuer où à recommencer le niveau). Bref, on peut aller vite, mais il ne faut pas aller vite, un peu comme dans le jeu Road Runner Death Valley sur Super Nintendo (les vrais savent), dont, je pense, les développeurs se sont plus inspiré que des anciens Sonic, les sauts incontrôlables du hérisson bleu et son inertie de camion-citerne l’attestant.
Mollasson Superstars
Ah oui, parce que certes, il est rapide le rebelle, et à haute vitesse l’effet est toujours assez grisant. Néanmoins ce genre de situation n’arrive quasiment jamais. Les niveaux ne permettent que rarement ce genre de folie, quand on n’est pas tout bêtement stoppé net par un ennemi, un mur, on est ralenti par des feuillages (ou pire des niveaux aquatiques). Les passages de plateforme sont presque des tortures tant on ne peut pas contrôler les sauts à faible vitesse, et il arrive bien trop souvent de rater une corniche, retomber 4 étages plus bas, remonter, la rater à nouveau, remonter réussir à l’atteindre mais elle s’écroule alors on retombe, etc. D’autre part on va retrouver avec joie et ravissement (non) des niveaux bonus qui sont des aspirateurs de fun, il faut le dire. Les labyrinthes rotatifs sont des trésors de frustration, et ne donnent que des médailles permettant d’acheter des bidules cosmétiques pour créer un robot (j’y reviendrai). Les passages à la poursuite des émeraudes sont illisibles et chaotiques (oui, bon, ce sont les émeraudes du chaos, on a compris) : il faut se balancer de points d’accroche à d’autres dans une espace en 3 dimensions, jusqu’à se rapprocher suffisamment de l’émeraude pour l’attraper, sachant qu’on a un temps limite et qu’au fur et à mesure des obstacles viennent se positionner entre le héros et le trésor convoité. Tous ces éléments donnent au jeu un rythme très haché où on n’a jamais vraiment le temps de s’amuser avant d’être perturbé par un élément frustrant, et finalement on n’a pas spécialement envie de s’accrocher.
Dans le chapitre des bonnes idées, tout de même, chaque émeraude du chaos ramassée offre à Sonic (et ses potes) un pouvoir spécial, qu’on peut utiliser à l’envi et qui se recharge à chaque checkpoint, donnant à la quête des émeraudes une récompense immédiate qui change un peu de la bête collection habituelle. Autre point sympathique, il n’y a plus de vies, donc plus de Game Over possible, ce qui au vu du chaos et de la difficulté d’anticipation des dangers est finalement une bonne chose. Certains niveaux sont en plus magnifiques et proposent des animations sympathiques. Le souci c’est qu’ils sont toujours mal fichus et on ressent une assez grande répétition des blocs, comme si le jeu avait été généré par une IA à partir d’éléments faits main, sans véritable cohérence. Oh et une dernière chose, pourquoi mettre systématiquement un boss à la fin de quasiment chaque niveau ? Ce n’était pas nécessaire à part pour casser encore plus le rythme !
Mon constat, donc, à propos de ce nouveau Sonic est amer. Il aurait été évidement difficile d’atteindre la quasi perfection de Sonic Mania, mais ils auraient quand même pu s’en rapprocher. Les éléments ajoutés sont très dispensables, et le mode multijoueur semble avoir été implémenté pour faire comme la concurrence moustachue, mais sans avoir compris comment faire pour le rendre fun et intéressant. Un Sonic de plus, malheureusement, qui pourrait être le « Mario qu’on a déjà à la maison » quand on réclamerait Mario Wonder qui vient lui aussi de sortir et qui est véritablement maîtrisé, lui.
Franchise ressuscitée de la plus belle des manières