Critique

Eternal Strands

Skywilly
Publié le 18 février 2025

Développeur

Yellow Brick Games

Éditeur

Yellow Brick Games

Date de Sortie

28 janvier 2025

Prix de lancement

39,99 €

Testé sur

PlayStation 5

Auparavant édité par Private Division chez Take Two, avant que l’éditeur mette la clé sous la porte après plusieurs échecs qui lui incombent, ce jeu de Yellow Brick Games (créé par des anciens d’Ubisoft Quebec et Mile Laidlaw, le directeur créatif de Dragon Age) a bien failli ne pas voir le jour. Le voilà qui débarque en début d’année 2025 avec la ferme intention de ne pas passer inaperçu. C’est tout ce qu’on lui souhaite, car il a des arguments…

Action-Adventure Visual Novel Romance

Et si le monde était régi par une magie obscure et faite d’éléments à tisser entre nos mains, par la force de capes venant centraliser tout ce pouvoir ? C’est dans ce monde de Fantasy loin d’être très original mais très bien écrit que l’on découvre notre héroïne : Brynn, une jeune membre des Tisserands, prometteuse magicienne, fuyant une brume nocive avec sa caravane de fortune pour découvrir les secrets de l’Enclave. Cet endroit abandonné est source de toute une Histoire qu’il faudra découvrir pour espérer s’en sortir et faire face à la désolation qui guette nos héros.

Nos ? Oui, même si vous jouez Brynn, vous aurez plusieurs autres personnages à rencontrer. La moitié fait partie de votre caravane, entre votre mentor, ce couple de Forgerons atypique, l’intellectuel de service (beaugosse tant qu’à faire), votre intérêt amoureux (très bien écrit dans son évolution) ou un·e féru·e de livres qui compilera toutes vos découvertes en un codex précieux. L’autre demi-dizaine de personnages à rencontrer fait partie d’un scénario vraiment consistant, plaçant les personnages au cœur d’un Lore fantastique loin d’être nouveau, mais qui a de l’audace. Un scénario qui rend les scènes d’entre gameplay très bavardes, doublées en anglais comme en français avec beaucoup de réussite.

Mais c’est quoi, Eternal Strands ? Il fait partie de ces jeux combinant plein d’autres idées déjà vues ailleurs, se risquant à être quelconque. Heureusement pour lui, il ne l’est absolument pas… Déjà parce qu’il propose un univers très coloré, à la direction artistique moderne « un peu cartoon » mais loin d’être ridicule. Mais aussi parce qu’il ose, assume, de façon sincère et honnête, repiquer des idées qui ont déjà fonctionnées tout en les intégrant dans ce monde de l’Enclave.

Dans l’ombre des colosses

Le Hub central, sous forme d’un camp de fortune, vous permet de parler à chacun des membres de l’aventure, ainsi que de forger armes et armures, améliorer vos pouvoirs et d’approfondir vos connaissances. Mais c’est évidemment dans la dizaine de biomes proposés qu’il faudra se lancer pour poursuivre différents objectifs de loot et de recherche d’informations.

L’occasion de lâcher des références à tout bout de champ, car Eternal Strands ne s’en cache en rien : il pique des idées partout, mais le fait plutôt bien. Se jouant à la troisième personne comme un jeu d’action/aventure plutôt classique (on peut courir, sauter, explorer des zones libres) mêlée à de l’action tout aussi déjà vue (on frappe à l’épée/on tire à l’arc/on casse tout avec une épée à deux mains), le jeu de Yellow Brick s’inspire aussi beaucoup de Breath of the Wild pour commencer : il est possible de grimper partout, tout le temps, du moment qu’on a de l’endurance. Cassez ce rondin, agrippez-vous dessus, et vous dégringolerez avec lui. Cette falaise ? Montez-là ! Ce colosse géant qui tente de vous exterminer ? Chevauchez-le et trouvez ses points faibles…

Oui, deuxième double référence : chaque biome aura de petits ennemis très différents à frapper, mais aussi un monstre dédié à grimper façon Shadow of Colossus et à looter façon Monster Hunter. C’est étonnamment ce qui se fait de mieux dans le genre « plagiat assumé » et c’est franchement amusant. Chaque monstre/colosse possède ses points forts et faibles que je ne vais absolument pas vous révéler sous peine de gâcher la découverte, mais il s’agira toutefois d’élargir son champ de pensée si on veut le vaincre efficacement.

Les colosses se suivent et se ressemblent beaucoup. L’imagination n’est pas celle de Fumito Ueda, le créateur de Shadow of Colossus, et on ne leur en tiendra pas rigueur plus que necessaire. Néanmoins, les affrontements sont moins spectaculaires et saisissants qu’on ne l’espère lors de notre première fois. C’est même très vite plutôt simple d’aller au charbon : seul le dernier Boss/Monstre est plus complexe, mais tout simplement parce qu’il est volontairement plus difficile à grimper. Ça triche un peu et c’est en ça qu’on reconnait les limites.

Il y a deux moyens de battre un colosse : en explosant sa barre de vie, à l’usure ou en frappant ses points faibles, mais aussi en lui extirpant son essence primaire (source d’amélioration de vos pouvoirs) bien mieux cachée et plus complexe à déceler. Une sorte de mission secondaire pour chaque monstre, si vous voulez. Le loot obtenu sera différent en fonction de la façon de le vaincre : un loot au cœur du jeu puisque c’est ce qui régira votre amélioration d’armures et d’armes dont les plans de construction sont à trouver dans chaque zone.

Si vous mourez, vous perdez la plupart de vos objets. Il faut donc mesurer les risques avec les quelques potions que l’on a (on peut en trouver sur le terrain) et rentrer en se téléportant au camp dès qu’on pense que le jeu n’en vaut plus la chandelle. On apprend vite à temporiser ses phases de loot, souvent dans la douleur de quelques pertes d’objets rares et précieux. Au bout d’un certain temps, vous débloquerez des évolutions de votre camp qui vous permettront de sauver davantage d’objets si vous mourrez, de l’extension d’inventaire, de potions consommables, etc. Le camp évolue au fil de votre loot et de l’histoire, permettant aussi d’améliorer votre équipement une fois créé, ce qui rend la customisation intéressante.

Surtout que les différents biomes dépendent d’une météo aléatoire : tempéré, chaud, froid, brumeux… Chaque météo a son lot de conséquences. Claquer du feu dans une zone aride fera s’embraser tout le décor. La glace vous ralentit et vous blesse. Aussi, vous devrez faire évoluer votre équipement en défense de Feu et de Glace comme bon vous semble : soit vous créez une armure qui fait un peu des deux, soit vous en créez une pour chaque situation. Étudier le terrain en quelques secondes reste nécessaire avant de foncer dans le tas, surtout au bout d’une dizaine d’heures (sur la trentaine requise pour terminer le jeu à fond).

Tisserands de liens

Mais nous n’avons pas parlé des magies et c’est normal : on garde le meilleur pour la fin. On a le droit à trois types de magies : la télékinésie, le froid et le feu. Je ne vais vous parler que de certaines, encore une fois pour éviter de trop vous en dire, mais sachez toutefois que chaque magie a le droit à trois évolutions d’efficacité qui se débloquent (si vous avez bien suivi) lorsque vous terrassez un colosse/monstre en lui volant son essence. Et ces magies peuvent être combinées de façon totalement logique sur le terrain.

Exemple : je crée un bloc de glace. Je peux me servir de ma télékinésie pour m’en faire un bouclier temporaire. Et qu’est-ce qui se passe quand je crée une barrière de feu à l’intérieur de cette grosse boule de kinésie à quelques secondes d’exploser ? Je vous laisse découvrir ça par vous-même. Si la télékinésie est clairement le pouvoir le plus utile du jeu (on peut envoyer les ennemis dans le vide, leur lancer 80% du décor sur la figure, détruire des bâtisses en un seul coup si le pouvoir est bien évolué…), reste qu’aucun pouvoir n’est décevant. Les neuf idées sont combinables, amusantes à découvrir et à évoluer. C’est aussi avec les magies qu’on découvre le sens de l’univers, basé sur les fils, le métier de tisseur. Tout le lore se base sur cette thématique, appelant nos héros des « Tisserands » ce qui ne manque pas d’être classe. Bref, il y a une très belle synergie entre tous les aspects de Eternal Strands, entre scénario et game design. C’est agréable et humble : deux adjectifs rares pour ce genre de jeu.

Eternal Strands est une très bonne visual novel, avec une excellente combinaison de pouvoirs, un sympathique gameplay d’action aventure, un intéressant système de loot, un passable gameplay de Colosses et de très oubliables effets visuels qui jurent un peu avec le reste. Mais le character design inspiré et l’aventure qu’il propose le rend humble, honnête et force le respect. C’est un bon premier jeu pour le studio et en vrai, rien que pour ça, c’est déjà une belle réussite. Espérons juste qu’il saura se faire une place parmi les mastodontes de 2025.

Laisser un commentaire