Child of Light : le jeu plus indépendant qu’indépendant !
Ce n’est pas moi, c’est la presse qui le sous-entend. Il est de bon ton de revenir sur ce qui se fait dans le milieu en termes de bêtises grosses comme le compte en banque de Bobby Kotick. Parce que clairement, plus que jamais, certains faiseurs de textes sont complètement à côté de la plaque… Pour les moins vendus, tout du moins. Et le pire ? C’est que l’éditeur ne fait que son travail. Les journalistes, par contre…
C’est le 10 septembre 2013 que Child of Light est officialisé. Développé par l’équipe de Far Cry 3, dirigé par Patrick Plourde (lui aussi directeur créatif sur le même jeu) , le jeu promet énormément : un univers tout en dessin, un conte de fées, une inspiration Ghibli et Amano, de l’estampe, de la poésie. Un jeu qui se classe dans la catégorie des Ico, des Shadow of the Colossus, des Enslaved et de tous ces jeux qui tentent d’être différents et juste beau. L’idée est belle et que l’on soit d’accord : s’il est clair qu’Ubisoft voulait « son jeu qui fait indépendant », il n’empêche que la direction artistique semble sublime, que le jeu promet beaucoup et qu’il est très « couillu » de la part de ce grand studio de financer un tel jeu. Ce qui est beaucoup plus énervant, c’est le traitement qui lui est fait sur les sites de jeu vidéo. On ne va ici parler que des sites français, parce que c’est beaucoup plus marrant. Mais le problème est vraiment international. Tout simplement parce qu’Ubisoft a de gros moyens de communications et qu’à chaque fois que la princesse de Child of Light va pointer le bout de son nez, il y aura un communiqué de presse sur un site de jeu vidéo.
C’est pratiquement systématique. Sur Game Side Story, on en a pas parlé à cause de cela : parce qu’il est omniprésent sur les autres sites, les plus gros. Mais depuis quelques jours, deux semaines avant sa sortie, c’est carrément l’apothéose de privilèges. Comme si Child of Light méritait plus que n’importe quel autre jeu d’être mis en avant. D’un seul coup de communiqué de presse, on balaie tout l’univers du jeu indépendant d’habitude maltraité et on met en avant un titre aux airs indépendants, mais géré par une grosse boite. Parce qu’ils ont plus de raisons d’y être, eux, vous comprenez… Cet article est horrible de prétention et je m’en rend bien compte en l’écrivant. Il est aussi horrible de méchanceté envers Ubisoft mais ce n’est absolument pas le but. Que ce soit dit et compris : ici, Ubisoft n’est en rien responsable du problème , même s’ils en profitent évidemment beaucoup.
Child of Light a l’air génial. Les développeurs semblent avoir beaucoup de talent.
Comparaison entre les news consacré à Child of Light et l’absence de news pour Out There. Tout deux des jeux différents, poétiques, visuellement enchanteurs… Mais Out There n’a jamais eu le droit à une actualité en deux ans de création. Source : Gameblog La vie d’un jeu indépendant sur un gros site, c’est tout bête : on vous en parle si l’auteur est connu (Notch, Klei, Double Fine…) , on en fait sûrement une preview si jamais il fait le buzz parce qu’on se rend compte qu’on est complètement passé à côté (Don’t Starve, FTL, Risk of Rain…) et sinon on en fait juste le test, parce qu’on ne veut pas passer pour des anti-indépendants. Mais n’oublions pas que plus de la moitié des jeux indépendants qui sortent sur Steam ne sont pas testés. Et ne parlons surtout pas des jeux qui sortent sans DRM, sur Desura , IndieGameStand et les autres. Ces plateformes sont clairement inconnues des grandes rédactions, comme s’il n’y sortait que des mauvais jeux (alors qu’on sait très bien que c’est totalement faux) . Child of Light, depuis sa première vidéo cachée dans une réunion « secrète », depuis son trailer d’annonce, a toujours été mis sur le devant de la scène. À chaque communiqué de presse, il y a eu la news qui allait avec.
Et évidemment, on en tire les meilleures citations, celles qui peuvent clairement blesser les jeux indépendants, les vrais (sans que ce soit une insulte envers Child of Light encore une fois) . On nous dit des choses aussi dingues de sens que « le petit jeu parmis les grands », « un jeu comme on en fait plus » ( Dust : An Elysian Tail , au hasard ? ) et puis bien sur on le met en avant en disant « qu’il le mérite tant il est un petit projet qu’il faut défendre ». Par contre, le millier d’indépendants qui avaient besoin de vous cette année, comme ils n’ont pas pu vous envoyer de communiqué tous les 15 jours (et encore, cela sert même souvent à rien) , vous vous en fichez ? C’est à n’y rien comprendre en termes de crédibilité, d’honnêteté, d’amour du jeu vidéo. Child of Light mérite plus que n’importe quel autre jeu d’être mis en avant, parce qu’il appartient à un gros studio ? On lui donne tout l’espace de promotion possible parce que justement, il a davantage les moyens de l’avoir ? On le dit indépendant dans l’âme, alors qu’on l’empêche justement, en faisant ce type d’article, d’en faire un titre qui sort du lot ?

Bref, encore une fois, une énième fois, on fait le jeu de l’éditeur. Parce qu’il faut être rentable. Parce que parler correctement d’un médium, voire d’un art pour certains, qu’on veut mettre en avant, ça veut dire ne parler que de ce qui est populaire et fait rentrer de l’argent en termes de publicité, de visites, de reconnaissance. Parce qu’expliquer le monde de l’indépendant et des petits studios aux gens, c’est si compliqué ? Le paradoxe c’est qu’au final : Child of Light obtient le traitement que n’importe quel indépendant mériterait. Parce qu’il a un look d’indépendant chez un éditeur AAA. Du grand n’importe quoi.
Child of Light va sûrement être très bon, mais c’est le seul avis que vous obtiendrez de notre part sur le jeu. Car vu la communication qui lui est faite, on a bien d’autres titres à mettre en avant que celui-ci. Les gros sites n’en ont par contre rien à faire, ils font comme d’habitude : ils privilégient, ils caressent dans le sens du poil et finalement, mentent à leurs visiteurs. Et ce sont évidemment les rédacteurs de ces sites qui sont ensuite les premiers à crier au scandale quand un petit studio coule, qu’un genre de jeu est oublié, qu’un jeu ne s’est pas vendu. Pour s’en enlever toute part de responsabilité, sans doute. Beaucoup de sites ont fait le choix de faire un maximum pour parler de tous les jeux et ont donc, à mon humble avis, tous les droits de communiquer à l’extrême sur un tel titre. Prenez Gamekult : dans le Top 3 des sites de jeu vidéo en France et ils prennent le temps d’aller interviewer des indépendants. Prenez Factornews : ça parle de tout, tout le temps, quel que soit le budget qui se trouve derrière.
Prenez Canard PC : magazine papier qui se vend bien alors qu’il n’est jamais « à la mode » et surtout pas axé sur le tout-populaire. Mais s’il vous plait, fuyez la prochaine vidéo de Cyprien qui fera des vannes caca-pipi sur Child of Light, l’article sur la substantifique moelle de Julien Chièze et tout ce qui fera office de publipostage dégoulinant d’inculture et de manque de respect envers le monde actuel du jeu vidéo. Parce que mine de rien, c’est d’ailleurs sûrement le pire dans toute cette histoire : c’est que les gens ne demandent que ça, de découvrir de nouvelles choses et de nouveaux horizons. Mais des gens curieux, ce sont des gens qui ne restent pas en place. Et ça, évidemment, c’est beaucoup trop mauvais pour les affaires… Et l’art dans tout cela ? Les créateurs ? « Qu’ils mangent de la brioche ! »
– JeuxVideo. com a écrit un article complètement à coté de la plaque (à mon sens) sur l’indépendant et parle justement de ce Child of Light comme d’un jeu indépendant de chez Ubisoft. Ceci dit, ce site est loin d’être le plus mauvais en France, contrairement à ce qu’en dit sa réputation. Au moins, JV. com teste absolument tout ! – Patrick Plourde, obligé de préciser que son jeu est aussi méritant qu’un jeu à 60 €… – « Un jeu bien plus ambitieux qu’il n’y parait » . Ou comment dénigrer un titre sous prétexte qu’il ressemble à de l’indépendant…





