L.A. Noire
Rockstar s’associe à la Team Bondi, déjà à la base de la création du plutôt raté The Gateway sur PlayStation 2. Aussi, L.A Noire est le premier jeu à se servir d’une toute nouvelle technologie de réalisme des visages . Une si bonne recette donne t’elle un excellent titre ? Parlons beauté… En 1947, Cole Phelps rentre enfin au bercail après une guerre psychologiquement bouleversante. Ce jeune homme de l’armée se voit alors promu au sein des forces de l’ordre à Los Angeles, la Cité des Anges qui porte très mal son appellation. Entre Hollywood, la banlieue, ses beaux quartiers et les bidonvilles qui trainent ça et là, Los Angeles n’est pas la petite ville tranquille des publicités. L’alcool est partout, la corruption aussi et la Mafia prend du pouvoir chaque jour que Dieu fait.
L.A Noire est un Grand Theft Auto-like, c’est-à-dire que vous y contrôler un homme dans une énorme ville libre de circulation. La seule différence est qu’ici, le scénario est prépondérant à toute action annexe et que l’on comprend rapidement qu’il n’y a pas grand-chose à faire dans la ville. Chercher des bobines de film cachées, une trentaine de petites missions aléatoires , très rapides et très simples et voici que la liste des annexes se termine. L.A Noire est avant tout un jeu proposant une histoire travaillée et des acteurs de talent piochés un peu partout dans des séries télévisées aussi variées que Mad Men, Fringe ou même Stargate Atlantis. Qui dit casting de qualité dit aussi que celui-ci se doit d’être complété par des figurants qui jouent très mal leur petit rôle. Dans un tout autre jeu, ce n’est pas grave : une intonation de voix ratée ne gâche pas toujours l’action. Mais dans L.A noire, l’outil de capture des visages des acteurs reproduit à l’animation prêt toutes les émotions et le jeu de celui-ci . Ainsi, on obtient un résultat vraiment bluffant de réalisme et se rapprochant forcément du cinéma lorsqu’il s’agit de discuter avec quelqu’un.
Sauf qu’une telle technologie n’est rien sans le support de ce qui l’entoure : les visages sont magnifiques, souvent bluffants, quelquefois mal joués, mais en cela on la l’habitude puisque l’on va aussi au cinéma voir des films Français tous plus décevants les uns que les autres. Mais le bat blesse quand le reste des animations ne suivent pas. L.A Noire reprend clairement le moteur d’un GTA IV (ou équivalent) avec des animations toujours aussi faussement réalistes qui commencent sérieusement à vieillir . Les personnages ont cette tendance très Rockstarienne de se balancer toutes les cinq secondes pour donner un semblant de réalisme supplémentaire. Aussi, l’incroyable finesse des faciès jure avec le reste du corps souvent constitué de textures un peu vieillottes et d’animations qui se répètent d’un personnage à l’autre. Dans la ville, lors des quelques moments de foules, c’est vraiment flagrant et assez immonde. Techniquement, L.A Noire est donc un peu en dent de scie. Reste que l’ambiance graphique est assez sublime. Comme le premier Mafia en son temps, L.A Noire nous plonge dans des années 40 particulièrement saisissantes avec ses voitures, ses faux semblants de beauté, ses publicités d’un autre temps et toute cette technologie qui n’en est qu’à ses débuts.
Alors oui, les ciels sont assez moches, les voitures ont de simples couleurs faisant office de texture et on aurait réellement apprécié avoir des arbres qui ressemblent davantage à de la flore qu’a de simples poteaux auxquels on a posé une texture de « tronc », mais cela n’empêche pas l’immersion la plus totale. Parlons gameplayOu « jouabilité » en français, fait référence à la façon dont le joueur interagit avec un jeu vidéo.… Sans vous révéler quoi que ce soit de l’histoire, sachez que vous allez rapidement monter les échelons et passer de la circulation à de bien plus intéressants secteurs de la Police de Los Angeles . Criminelle, Brigade des Mœurs… Tout cela dans le but de varier les plaisirs et les enquêtes. Chaque secteur du jeu représente moins d’une demi-dizaine d’enquêtes qui, mise bout à bout, vous donne votre scénario. Certaines enquêtes ont un lien avec un énorme fil rouge scénaristique, d’autres ne sont là que pour le fun. Vous passerez d’une simple fraude à l’assurance à de véritables énigmes dignes d’un grand film. Une certaine chasse au tueur en série restera sans aucun doute des les annales des meilleurs moments de jeux vidéo de ces dernières années. À moins que la répétitivité vienne gâcher la fête ? Car le jeu de Rockstar est incroyablement répétitif , la faute à un rythme de vie policière trop réaliste et à un manque cruel de variété dans le gameplay.
Cole Phelps se rend sur la scène du crime, fouille les lieux jusqu’à ce que la petite musique d’enquête se stoppe (preuve que vous avez trouvé tout ce qu’il était possible de recenser comme indice) et va interroger d’éventuels témoins/présumés coupables. Certaines fois ils prendront la suite, on passera alors un petit moment à les rattraper que ce soit à pied ou en voiture. Dans tous les cas, un petit interrogatoire se met en place. Voici le cœur du jeu : les questions et les réponses . On interroge une personne et en fonction de sa réponse, il est possible de valider le fait qu’elle dise la vérité, qu’elle ment, ou émettre un doute sur ce jugement. Pour déceler le vrai du faux, il « suffit » de regarder comment se comporte l’interlocuteur et c’est bien là que ces faciès très réalistes entrent en jeu. En cas d’accusation de mensonge, il faut aussi choisir une preuve à mettre sous le nez de l’accusé pour pouvoir poursuivre le dialogue. Sinon, ils prennent la mouche et vous font perdre votre temps. Pire encore, vous y perdez des indices probables. Il faut alors bien choisir son orientation de dialogue et éviter de les énerver en les accusant trop hâtivement, sans quoi ils ne vous aideront pas dans votre quête de la vérité. Cet aspect du jeu est passionnant, personne ne dira le contraire. Le seul problème est qu’encore une fois, cette phase est omniprésente et semble quelquefois manquer cruellement d’originalité . On passe toujours par les mêmes ficelles pour comprendre où veut en venir l’interlocuteur et cela devient barbant dans certaines missions. Finalement, L.A Noire est si peu tonitruant et hollywoodien qu’il a des airs de Coppola sur toutes ses faiblesses. On s’ennuie utile, mais on s’ennuie quand même. Et le jeu vidéo dans tout cela ? Heavy Rain a fait des enfants, on n’en doute pas une seule seconde. Le problème étant que nous rabâcher toutes les cinq minutes que tout cela est précurseur et ultraréaliste empêche toute gentillesse avec le jeu. En étant volontairement sur la défensive, il serait très facile d’affirmer que L.A Noire est absolument identique à ce terrible jeu avec de vrais acteurs que fut « Une Poupée Pleine aux As » ou l’excellent « The Riper » avec Christopher Walken.
Clairement, L.A Noire est un géant poin’t click déguisé intelligemment en Grand Theft Auto, forcément plus passionnant sur certains points, mais qui, dans d’autres, ne révolutionne rien du tout. L’histoire est intéressante, on s’y plonge sans problème, mais on est vite déçu par sa tournure assez classique et son manque d’audace. On y trouve quelques petites piques sur la société de consommation, les médias, les politiques, mais rien de vraiment transcendant et d’original pour crier au génie. L.A Noire sera savouré uniquement par les amateurs de ces années 40 ici bien retranscrites et par les amoureux de jeux d’aventure qu’on peut oser nommer de « à l’ancienne ». De ceux où l’on ne fait que « cliquer » ou appuyer sur un bouton pour activer scène cinématique sur scène cinématique, avec seulement quelques « mini-jeux » entre deux grands moments. La conduite en véhicule, les missions annexes, l’amusante collection de véhicules et la recherche des trente monuments de la ville, tout cela est très optionnel et reste de l’esbroufe. Rockstar l’avoue en proposant de se « téléporter » ou l’on veut sur la carte ou lorsque l’on vous propose de passer une scène d’action trop difficile pour vous .
Le cœur du jeu, c’est son histoire bancale, mais passionnante , son ambiance incroyable et ses musiques qui contribuent allègrement au plaisir de continuer l’aventure. Rien d’autre. L’aspect GTA sublime l’univers, sert de faire-valoir. Un peu comme si Heavy Rain avait un « à côté » qui lui permettrait d’être autre chose qu’un simple film. Un jeu vidéo, en quelque sorte.




