Vampire: The Masquerade – Bloodlines : 21 ans et toutes ses canines
Rares sont les jeux à avoir autant marqué leurs joueurs. Vampire: The Masquerade – Bloodlines est cependant bien moins populaire que d’autres cRPG« Jeu de rôle sur ordinateur», un terme se rapportant aux jeux de rôle occidentaux pour les séparer des JDR sur table, et en opposition aux RPG japonais. cultes tels que Baldur’s Gate ou Fallout. Ses ventes initiales furent décevantes, en partie dues à Activision forçant une sortie dans un état catastrophique. Cela lui valut des critiques peu flatteuses et précipita par l’occasion la fermeture de son studio. Pourtant, les innombrables qualités du titre et son côté unique ont fini, grâce au bouche-à-oreille et au travail acharné des joueurs pour patcher le jeu, par permettre à Vampire: The Masquerade – Bloodlines de gagner en popularité et d’obtenir le statut de jeu culte.
Alors qu’on fête bientôt ses 21 ans, et que la sortie d’une suite improbable qui inspire à la prudence est imminente, il est grand temps pour moi de faire un petit article plein d’affection, sorte de lettre d’amour, sur ce que je considère comme un de mes jeux de cœur et comme l’un des meilleurs RPG sorti sur PC.
- Vampire the Masquerade : c’est quoi ?
- Vampire: The Masquerade – Redemption
- Troika – Trois petits jeux et puis s’en vont
- Vampire: The Masquerade – Bloodlines
- Comment jouer à VtM:B en 2025 ?
- Prolonger le plaisir : Un jeu toujours à la mods
- Vampire contre attaque : Et la suite alors ?
Vampire: The Masquerade : c’est quoi ?

Vampire: The Masquerade, c’est d’abord un jeu de rôle sur table mettant en scène une société vampirique dans un monde contemporain ignorant, pour la grande majorité, leur existence. Il existe bien des versions à différentes époques, comme The Dark Ages au temps de l’Inquisition, mais en général, lorsque l’on parle de Vampire: The Masquerade, on se réfère plutôt au monde moderne, notre monde en fait, mais en plus sombre. Bien que sur ce dernier point, on commence à se poser sérieusement la question au vu des événements de ces dernières années. Quoi qu’il en soit, dans les grandes lignes, on différencie les vampires en clans, chaque membre d’un clan partageant l’héritage d’un ancêtre commun leur ayant conféré leurs spécificités, aussi bien leurs défauts que leurs pouvoirs, de génération en génération, et possèdent donc des traits communs. Mais, encore plus important, chaque vampire appartient, plus ou moins par choix, à une secte, sorte d’organisation, presque parti politique, ayant ses propres préceptes, règles et traditions. Une majorité des vampires font partie de la Camarilla, possédant une hiérarchie quasi féodale et menée par un Prince, terme unisexe. Toujours est-il que le principe fondamental respecté par la majorité des vampires, donnant son nom à la licence, est la Mascarade : l’obligation de garder leur existence secrète, et donc de ne pas se faire prendre en train de se nourrir d’un humain ou d’utiliser des capacités surnaturelles.
Outre son loreReprésente l'histoire et les traditions autour d’un univers de fiction, ne constituant pas l’intrigue principale d’une œuvre. extrêmement riche et unique, le principal argument de Vampire: The Masquerade, réside dans sa volonté de mettre le roleplay au cœur du jeu. L’accent est en effet mis davantage sur les intrigues politiques et les joutes de pouvoir et d’influence que sur les combats, bien que la puissance puisse également être un argument de poids, ou un dernier recours si nécessaire. Mais c’est surtout la liberté donnée au storyteller, le terme choisi pour désigner le maitre du jeu, afin qu’il puisse créer le genre d’histoire et de gameplayOu « jouabilité » en français, fait référence à la façon dont le joueur interagit avec un jeu vidéo. qui lui plaît, qui fait la force de la licence. Rien ne l’empêche, s’il le souhaite, de se focaliser sur les combats, bien que cela ne soit pas ce qui est le plus adapté au système de règles, ou plutôt de se lancer dans des défis de joutes verbales, ou simplement d’ignorer complétement les contraintes des règles du livre de jeu. D’autant que Vampire: The Masquerade n’hésite pas à conter sans détours les côtés les plus sombres et cruels, non seulement des créatures de la nuit, mais aussi des humains peuplant les villes modernes. Parfois mature, parfois brutal et dérangeant, il n’est pas un jeu de rôle à mettre entre toutes les mains.




Alors forcément, pour une adaptation de ce jeu de rôle atypique, on s’attendait à retrouver ce côté liberté d’approche avec l’accent mis sur les dialogues, les quêtes et l’immersion. Un cRPG quoi.
Vampire: The Masquerade – Redemption

Ce qui nous mène à la 1ʳᵉ itération de cette tentative d’adaptation en jeu vidéo avec Vampire: The Masquerade – Redemption, sorti en 2000 avec un concept intéressant. Vous incarnez le beau et preux templier français Christophe, qui finira rapidement par être changé en vampire et devra apprendre à survivre dans la société de suceurs de sang du Prague et du Vienne du XIIᵉ siècle… Puis, plus tard, dans le monde presque contemporain des années 1990. L’originalité du titre résidant en effet dans la proposition d’une histoire se déroulant sur plusieurs siècles, dans deux époques éloignées.
Dans la pratique cependant, Redemption s’éloigne pas mal de ce à quoi on pouvait s’attendre, en proposant un gameplay RPG bien plus proche du hack & slash que d’un titre basé sur les quêtes et les choix. Vous passerez la plupart de votre temps à arpenter des donjons avec vos compagnons à l’IA discutable, et à castagner tout un tas d’ennemis… Décevant… Malgré tout, le titre de l’an 2000 est loin d’être un mauvais jeu : il a même reçu de bonnes critiques, bien qu’il ait assez mal vieilli pour une audience moderne. Mais son style ne correspond pas vraiment à l’idée qu’on pouvait se faire d’une adaptation RPG de la licence.



C’est là qu’intervient Troika, le studio qui va hériter de la licence et qui va prendre en charge, dès l’année suivante, du développement du jeu qui nous intéresse ici, Vampire: The Masquerade – Bloodlines (qu’on pourra aussi simplement référer par la suite Bloodlines ou VtM:BVampire: The Masquerade – Bloodlines).
Troika – Trois petits jeux et puis s’en vont
Derrière Troika se cache en fait trois grands noms du RPG occidental et anciens d’Interplay Entertainment, à savoir Tim Cain, Leonard Boyarsky et Jason Anderson, connus pour la création du légendaire Fallout, rien que ça. Troika n’aura au final sorti que trois jeux : Arcanum: Of Steamworks and Magick Obscura (2001), The Temple of Elemental Evil (2003) et donc Vampire: The Masquerade – Bloodlines (2004), leur dernier titre qui signera la fin du studio, mais nous y reviendrons plus tard. Trois titres, donc, qui résonnent encore dans le cœur des amateurs de cRPG. Des jeux qui auront en commun une ambition démesurée, de superbes idées, des univers riches et surtout une véritable profondeur à tous les niveaux.
On y trouvera en effet différentes approches et systèmes de jeu possibles, des quêtes mémorables ainsi que leurs résolutions variées, et bien évidemment des histoires marquantes. Malheureusement, ils ont aussi en commun le revers de leur trop-plein d’ambition, c’est-à-dire des jeux techniquement souvent datés et, c’est regrettable, saupoudrés d’une bonne quantité de bugs que ne renierait pas un Bethesda au plus haut de sa forme.



En résumé, Troika, c’est un peu le héros maudit et imparfait d’une niche de joueurs, un véritable coup de cœur avec qui, peu importe les difficultés, les qualités proposées sont tellement fortes et marquantes qu’on est prêt à toutes les concessions pour passer outre certains aspects les moins réussis ou les problèmes techniques. C’est ça aussi, le véritable amour : pour le meilleur et pour le Vampire donc (jeu de mot trademark par Aldastrige).
Vampire: The Masquerade – Bloodlines

Retour à la Source
Pour le deuxième jeu basé sur la franchise, Troika fait le choix d’un action RPG, qui, contrairement à Redemption, délaisse le hack & slash. Vampire: The Masquerade – Bloodlines se concentre plutôt sur le roleplay, laissant le joueur créer son personnage, et lui donnant une liberté d’approche par un gameplay lorgnant du côté des Immersive sims tels que Deus Ex.

En commençant une partie, on est invité à créer son personnage en choisissant parmi sept clans, dont certains vont d’ailleurs radicalement changer votre expérience de jeu. Jouer un Nosferatu vous forcera à passer un maximum par les égouts, votre apparence hideuse venant briser la mascarade au premier coup d’œil, sauf peut-être le soir d’Halloween. Alors qu’en choisissant un Malkavian, un clan souffrant d’afflictions psychologiques, il y a de fortes chances que vous ne compreniez pas tout ce qui se passe si c’est votre premier playthrough tellement ses possibilités de dialogues sont perchées. Ça reste cependant une expérience assez exceptionnelle lorsque, en pleine rue, vous vous retrouvez soudainement dans une conversation musclée avec un panneau de signalisation STOP… Bref, ce sont certes les deux cas les plus extrêmes, mais les autres clans ont également leurs spécificités, notamment au niveau de leurs disciplines, qui pourront changer radicalement votre façon d’approcher une quête ou une situation. Une liberté d’approche qui fera paraître chaque playthrough comme une expérience unique.

Vous le comprendrez donc, l’idée principale de Troika était de coller au style et à l’ambiance du jeu de rôle papier original, privilégiant l’immersion dans le monde des Ténèbres avec, de fait, un fort accent mis sur les intrigues politiques au sein de la société vampirique de Los Angeles. Dès le départ justement, votre existence est seulement autorisée, disons plutôt tolérée, afin de ne pas mettre le feu aux poudres de relations déjà fortement explosives entre la Camarilla et les Anarchs, les deux principaux pouvoirs politiques à la cité des Anges. Votre Sire est en effet exécuté pour vous avoir engendré sans la permission du Prince de la Camarilla. Une grossière infraction aux Traditions, sortes de commandements des vampires, dont la punition est généralement la mort finale du coupable et de sa progéniture. Mais c’est sans compter sur l’intervention de Nines Rodriguez, leader de l’opposition, qui vous sauve la mise au dernier moment. Ce qui n’empêchera pas le Prince LaCroix de vous envoyer en mission pour son propre intérêt. D’autant que le Sabbat commence à faire des siennes dans les rues de L.A. et qu’ils ont, eux, beaucoup moins de respect pour la Mascarade.
Des bonnes idées à la pelle

Le studio reprend pour l’occasion la fiche de personnage du jeu de rôle papier. Vous pourrez y dépenser votre XP durement gagnée dans vos attributs et capacités physiques, sociales ou mentales, ainsi que vos disciplines. Choix marquant, contrairement à beaucoup de RPG, les combats n’octroient pas de points d’expérience au joueur. Seule la résolution de quêtes, ou l’avancée dans celles-ci, vient le récompenser. Un choix ô combien important quand on veut laisser une liberté d’approche au joueur en évitant un biais, des points d’expérience supplémentaires, vers la méthode bourrin.
D’ailleurs, VtMVampire: The Masquerade:B vous donne également le choix dans votre style de combat privilégié – mains nues, armes blanches, ou armes à feu. Fait intéressant, le jeu change de perspective selon votre équipement, on contrôle le personnage à la première personne lorsqu’on est équipé d’une arme à feu. La caméra passe ensuite à la 3ᵉ personne en cas d’utilisation d’une arme de mêlée. De plus, il est possible de changer à la volée lors de l’exploration. Parlons du terrain de jeu justement, Bloodlines n’est pas un monde ouvert comme on en voit beaucoup de nos jours, mais propose plutôt de découvrir quatre quartiers – Santa Monica, Downtown, Hollywood et Chinatown – de Los Angeles sous forme de hub. Vous les découvrirez au fur et à mesure de votre progression, ceux-ci proposant différents bâtiments à visiter, leurs égouts et souterrains ainsi que leurs propres galeries de personnages et de quêtes. Certaines quêtes s’étendent d’ailleurs sur plusieurs de ces quartiers. Il est en effet possible de passer de l’un à l’autre en prenant le taxi, avec au passage probablement le chauffeur le plus mystérieux et charismatique du monde du RPG.




Sur le papier, Troika réussit donc bel et bien le retour à la source souhaité, donnant l’illusion au joueur d’incarner son propre vampire. Certes, inutile de s’attendre à une réactivité à la hauteur d’un Baldur’s Gate 3, mais l’immersion est bel et bien là. Un pari d’ailleurs tellement réussi dans son écriture, on y reviendra, que VtM:B est considéré comme canon par l’éditeur White Wolf. Elle est d’ailleurs le préquelÉpisode d'une œuvre dont l'action se situe avant celle des épisodes précédents. aux scénarios officiels Time of Judgment.
Le moteur Source (de tous les problèmes)

On l’a vu en parlant de l’histoire de Troika, mais Vampire: The Masquerade – Bloodlines est un projet maudit. Une malédiction qui d’ailleurs semble avoir aussi touché sa suite, mais c’est une autre histoire. Tout commence surtout par la décision de développer le jeu sur le futur moteur phare de Valve, un certain moteur Source, activement développé pour un petit jeu… Half-Life² !
Un choix principalement dû aux qualités du moteur pour ses animations faciales et synchronisation labiale, ce qui sera l’un des gros points forts du jeu. Évidemment, Troika n’hérite que d’une version en cours de développement du moteur Source, avec peu de contact avec les équipes de Valve. Ils doivent donc se débrouiller seuls de leur côté pour développer des fonctions pas encore présentes dans leur version non finie de Source, comme un système d’éclairage spécifique au contexte très nocturne du jeu ou des effets de particules pour les disciplines. Sachant bien entendu que l’on est loin de l’accessibilité et de la disponibilité de la documentation d’un moteur actuel comme Unreal Engine ou Unity. Troika perd donc un temps monstre sur des outils qu’ils ne maîtrisent pas vraiment.
Il a été lâché sur le marché au pire moment possible – la plupart des gens ne savaient même pas que nous étions sortis. Les fans comme les développeurs de Troika se demanderont toujours à quoi le jeu aurait pu ressembler avec six mois de plus.
Brian Mitsoda lead writer 2013 – Eurogamer (traduit de l’anglais)

Tout ça ne joue assurément pas en faveur de Troika, d’autant qu’Activision de son côté s’impatiente et veut sortir le titre le plus tôt possible. Contractuellement, du fait de l’utilisation du moteur Source, Bloodlines ne pouvait pas sortir avant Half-Life². Activision va donc finir par prendre la catastrophique décision marketing de forcer la sortie au 16 novembre 2004. Soit le même jour que le titre phare de Valve, sûrement le jeu PC le plus attendu depuis longtemps. Pire, outre HL², Bloodlines sortira dans un contexte ultra-concurrentiel avec de gros noms et franchises très attendues en face, Metal Gear Solid 3: Snake Eater, Halo 2 ou Grand Theft Auto: San Andreas par exemple, condamnant le jeu à n’avoir quasiment aucune chance d’attirer l’attention.
Cette sortie précipitée, en plus de l’aberration marketing, entraîne surtout la sortie d’un titre non fini. La fin du développement est bâclée, et amputé de beaucoup de contenu qui n’a pu être terminé à temps. Pire, le Q&A n’avait clairement pas été réalisé, et le jeu était donc bourré de bugs.
On nous a dit de boucler le projet en quelques mois, à un moment où nous savions que cela allait exiger énormément de crunch. Il était évident que nous n’étions plus considérés comme un projet important.
Brian Mitsoda lead writer 2013 – Eurogamer (traduit de l’anglais)
Évidemment, les bugs et le contenu coupé se ressentent encore plus sur la dernière partie du titre, où l’on peut voir le plus gros des dégâts. Celle-ci est en effet la plus bâclée, et on y trouvera, pour le plus grand désarroi des joueurs, beaucoup plus de zones avec des combats obligatoires, sous forme de donjons ou de longs couloirs remplis d’ennemis en tout genre à dézinguer. C’est d’autant plus dommage que jusqu’ici le jeu excellait dans son rythme et son focus sur les quêtes et la liberté d’approche. On garde évidemment un léger PTSD du passage dans les égouts, où le souterrain de Chinatown… Malheureusement, ça peut venir gâcher l’expérience des joueurs les moins patients, surtout ceux ayant fait le choix d’investir leur XP dûment gagnée dans des compétences sociales ou techniques.



Heureusement, c’est là qu’intervient une communauté extraordinaire portée par des joueurs ayant aperçu toutes les qualités exceptionnelles de ce Bloodlines. Soyez d’ailleurs rassuré, car grâce à leur travail, le jeu est de nos jours jouable sans aucun bug, ou presque. Ils se sont en effet attelés à la tâche pour finir et perpétuer les fondations que feu Troika, qui n’a eu le temps de sortir qu’un seul patch, avait bâti… Un des cRPG les plus marquants des 25 dernières années.
Pourquoi il a tant marqué les esprits ?

Il faut dire que malgré les conditions plus que compliquées, Troika a construit quelque chose d’unique, entraînant ainsi une communauté entière à venir retaper le jeu et le faire revenir d’entre les morts (voir chapitre suivant).
Comme je le mentionnais en introduction, ce qui vaut de nos jours ce suivi et ce statut de cult classic à VtMB, ce sont ses qualités tellement fortes qu’elles viennent faire oublier les nombreux problèmes du titre. Qualités qui tournent pour la plupart autour de la plus grosse réussite du titre, l’immersion dans le Monde des Ténèbres et sa version de L.A. au début des années 2000. Ça passe par une qualité d’écriture magistrale, collant parfaitement au matériel original. Brian Mitsoda a eu carte blanche, dans le ton et le langage utilisé, Bloodlines étant un titre pour public averti. Que ce soit les dialogues, les personnages et leurs quêtes, les notes trouvées ou autres emails, tout est très bien écrit avec une cohérence globale maintenue tout au long du titre.



Mitsoda et ses équipes ont réussi à nous offrir une véritable galerie de personnages mémorables, tous avec leurs caractères bien définis, et, VtM oblige, leurs propres objectifs. L’expérimenté Smiling Jack aura marqué les joueurs dès le tutoriel, les sœurs jumelles Jeanette et Therese Voerman aux personnalités carrément opposées, l’horrible Prince Sébastien Lacroix qui rappelle fâcheusement un chef d’État actuel… Même des personnages très secondaires comme les vendeurs ont eu le droit à un soin d’écriture qu’on s’en rappelle encore aujourd’hui (voir galerie ci-contre). Et tant d’autres qu’il faudrait des pages pour en parler.




D’autant que vous aurez souvent plusieurs choix de conversation, dont certains seront disponibles seulement si vous avez investis votre XP dans les dans les bonnes capacités. Mieux encore, ce travail minutieux d’écriture est sublimé par un doublage exceptionnel pour l’époque, avec un casting franchement mémorable. On y trouvera par exemple John DiMaggio (la voix de Marcus Fenix de Gears of War, Bender de Futurama) en Similng Jack, Grey DeLisle (Catwoman dans les jeux Batman) incarnant les sœurs Voerman, ou encore Andy Milder (Weeds) en Prince Lacroix et bien d’autres. Que des personnages inoubliables. Par exemple, qui a pu oublier les interactions hautes en couleurs avec FAT Larry doublé par Phil LaMarr, et probablement l’un des vendeurs le plus marquant du jeu vidéo.
Le tout donne vie et une véritable personnalité aux personnages rencontrés, d’autant que le moteur Source, pour le coup, permet des animations faciales saisissantes encore aujourd’hui.


On en a parlé, mais l’autre pan de VtM:B reste la découverte de nombreuses possibilités inattendues de gameplay et de roleplay. On pourra se rappeler l’utilisation des ordinateurs en jeu. Il y avait un côté extrêmement tactile, on prenait le contrôle de PC tournant sous une sorte d’OS similaire à un DOS où l’on pouvait naviguer en tapant des commandes spécifiques. Tout au clavier bien évidemment. Certaines commandes étaient protégées par mot de passe que l’on pouvait trouver ailleurs ou tenter de hacker si notre capacité était suffisante. En plus du côté satisfaisant et immersif, l’utilisation des ordinateurs pouvait aussi, selon le contexte, générer une véritable tension, tout se passant en temps réel, sans mettre en pause donc. Il n’était alors pas rare lors d’une séance d’infiltration d’avoir à tenter de trouver une info, désactiver des caméras ou ouvrir une porte, le plus rapidement possible avant qu’un garde ne revienne. Dans ce cas, c’est vraiment votre dextérité au clavier qui pouvait être mise à l’épreuve, ajoutant une pression grisante à la situation.


Finissons aussi par un mot sur une des quêtes les plus mémorables et les plus connues de VtM:B, j’ai nommé l’Ocean House Hotel. Une quête atypique qui vous mettra aux prises avec un hôtel hanté, référençant fortement The Shining de Stephen King. Un niveau à l’ambiance terrifiante, souvent cité dans les plus grands moments du jeu vidéo, et qui a inspiré de nombreux jeux d’horreur par la suite. Un niveau qui a même le droit de nos jours à des articles récents, comme c’est le cas ici chez PC Gamers en mai 2025.
Il ne s’agit ici que de quelques exemples, mais des très nombreuses situations, conversations et quêtes ont marqué jusqu’au sang de nombreux joueurs qui, comme moi, peuvent encore aujourd’hui en parler avec un enthousiasme et une passion parfois un peu débordante.
Rik Schaffer de la bonne musique
Bien évidemment, on ne peut pas non plus parler de VtM:B sans mentionner son OST. Réalisée par Rik Schaffer, elle a eu droit à une ressortie en vinyle dans une superbe édition collector en 2019. Schaffer parvient avec brio à donner vie à l’ambiance du monde des Ténèbres, avec des morceaux parfois entrainants, souvent angoissants.
Partie intégrante de l’ambiance punk rock début 2000, VtM:B a également utilisé quelques morceaux licenciés. On se rappellera du Lecher Bitch de Genitorturers, ou encore Swamped de Lacuna Coil. Et c’est sans compter sur la musique du menu rappelant très fortement Angel de Massive Attack… L’histoire voulant que Troika utilisait cette chanson en placeholder, mais, ne pouvant obtenir les droits, Rik Schaffer dut composer un thème similaire.
L’héritage
Tout comme la sortie de VtM:B, la suite n’a pas non plus été un long fleuve tranquille. La fermeture de Troika et les faibles ventes à la sortie n’ont pas vraiment incité à la mise en chantier de suites. La licence a cependant échoué chez CCP, créateur du MMO spatial Eve Online, qui avait dans l’idée de sortir un MMO dans le Monde des Ténèbres. Un projet en chantier pendant neuf ans, qui ne verra finalement pas le jour, ironique pour des vampires. Il sera officiellement annulé en avril 2014 (voir cet article de The Guardian pour en savoir plus).
Il faudra ensuite attendre 2015 et le rachat surprise de White Wolf, la maison mère du monde des Ténèbres, par Paradox Interactive, spécialiste du Grand Stategy avec des titres comme Crusader Kings et Europa Universalis, et bien connu pour leur politique de DLCs. Un rachat qui redonne surtout l’espoir d’un nouveau jeu dans l’univers de VtM.
Pas grand-chose à se mettre sous les crocs pendant un bon moment cependant, Paradox préférant louer la licence à d’autres. On verra arriver la timide sortie en 2017 d’un jeu narratif sur mobile, au titre plus qu’évocatif : We Eat Blood And All Our Friends Are Dead. Un titre décevant, ne laissant au final absolument aucun choix au joueur. Puis, aux alentours des premiers teasers pour Bloodlines 2 en 2019, on voit arriver plusieurs jeux narratifs comme les Visuals Novels du studio polonais Draw Distance (Coteries of New York puis Shadows of New York) et les titres de type livre dont vous êtes le héros par Choice of Games (Night Road ou Out For Blood).
Alors que le développement de Bloodlines 2 semble s’enliser, ce qui se rapprochera finalement le plus d’un nouveau RPG sera le jeu des Français de Big Bad Wolf : Vampire: The Masquerade – Swansong en 2022 et testé dans nos colonnes. Dans le même style que leur précédent titre The Council, il s’agit plus d’un jeu narratif avec des éléments de RPG, un jeu intéressant mais malheureusement pas à la hauteur de nos attentes. Et ce n’est pas le sympathique, mais très dispensable, battle royale free-to-play Bloodhunt qui va nous faire patienter…
À noter qu’on a même eu le droit à un jeu VR avec Vampire: The Masquerade – Justice, sympathique, mais imparfait.
Comment jouer à VtM:B en 2025 ?
Pas besoin de réinventer la roue, beaucoup de pages internet existent déjà pour vous aider à avoir la meilleure expérience possible en vous lançant dans l’aventure VtM:B de nos jours. Je vais donc me contenter de résumer le plus important et vous donner quelques liens utiles pour approfondir si, comme moi et bien d’autres, vous finissez par tomber la tête la première dans ce Monde des Ténèbres.
Mais tout d’abord, sachez qu’il est maintenant très facile de lancer le jeu dans des conditions optimales sans se compliquer la vie. Le plus simple reste de prendre la version GOG du jeu qui intègre de base le patch non officiel de Wesp5 (The Unofficial Patch). Si vous possédez le jeu sur Steam ou en physique, pas de panique non plus, il suffit de lancer un simple .exe après l’installation du jeu. Il ne vous restera qu’à choisir si vous voulez la version basique, corrigeant les bugs, ou la version plus qui ajoute du contenu coupé et terminé par les fans (dont certains morceaux de l’OST non utilisés dans le jeu de base).
Quelques conseils de jeu à tous les nouveaux venus, histoire de partir sur de bonnes bases. Ce n’est pas un jeu dans lequel vous pourrez investir des points d’expérience partout, il faudra faire des choix, et comme souvent dans les jeux de ce style, Il vaut mieux être un one-trick pony qu’un jack-of-all-trades. Autrement dit, concentrez-vous sur un style de combat et quelques compétences principalement. Vous pourrez tenter le reste dans un prochain runUne partie intégrale ou une tentative de terminer un jeu vidéo.
PC Gamers a d’ailleurs sorti un article avec quelques conseils en 2022 qui sont toujours pertinents. Je vous conseille surtout de sauvegarder souvent, et sur plusieurs fichiers !
Maintenant, si vous en voulez plus et n’avez pas peur de mettre les mains dans le cambouis, la section suivante est faite pour vous.
Prolonger le plaisir – Un jeu toujours à la mods
Preuve s’il en est de l’attachement des joueurs, et de son statut de cult classic, des nouvelles versions de patchs ou de nouveaux mods sortent encore aujourd’hui, plus de 20 ans après sa sortie officielle. On peut d’ailleurs remercier Wesp5, a.k.a. Werner Spahl, un chimiste allemand s’occupant du patch non officiel depuis de très nombreuses années maintenant. Wesp5 travaille d’ailleurs sur un projet original vous mettant dans la peau d’un chasseur de vampires nommé Prelude, dont 2 chapitres sont sortis.
Vous pouvez aussi utiliser la console de commande pour vous aider, ou simplement, vous débloquer (un noclip pourrait être utile). Petit conseil, il arrive que la console de commande ne veuille plus se fermer. Dans ce cas, tapez chareditor pour ouvrir l’écran de personnage pour vous débloquer.
Bien évidemment, de nombreux mods esthétiques sont disponibles. On trouve des mods de textures HD, mais aussi des ReShade améliorant le rendu global, et surtout la colorimétrie, un peu criarde dans le jeu original. [voir captures]




Là-dessus, je vous laisse choisir en fonction de vos préférences.
Mais le plus intéressant reste tout de même les mods permettant de prolonger le plaisir. Qu’ils ajoutent du contenu et des choix au jeu original, ou carrément proposent des extensions et des nouvelles maps entières. Attention cependant, l’utilisation de ces mods peut ajouter quelques bugs, d’autant que tous ne sont pas compatibles avec les toutes dernières versions du patch non officiel.
Clan Quest
https://www.moddb.com/mods/vtmb-clan-quest-mod
L’un des plus gros mods modifiant le jeu. Comme son nom l’indique, il ajoute de nouvelles quêtes pour chacun des clans. Mais plus ambitieux encore, il ajoute carrément un nouveau hub (East L.A.) avec ses propres quêtes et personnages. Il est surtout intégré à l’histoire principale, avec la possibilité d’infiltrer ou rejoindre la secte du Sabbat, et offrant plusieurs nouvelles fins alternatives. Un must have pour renouveler l’expérience de la meilleure des façons.
War games
https://www.moddb.com/mods/vampire-bloodlines-war-games
Ici, on parle plus d’un stand-alone que d’un mod à proprement parler avec une toute nouvelle campagne. War Games se déroule à une autre époque, la Seconde Guerre mondiale, et propose une histoire originale. Vous pourrez découvrir quatre nouvelles maps représentant quatre villes : Portsmouth, Zurich, Paris et Berlin.
Bonus : Princes of darkness (mod de CKIII)
https://steamcommunity.com/sharedfiles/filedetails/?id=2216659254
Pour finir, non pas un mod pour VtM:B, mais pour Crusader Kings III. Princes of Darkness est donc un jeu de Grand Strategy, adaptant les règles de CKIII et vous mettant dans la peau d’une dynastie de vampires. Évidemment, il s’agit moins de descendance que de conserver et agrandir son influence, étant donné la nature immortelle des vampires. À noter qu’il existe également la version précédente du mod pour Crusader Kings II si vous ne possédez pas le 3.
Bonus 2 : Vampire: The Masquerade – Reawakened (mod de Skyrim)
On est ici qu’au stade du projet en cours, mais qui peut valoir le coup de suivre. Vampire: The Masquerade – Reawakened avait pour ambition de créer un remake de Redemption avec le moteur de Skyrim.
Après trois ans de travail, et faute d’accord avec un Activision qui soigne toujours autant sa cote d’amour avec les fans de la franchise, le remake a depuis changé de forme pour se transformer en nouveau titre à part entière.
Vampire contre attaque : Et la suite alors ?
L’histoire de Bloodlines 2, vous l’avez probablement déjà entendue. Entre l’annonce en 2019 du jeu développé par Hardsuit Labs et une sortie initialement prévue en 2020, le licenciement de Mitsoda et Cluney en 2020, puis le retrait du développement au studio pour le confier à The Chinese Room en 2021, plus connu pour ses jeux narratifs type Walking Sim. Et enfin, le récent rétropédalage de Paradox sur sa stratégie de vendre une partie intégrante du jeu, deux clans jouables, en DLC.

Bref, beaucoup de drama, dont on devrait connaitre le dénouement au moment où vous lisez ces lignes. À moins d’un énième retournement de situation.















