Inside
Après les limbes, c’est l’intérieur qui compte pour le studio de développement indépendant Playdead. Forcément attendus au tournant, les développeurs reviennent avec… un autre jeu mettant un enfant au premier plan, un enfant qui en prendra de nouveau plein la figure. Redite classique, perte totale de talent, grosse déception ? C’est ce qu’on se dit en lançant le jeu pour la première fois, sans trop d’entrain par ailleurs. Et puis la première minute suffit.
Inside prend environ une minute avant de vous happer dans son univers. Une minute de calme ou vous courez vers la droite, dans la peau d’un enfant habillé très simplement, avec quelques couleurs que l’environnement n’arbore d’ailleurs pas. On découvre l’ambiance, la possibilité de sauter et surtout, l’incroyable animation proposée. Les détails sont surprenants, on est devant un pur film d’animation. Puis vient la première mort : des chiens vous voient au loin mais vous ne pouvez que courir, toujours vers la droite. Ils vous attrapent, vous dévorent. Retour au checkpoint.
Bientôt vous vous ferez courser et étouffer. Tirer dessus, violemment. Bombarder aussi, tant qu’à faire. Ce saut mal jaugé ? Vous le paierez avec un corps complètement disloqué à l’atterrissage. Il fallait aussi revenir à la surface très rapidement, la noyade était évidente ! Inside est cruel, l’enfant que vous contrôlez n’aura vraiment pas de chance et ce sera par ailleurs bien trop souvent de votre faute. Mais après tout, vous en avez vu d’autres ! Un petit râle de dégout après une mort violente et ça repart…
Quel est cet univers que vous parcourez ? Des soldats partout, des humains sans émotions, des couleurs nulle part. Enfin presque : le rouge vous indique les objets auxquels interagir, le bleu montre un peu de civilisation… Le code couleur est saisissant et se laisse rapidement comprendre. Mais la plupart du temps, tout sera abyssal, sombre, froid et terriblement dangereux.

Il est très difficile de mélanger avec talent le principe de tableaux à puzzle et une narration intéressante. Inside y parvient très efficacement en passant de l’un à l’autre, en mélangeant parfois les deux types de découvertes, avec un brio qui montre tout le talent du studio. Et pourtant, Inside ne raconte pas grand-chose de concret pendant la moitié des trois heures que requiert l’aventure pour peu que vous y preniez un peu votre temps. Le récit s’installe, rien n’est jamais expliqué ou commenté, tout est visuel. La compréhension passe entièrement par l’image… Pendant que l’ambiance sonore joue avec nous pour aider ou le déstabiliser pendant certaines phases de réflexion.
Et voilà, ils nous ont encore fait le coup ! Comme pour The Witness ou bien d’autres, Inside est de ces jeux qu’il est impossible de conseiller autrement qu’en vantant la qualité de sa technique, le côté malin des énigmes, ses animations incroyables dignes d’un des meilleurs films d’animation du moment… Alors que tout l’intérêt du jeu réside dans sa narration, sa façon de traiter le danger, de le faire vivre au joueur. Pire, Inside se savoure davantage une fois terminé, une fois l’histoire bouclée, parce que tout est plus net, compréhensible et facile à digérer. Par conséquent, il ne vous reste qu’une possibilité : me croire sur parole.
Pas du tout emballé par Inside, je m’y suis lancé par pur esprit de contradiction en préparant mon attaque à base de « vous voyez, Limbo c’était juste un coup de chance ! ». Résultat : j’ai pris une claque monumentale, tant Inside est un chef d’œuvre à tous les niveaux. Jeu pratiquement parfait, sans réel temps mort, il ne s’explique pas sous peine de gâcher les énigmes, il ne se raconte pas afin d’éviter de gâcher l’expérience. Il se joue, il se conseille et vous savez ce que vous devez faire à cet instant précis où vous lisez cette dernière ligne. Toutefois, âmes sensibles s’abstenir ! Car même dans sa violence et dans ses moments gore, Inside est une réussite à en avoir de sincères haut-le-cœur.





