Mafia: The Old Country c’est Mafia 0.5: The Old Formula ?
Après trois épisodes aux États-Unis, la série Mafia nous revient enfin avec, pour l’occasion, un retour aux sources en plaçant ce nouvel épisode, le bien nommé Mafia: The Old Country, en Sicile, au tout début du XXe siècle. Mais plus que le contexte, c’est aussi l’occasion de s’éloigner de la tentative monde ouvert de Mafia III pour revenir à la formule beaucoup plus narrative des deux premiers opus.
1904, Sicile, Italie, Enzo travail dans les mines de sulfure, abandonné là-bas par son père pour payer ses dettes. Le carusu, terme désignant les jeunes garçons, parfois même des enfants, travaillant dans l’enfer des mines, était sur le point de s’échapper de ses abominables conditions de vie avec son plus proche ami et un peu d’argent, alors qu’un effondrement couta la vie de ce dernier. Enzo parvint tout de même à s’échapper après avoir blessé le gros bras s’occupant de la mine, et sera finalement sauvé et recueilli par la famille de Don Torrisi, occupant du vignoble de la Valle Dorata et dirigeant charismatique non officiel d’une grosse partie de la région. Ça sera l’occasion pour le jeune carusu de faire ses preuves au travail pour remercier son sauveur, lui prouver sa loyauté et grimper les échelons d’une nouvelle société qu’il découvre.
Comment va la Famiglia ?
Sans grande surprise, Mafia: The Old Country raconte donc une histoire d’ascension fulgurante dans une société mafieuse, et bien entendu, sans que cela soit un véritable spoil, la descente aux enfers qui s’ensuit. De ce côté-là, la série maitrise toujours autant son sujet, avec des personnages notables aux personnalités bien marquées, des histoires d’amitié, d’honneur, de hiérarchie, de rivalités et, assurément, d’extorsion et guerre entre familles. C’est bien écrit, prenant, ultra-cinématographique, et la version originale en sicilien est sublimement interprétée et fortement conseillée (pensez à augmenter un peu la taille des sous-titres dans les options si vous ne portez pas vos jumelles).
Néanmoins, tout est peut-être un peu trop scolaire ici. Les amateurs de films du genre, Les Affranchis en tête, et les joueurs de la saga, seront ici en terrain connu, et fort à parier qu’ils seront rarement surpris par la progression de l’intrigue. Même les personnages, pourtant bien écrits, ont presque tous un stéréotype connu et déjà rencontré maintes fois dans d’autres œuvres sur le crime organisé. Si bien que l’on voit un peu trop les ficelles à mon goût, et l’on voit facilement venir les évènements, comme un personnage qui va être tiraillé entre son intérêt amoureux et son ambition de grandir et gravir les échelons dans la Famiglia. Un héros qui manque d’ailleurs un peu de charisme, du moins dans une bonne partie de l’histoire, par rapport à ceux des premiers opus.
Certes, on pourra toujours arguer que Mafia: The Old Country, en tant que préquelleÉpisode d'une œuvre dont l'action se situe avant celle des épisodes précédents. et retour aux sources, vient justement montrer l’éternel recommencement du cercle de vicieux et violent d’une telle société, et qu’il s’adresse aussi aux nouveaux venus, ce qui est effectivement un bon point, mais on aurait tout de même apprécié un peu plus de surprises, voire de prises de risques narratives, bien que sur ce dernier point, il faut dire que la fin divise tout de même pas mal au vu des retours joueurs, alors qu’elle me parait pourtant plutôt cohérente à une petite exception prête donc je ne pourrais évidemment pas discuter ici vu l’immense divulgâchage que ce serait.
Les traditions avant tout
Quoi qu’il en soit, c’est belle est bien la formule des premiers Mafia qui est reprise ici, soit une aventure aux ambitions extrêmement narratives entrecoupée de séances de conduite, gunfightPhases de fusillades dans un jeu vidéo ou un film lorsque ladite fusillade se déroule de manière acrobatique et effrénée ou d’infiltration, le tout enrobé dans un faux monde-ouvert. En effet, tout est fait pour donner l’illusion de liberté, mais soyez bien conscient que vous serez constamment sur des rails à suivre la progression de l’histoire sans que l’on vous donne jamais les rênes. Bien évidemment, ce n’est pas une critique en soi, mais mieux vaut savoir où vous mettez les pieds, les trailers et captures d’écrans pouvant être trompeuses, et ne pas s’attendre à un GTA-like. On a quand même le droit à la présence de collectiblesObjet d'inventaire devant être collectionné. à trouver, comme des statues ou des unes de journaux disséminés dans les décors…
Ce qui est plus déstabilisant en jeu, c’est que l’on retrouve aussi des options de customisation et de progression, pour les armes, les vêtements, les chevaux ou les voitures. Mais l’histoire progresse tellement rapidement sans partie optionnelle qu’au final, on s’en sert deux ou trois fois au maximum. C’est comme si énormément d’éléments avaient été initialement prévus, puis mis de côté et que tout ait été recentré autour de l’histoire principale, probablement par manque de temps/budget.
Autant il est intéressant d’avoir un jeu plus recentré, et je suis le premier à aimer quand un jeu respecte notre temps, autant, c’est parfois plutôt frustrant. Un aspect qu’a bien remarqué Hangar 13, car ils ont déjà annoncé qu’ils travaillaient sur un patch pour ajouter le mode Free RoamMode donnant la possibilité de visiter le jeu librement, sans contraintes. qui devrait voir le jour dans les prochains mois. Ce qui validerait tout de même la théorie du manque de temps.
Le démarrage du jeu, passé la séance de la mine, prend d’ailleurs pas mal son temps, et vous ne verrez pas votre premier gunfight avant quelques heures à vous balader à dos de cheval en suivant vos compagnons et mentor jusqu’aux prochains objectifs. Il faut bien apprendre le métier. Heureusement, le jeu est vraiment très beau, et l’un des grands plaisirs reste d’admirer les paysages de la Sicile, ce qui m’a d’ailleurs valu quelques gamelles en voiture… Gardez les yeux sur la route les enfants !



Techniquement le titre de Hangar 13 s’en sort assez honorablement dans l’ensemble sur un PC équipé d’une 3060ti, mais montre cependant de belles chutes de framerate dans les endroits peuplés, comme le marché ou à San Celeste, et également lors de transitions de zones qui sont alors marquées par de gros ralentissements assez gênants, surtout en phase de course (voir détails plus bas). En adéquation avec les ambitions cinématographiques du titre, celui-ci tente de présenter des transitions cinématiques-gameplayOu « jouabilité » en français, fait référence à la façon dont le joueur interagit avec un jeu vidéo. fluides, c’est-à-dire sans coupures. Enfin, en théorie, dans la pratique, elles souffrent davantage de pas mal de ralentissements sur un PC qui n’est pas une bête de course. C’est dommage, car ça vient casser un peu l’effet escompté, et c’est surtout très frustrant dans les scènes “d’actions” ou le procédé est utilisé toutes les 5 secondes…



À couteaux tirés
Niveau gameplay, le titre se découpe en trois principales phases, infiltration, gunfight et conduite. La partie infiltration est extrêmement classique, on se baisse pour éviter de se faire repérer par les gardes, que l’on peut éliminer discrètement par-derrière, soit en les mettant KO, soit en les poignardant, ce qui est plus rapide, mais utilise de la durabilité de votre couteau, qui servira aussi à ouvrir des caisses cadenassées pour quelques ressources. On peut d’ailleurs fouiller les corps pour récupérer des ressources, dinars ou pierres à aiguiser, et aussi les transporter pour les mettre hors de vue ou dans des caches pour qu’ils ne soient pas retrouvés par leurs copains. On pourra aussi créer des petites distractions en lançant des pièces ou des bouteilles pour attirer l’attention.
Finalement ces phases sont très permissives, sauf à la toute fin du jeu, à tel point qu’on ne cherche plus vraiment à cacher les corps au bout d’un moment, les gardes ne faisant finalement pas assez de rondes pour être une vraie menace et surtout, on se retrouve rapidement à choisir l’itinéraire qui permet de facilement arriver dans le dos des gardes un par un et de les neutraliser tranquillement. D’autant que l’on peut compter sur l’utilisation de l’instinct d’Enzo pour voir les positions ennemies à travers les murs. Rien de bien nouveau donc, mais le tout est fonctionnel, sans pour autant atteindre les sommets de ce qui se fait dans le genre, ni même se sublimer par moment
Heureusement, les gunfights, bien que, eux aussi, ultra-classiques, sont assez pêchus et viendront changer le rythme et vous distraire un peu entre deux avancés de l’histoire. À l’exception des missions où l’infiltration est obligatoire, et où de faire repérer déclenche un gameover directement, on retrouve toujours le même type de schéma. On tente de s’infiltrer, et si l’on se fait repérer, le combat se déclenche alors pour finir la mission en mode bourrin. Mais quoi qu’il en soit, même si l’infiltration est un succès parfaitement exécuté, une cinématique vient déclencher une séance de gunfight obligatoire pour le chemin du retour. C’est un peu frustrant en termes d’immersion d’avoir fait une belle séance sans se faire repérer tout ça pour finir par finalement mettre une balle dans la tête de tout ce qui bouge. Ça donne un peu l’impression d’avoir perdu son temps pour rien.
Petite spécificité de l’épisode cependant, on finit souvent par un duel aux couteaux faisant office de combat de boss. Il faut ici bien lire les mouvements de son adversaire et réagir en fonction de ses actions, en effectuant une parade contre-attaque lors d’une attaque simple, une esquive sur une attaque imblocable, ou une frappe forte pour briser sa garde. Ça change un peu et une fois de plus, ça vient participer au côté cinématographique recherché.





Finalement, vous aurez, accès à des chevaux, mais aussi, comme c’est la tradition, des voitures d’époques pour vous déplacer. On peut d’ailleurs suivre des panneaux de signalisation qui apparaissent aux croisements pour facilement trouver le chemin de son objectif. C’est très bien pensé et évite d’avoir à ouvrir la carte toutes les 5 secondes. Surtout, ça reste discret sans venir gâcher le superbe paysage et permet de conserver l’immersion. Et soyez rassuré, mais vous n’échapperez évidemment pas à une bonne course de voiture, parce que s’il y a bien une chose dont se rappellent les joueurs de Mafia, c’est bien ça… Mais peut-être pas de façon très positive… Heureusement, l’expérience devrait être moins traumatique ici, j’ai moi-même réussi du premier coup en étant le pire conducteur en existence.
Finissons par un mot rapide sur une fin un brin longuette, avec un titre qui trouve de bon ton de nous faire éliminer la moitié de la population de la Sicile, puis d’ajouter des séances d’infiltration à rallonges dans un finish qui n’en fini pas et vient un peu casser le rythme et la force du message.












